ChaussĂ©ede Charleroi, 1380 Plancenoit, Belgique. Classement comme monument le 11 septembre 1978. RĂ©alisĂ© par le sculpteur Jean-LĂ©on GĂ©rĂŽme et Ă©rigĂ© Ă  l’initiative de trois particuliers le 28 juin 1904 Ă  un endroit qui selon la lĂ©gende aurait Ă©tĂ© la portion de terrain occupĂ©e par le dernier carrĂ© de la Garde impĂ©riale et oĂč le gĂ©nĂ©ral Cambronne aurait Bonjour, Comme vous avez choisi notre site Web pour trouver la rĂ©ponse Ă  cette Ă©tape du jeu, vous ne serez pas déçu. En effet, nous avons prĂ©parĂ© les solutions de CodyCross Il aurait prononcĂ© son fameux mot Ă  Waterloo. Ce jeu est dĂ©veloppĂ© par Fanatee Games, contient plein de niveaux. C’est la tant attendue version Française du jeu. On doit trouver des mots et les placer sur la grille des mots croisĂ©s, les mots sont Ă  trouver Ă  partir de leurs dĂ©finitions. 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Si vous souhaiter retrouver le groupe de grilles que vous ĂȘtes entrain de rĂ©soudre alors vous pouvez cliquer sur le sujet mentionnĂ© plus haut pour retrouver la liste complĂšte des dĂ©finitions Ă  trouver. Merci Kassidi Amateur des jeux d'escape, d'Ă©nigmes et de quizz. J'ai créé ce site pour y mettre les solutions des jeux que j'ai essayĂ©s. This div height required for enabling the sticky sidebar PutConquĂ©rir L'europe GrĂące À Waterloo; Pour Lui, Waterloo Ne Fut Pas Morne Plaine; A Fait Waterloo Et S'est PortĂ© Volontiers À Gallipoli; Une Manche GagnĂ©e AprĂšs Waterloo, Mais Pas Haut La Main; Lettres De Waterloo; Chez Les Anglais À Waterloo; A Pris L'eau A Waterloo; Il Aurait PrononcĂ© Son Fameux Mot À Waterloo; Comme La Plaine De La bataille de Waterloo, le 18 juin 1815 ,a opposĂ© les armĂ©es de NapolĂ©on aux troupes anglo-prussiennes de Wellington et BlĂŒcher, non loin de Bruxelles. AprĂšs s’ĂȘtre Ă©chappĂ© de l’üle d’Elbe oĂč il Ă©tait retenu prisonnier, NapolĂ©on regagne Paris le 20 mars 1815 et reprend le pouvoir Cent-Jours ». ImmĂ©diatement, une coalition formĂ©e par la Russie, l’Autriche, la Prusse et l’Angleterre envoie des troupes Ă  la frontiĂšre belge afin de prĂ©parer l’invasion de la France. Ayant rassemblĂ© une armĂ©e de 125 000 hommes, l'empereur se porte Ă  la rencontre de l'ennemi. L'affrontement principal, qui a lieu Ă  Waterloo, se termine par une dĂ©faite française et la chute dĂ©finitive du Premier empire. Pourquoi la bataille de Waterloo ? AprĂšs avoir habilement Ă©vitĂ© les rĂ©gions les plus royalistes, l'Ă©vadĂ© de l'Ăźle d'Elbe fait une entrĂ©e triomphale Ă  Paris le 20 mars 1815 tandis que Louis XVII et sa cour gagnent les Flandres. NapolĂ©on Ier sort de sa voiture, il est portĂ© par la foule vers l'escalier du Palais des Tuileries, les dignitaires de l'Empire sont lĂ  pour l'accueillir, dans Paris les drapeaux tricolores ressortent aux fenĂȘtres ! Toutefois, cet enthousiasme de l'instant ne doit pas cacher les difficultĂ©s rĂ©elles que rencontre l'Empereur lors de son retour au pouvoir. Tous les anciens cadres de l'Empire n'ont pas accouru, la majoritĂ© des Français reste particuliĂšrement attentiste face Ă  cette restauration impĂ©riale dont on ne sait si elle sera durable ou s'il ne s'agit que d'une aventure vouĂ©e Ă  l'Ă©chec. NapolĂ©on doit chercher Ă  fidĂ©liser ces ministres les plus dangereux FouchĂ© recouvre son portefeuille de la Police. Politiquement, il lui faut donner des gages, ne pas oublier que c'est le SĂ©nat qui l'a dĂ©chu en 1814. NapolĂ©on joue la carte de la libĂ©ralisation, acceptant de lĂącher du leste la libertĂ© de Presse est rĂ©tablie et le 6 avril son vieil opposant Benjamin Constant est chargĂ© de rĂ©diger une nouvelle constitution ! En une semaine, celui qui l'insultait encore il y a peu dans le Journal des DĂ©bats, a prĂ©parĂ© le texte qui devait encadrer le nouveau rĂ©gime un rĂ©gime reprĂ©sentatif, avec une large base Ă©lectorale, des ministres responsables devant les chambres... Cet Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire Ă©tablit vĂ©ritablement un rĂ©gime libĂ©ral et dĂšs la fin mai la Chambre des ReprĂ©sentants est rĂ©unie ! Il est acceptĂ© massivement par plĂ©biscite par OUI contre NON. L'objectif de NapolĂ©on est simple, Ă©viter une opposition intĂ©rieure la VendĂ©e se soulĂšve dĂ©jĂ  en brusquant les Royalistes et les RĂ©publicains alors qu'il faut concentrer tous les efforts sur la menace extĂ©rieure. On trouve Ă  la Chambre des ReprĂ©sentants d'anciens Conventionnels comme BarĂšre et d'autres grandes figures de la RĂ©volution comme la Fayette. À leur tĂȘte Lanjuinais, un opposant Ă  NapolĂ©on qui avait Ă©tĂ© dans les premiers Ă  proposer sa dĂ©chĂ©ance en 1814... La question reste posĂ©e quant Ă  savoir si NapolĂ©on a vĂ©ritablement acceptĂ© cette perte de pouvoir. Il s'agit plus probablement pour lui d'une concession temporaire sur laquelle il espĂšre pouvoir revenir une fois la menace extĂ©rieure Ă©cartĂ©e et que plus personne ne pourra contester l'Empereur victorieux Ă  la tĂȘte de son armĂ©e. En ce sens, NapolĂ©on a besoin d'une victoire militaire rapide non seulement pour Ă©liminer la menace Ă©trangĂšre, mais aussi pour neutraliser ses ennemis politiques Ă  l'intĂ©rieur. Dans un mĂȘme temps, NapolĂ©on doit donc reconstituer une armĂ©e digne de ce nom et renouer avec elle et le peuple. Davout prend en charge le MinistĂšre de la Guerre, les militaires mis en congĂ© sous la Restauration sont rappelĂ©s, on lĂšve les conscrits de 1815, on fait appel aux Gardes Nationales, la Garde ImpĂ©riale est reconstituĂ©e, la cavalerie est remontĂ©e au dĂ©triment des Gendarmes qui se retrouvent Ă  pied... huit corps d'armĂ©e sont constituĂ©s et dĂ©ployĂ©s majoritairement face aux frontiĂšres du Nord et de l'Est. Face aux coalisĂ©s, NapolĂ©on espĂšre rĂ©unir hommes d'ici la fin de l'annĂ©e. L'empereur reconstitue Ă©galement la tĂȘte de l'armĂ©e, tri les MarĂ©chaux qui ne lui sont pas tous restĂ©s fidĂšles. Au final seuls Suchet, Ney, Davout, Soult seront de la partie, rejoins par un nouveau promu Grouchy. Une guerre inĂ©vitable Cette dĂ©monstration de force s'accompagne de tractation diplomatique, NapolĂ©on espĂšre un temps dĂ©tacher de la coalition son beau-pĂšre l'Empereur d'Autriche. Vaine espĂ©rance, Metternich dĂ©clare que son pays ne traitera jamais avec Bonaparte ». Nouveau coup du sort, NapolĂ©on perd un alliĂ© de poids en Italie Murat qui cherche Ă  se racheter de son comportement en 1814 se lance seul Ă  la conquĂȘte de la pĂ©ninsule et est battu par les armĂ©es autrichiennes de Neipperg le nouvel amant de Marie-Louise.... L'action irrĂ©flĂ©chie de Murat a une deuxiĂšme consĂ©quence grave elle fait voler en Ă©clat le discours pacifiste que tente de faire entendre NapolĂ©on aux puissances coalisĂ©es. DĂšs lors, l'affrontement armĂ© semble inĂ©vitable. On rejoue 1804, le 1er juin au Champ de Mai NapolĂ©on participe Ă  une grande cĂ©rĂ©monie solennelle on distribue les Aigles, on prĂȘte serment, l'Empereur est lĂ , mais ce n'est pas le petit caporal au bicorne, c'est le monarque dans son costume de satin blanc... L'Ă©lan attendu n'est pas lĂ , la cĂ©rĂ©monie semble la parodie d'un temps rĂ©volu. NapolĂ©on a donc besoin d'une grande victoire, pour Ă©vincer une menace extĂ©rieure qui ne veut pas parlementer, et pour revenir en force Ă  Paris et s'imposer Ă  ses opposants politiques. Plusieurs scĂ©narii de campagne sont envisagĂ©s une attaque en avril, mais tout n'est pas prĂȘt, une guerre dĂ©fensive autour de Paris et Lyon, ou une offensive en juin. C'est cette derniĂšre option qui est adoptĂ©e. Les Anglo-hollandais sont autour de Bruxelles, les Prussiens autour de Namur, Russes et Autrichiens sont encore trop Ă©loignĂ©s pour intervenir dans l'immĂ©diat. Attaquer en juin doit permettre de surprendre Wellington et les prussiens de BlĂŒcher avant qu'ils passent eux-mĂȘmes Ă  l'offensive. Une victoire dĂ©cisive contre ces deux armĂ©es ne dĂ©barrasserait pas NapolĂ©on des coalisĂ©s il reste les Autrichiens et les Russes, mais il espĂšre qu'elle fera un Ă©lectrochoc Ă  ces derniers pour les ramener rapidement sur la table des nĂ©gociations. En cas d'Ă©chec il est toujours possible d'adopter la stratĂ©gie dĂ©fensive sur Paris et Lyon. Pour pallier Ă  cette Ă©ventualitĂ©, des troupes fraiches hommes sont laissĂ©es en Alsace pour faire face ensuite aux Autrichiens. Cette grande prudence de NapolĂ©on fut parfois considĂ©rĂ©e comme une erreur, car toutes les forces vives de l'Empire ne furent pas utilisĂ©es dans la campagne de Belgique oĂč doit se passer l'action principale commandĂ©e par l'Empereur lui-mĂȘme. Le 14 juin la concentration des forces pour marcher sur la Belgique est terminĂ©e, NapolĂ©on a regroupĂ© hommes et 370 canons pour faire face aux hommes et 186 canons de Wellington et aux hommes et 312 canons des Prussiens qu'il compte battre sĂ©parĂ©ment pour pallier Ă  sa grande infĂ©rioritĂ© numĂ©rique. Le 15 juin 1815 l'armĂ©e française bouscule les dĂ©tachements ennemis aux environs de Charleroi et passe la Sambre en trois colonnes. L'idĂ©e de NapolĂ©on est alors de battre d'abord les Prussiens qui risqueraient de tomber sur son flanc s'il marchait sus aux Britanniques qui rĂ©agissant rapidement dĂ©cident de porter secours aux Prussiens. NapolĂ©on envoie le marĂ©chal Ney Ă  Quatre-Bras pour contenir les Britanniques tandis que Grouchy repousse l'avant-garde prussienne Ă  Fleurus. Les batailles de Ligny et de Quatre-Bras Dans la nuit du 15 au 16 juin, le duc de Wellington comprend que l'attaque française porte principalement sur l'armĂ©e prussienne. Il met alors en place une stratĂ©gie pour surprendre l'armĂ©e française les Prussiens devront jouer le rĂŽle de l'enclume et contenir les armĂ©es impĂ©riales dans la rĂ©gion de Ligny. Pendant ce temps l'armĂ©e britannique devra jouer le rĂŽle du marteau et tomber sur les flancs des Français en passant par le carrefour de Quatre-Bras. NapolĂ©on marche avec Grouchy contre les Prussiens qu'ils rencontrent Ă  Ligny. Le temps est chaud et lourd, NapolĂ©on lance un attaque sur le centre prussien et compte sur une action de Ney qui aprĂšs avoir pris les Quatre Bras tomberait sur le flanc prussien. Mais les Britanniques rĂ©sistent et Ney ne prend pas les Quatre Bras ses canonnades et charges de cavalerie tardives 14h non soutenues par l'infanterie restent inefficaces. Reste le corps d'Erlon qui aurait pu jouer un rĂŽle majeur dans cette journĂ©e, mais pris entre les ordres et contrordre de NapolĂ©on et de Ney, le corps d'Erlon fait des va-et-vient entre les deux champs de bataille et ne participe finalement Ă  aucun !... En fin de journĂ©e, les Prussiens sont battus, mais non dĂ©truits, BlĂŒcher culbutĂ© par la Garde impĂ©riale et les cuirassiers de Milhaud BlĂŒcher tombe Ă  terre, les cavaliers français passent Ă  cĂŽtĂ© de lui sans s'en apercevoir, il reste Ă©tendu 10 minutes derriĂšre les lignes françaises avant de parvenir Ă  rejoindre son armĂ©e sur le cheval d'un dragon ! L'armĂ©e prussienne qui a perdu entre selon Houssaye et tuĂ©s et blessĂ©s Ă  cĂŽtĂ© français se repli alors sur Wawre tandis que Wellington se replie sur la position dĂ©fensive du Mont-Saint-Jean, le dernier terrain dĂ©gagĂ© permettant de livrer bataille en avant de Bruxelles avant la forĂȘt de Soignes. Plus tard, NapolĂ©on dira que ce choix de Wellington n'Ă©tait guĂšre judicieux, car en cas de dĂ©faite il n'aurait pu opĂ©rer une retraite organisĂ©e Ă  travers ce massif forestier. Le 17, NapolĂ©on reprend sa marche, cette fois en direction du Mont-Saint-Jean, confiant le soin Ă  Grouchy et ses hommes de pourchasser les Prussiens. NapolĂ©on prĂ©voit plusieurs scĂ©narii possibles, mais les consignes restent floues quant au comportement Ă  adopter. De plus, Grouchy n'a que peu de moyens pour savoir l'option que choisira effectivement BlĂŒcher celle de rejoindre Wellington au lieu de se replier vers ses lignes de communication vers l'Est... L'arriĂšre-garde anglaise est littĂ©ralement talonnĂ©e par les Français, canonnĂ©e par l'artillerie, sabrĂ©e par la cavalerie. La mĂ©tĂ©o mĂȘme se dĂ©grade, de violents orages Ă©clatent sur la rĂ©gion, dĂ©trempant les chemins creux et les champs ils seront d'une aide prĂ©cieuse pour les dĂ©fenseurs, retardant l'assaut de NapolĂ©on le 18 juin et rĂ©duisant l'efficacitĂ© de l'artillerie française dont les boulets s'enfonceront dans la boue au lieu de ricocher au milieu des rangs ennemis. La bataille de Waterloo Le jour de la bataille, les Anglo-hollando-belges disposent de hommes moins les dĂ©tachĂ©s soit environ hommes et 184 canons. Les Prussiens disposent de hommes. Quant aux Français, ils ne disposent que de hommes et 266 canons. À l'aube du 18 juin 1815, l'armĂ©e britannique est prĂȘte Ă  livrer bataille. Le prudent Wellington a mis en place une formation dĂ©fensive. Il a Ă©tirĂ© ses troupes sur les 3 km du Mont-Saint-Jean, juste derriĂšre la ligne de crĂȘte, de maniĂšre Ă  ce qu'elles restent protĂ©gĂ©es de la puissante artillerie française. Sur la crĂȘte se trouve l'artillerie britannique, prĂȘte Ă  dĂ©chainer le feu de l'enfer sur toute colonne d'infanterie qui tenterait de gravir le plateau. Enfin, pour briser l'Ă©lan de ces colonnes d'assaut, Wellington a positionnĂ© des troupes autour de trois fermes-chĂąteau disposĂ©s sur la pente sur l'aile droite britannique Ă  l'Ouest la ferme d'Hougoumont, au centre la ferme de la Haie-Sainte et sur l'aile gauche Ă  l'Est la ferme de Papelotte. À environ 800m de lĂ , au Sud, les troupes françaises se rĂ©veillent. Comme la plupart de leurs homologues de la coalition les soldats français ont dormi » Ă  la belle Ă©toile et sont trempĂ©s. À 8h, NapolĂ©on dĂ©jeune au Caillou avec son État-major, Reille qui a combattu en Espagne connait la stratĂ©gie de Wellington qui consiste Ă  tout miser sur la puissance de feu grĂące Ă  des lignes d'infanterie trĂšs Ă©tirĂ©es il dĂ©conseille vivement une attaque frontale. Le plan de NapolĂ©on cependant prĂ©voit bien une attaque frontale il s'agit d'attendre que le sol dĂ©trempĂ© par les orages sĂšche un peu pour lancer une attaque sur le centre aprĂšs une puissante prĂ©paration d'artillerie. Rapidement le temps redevient, comme Ă  Ligny, chaud et lourd. À 11h30 seulement la canonnade commence, peu efficace en vĂ©ritĂ© puisque les canons français sont loin de leur objectif et que la majoritĂ© des troupes britanniques est protĂ©gĂ©e par la crĂȘte. L'ordre est alors donnĂ© de s'emparer de la ferme d'Hougoumont, pour dĂ©tourner l'attention de l'armĂ©e britannique avant d'attaquer le centre la division du prince JĂ©rĂŽme, le frĂšre de NapolĂ©on, monte Ă  l'assaut. Le combat est acharnĂ©, la position est dĂ©fendue par un Highlander, le lieutenant-colonel James Macdonnell commandant 200 Coldstream Guard et Allemands de Nassau ! La ferme est entourĂ©e d'un mur d'enceinte de 2m de haut que les dĂ©fenseurs ont percĂ©s de meurtriĂšre c'est une vraie forteresse ! Les Allemands sont chassĂ©s des vergers qui entourent la ferme, le lieutenant Legros du 1er LĂ©ger parvient mĂȘme Ă  enfoncer Ă  la hache la porte Sud et Ă  pĂ©nĂ©trer dans l'enceinte avec une poignĂ©e de camarade hĂ©las pour eux les dĂ©fenseurs parviennent Ă  rebloquer l'issue et massacrent les quelques Français dĂ©jĂ  entrĂ©s... Wellington envoie des renforts pour dĂ©fendre la ferme et l'aile gauche française s'Ă©puise inutilement Ă  tenter de prendre cet objectif secondaire. Français pĂ©rirent dans ces assauts tandis que les dĂ©fenseurs ne perdirent que » un millier d'hommes. Devant le mur d'enceinte de la ferme se format un tas de cadavres que les Britanniques surnommĂšrent le killing ground ». NapolĂ©on entre ensuite dans la seconde phase de la bataille enfoncer le centre ennemi. Les premiĂšres unitĂ©s prussiennes sont dĂ©jĂ  en vue et NapolĂ©on fait envoyer Ă  Grouchy l'ordre de revenir. À 13h30 l'assaut sur le centre commence par un violent duel d'artillerie avant que l'infanterie française ne monte Ă  l'assaut, obligeant les Hollando-belges prĂ©sents sur la pente Ă  se retirer sur le plateau et aux dĂ©fenseurs de la Haie-Sainte Ă  se barricader dans la ferme. Le gĂ©nĂ©ral d'Erlon, qui connait la stratĂ©gie de Wellington basĂ©e sur la puissance de feu Ă©vite de faire monter ses troupes en colonnes compactes et les dispose en longues lignes. Le gĂ©nĂ©ral Durutte parvient mĂȘme au niveau de la ferme de Papelotte, menaçant l'aile gauche de Wellington. L'assaut français est toutefois stoppĂ© sur la crĂȘte par les troupes britanniques vĂ©tĂ©rans de la guerre d'Espagne et hanovriennes qui mitraillent les grognards essoufflĂ©s par l'ascension du plateau. Le gĂ©nĂ©ral Picton tente mĂȘme une contre-attaque, mais s'effondre, emportĂ© par une balle en pleine tĂȘte. Pour sĂ©curiser cette aile gauche, Wellington lance dans la mĂȘlĂ©e sa cavalerie les 1er et 2e Life-Guard accompagnĂ©s des Dragons de Ponsomby qui fondent sur la division Marcognet et la repousse. NĂ©anmoins, la cavalerie britannique ne brille pas par sa discipline, pris dans leur Ă©lan les Scots-Greys poursuivent leur charge malgrĂ© l'ordre de repli, parvenant Ă  sabrer l'artillerie française avant d'ĂȘtre pris en tenaille par les lanciers de Martigues et les Cuirassiers de Travers le gĂ©nĂ©ral Ponsomby est blessĂ© d'un coup de lance il survivra sur le champ de bataille et recevra mĂȘme l'aide d'un soldat français et la cavalerie britannique subie de lourdes pertes. L'assaut français sur le centre ayant Ă©chouĂ©, la bataille entre dans une troisiĂšme phase vers 15h30 l'artillerie française bombarde la Haie-Sainte pour prĂ©parer un assaut. Cherchant Ă  se protĂ©ger quelques bataillons ennemis se retirent, ce que Ney interprĂšte faussement comme un vaste mouvement de retraite. Il dĂ©cide alors de culbuter l'adversaire par de massifs assauts de cavalerie dĂšs 16h les Cuirassiers de Milhaud talonnĂ©s par les Chasseurs Ă  Cheval de la Garde chargent le centre ennemi. Voyant arriver cette masse scintillante de cuirasses, le centre et l'aile droite de Wellington forment une trentaine de carrĂ©s sur quatre rangs offrant des murs de baĂŻonnettes aux centaures de l'Empire. PlacĂ©e devant les carrĂ©s, l'artillerie britannique accueille la cavalerie française par de dĂ©vastateurs tirs de mitraille, puis venaient les salves des fantassins encouragĂ©s Ă  tenir par leurs officiers s'Ă©poumonant au centre des carrĂ©s. Les batteries ennemies sont dĂ©passĂ©es, mais les piĂšces ne sont pas enclouĂ©es... Les carrĂ©s rĂ©sistent malgrĂ© les assauts acharnĂ©s que mena Ney pendant deux heures. Au final, ces charges hĂ©roĂŻques sont un Ă©chec meurtrier, on reprocha parfois ensuite Ă  NapolĂ©on de ne pas avoir lancĂ© l'infanterie en soutien de la cavalerie de Ney. Poursuivant les Français en retraite, ce qu'il reste de la cavalerie britannique commandĂ©e par Uxbridge chasse les Français. L'infanterie française n'est pourtant pas inactive, loin de lĂ  ! Au Sud-Est l'infanterie française doit faire face aux Prussiens de BĂŒlow qui dĂ©bouchent sur les arriĂšres de l'armĂ©e impĂ©riale ! Cette mauvaise nouvelle est gardĂ©e secrĂšte sur la ligne de front, on annonce au contraire l'arrivĂ©e imminente de Grouchy. NapolĂ©on doit envoyer le corps de Lobau pour contenir les Prussiens, Ă  18h les combats font rage dans le village de Plancenoit et NapolĂ©on doit faire intervenir la Jeune Garde soutenue par deux bataillons de la Vieille Garde Plancenoit est repris par les Français ! NapolĂ©on ordonne alors Ă  Ney de s'emparer Ă  tout prix de la Haie-Sainte Quiot et ses hommes attaquent la ferme Sainte et parviennent Ă  s'en emparer quand les dĂ©fenseurs n'ont plus de munitions. La capture de la ferme permet d'approcher l'artillerie française et d'effectuer des tirs meurtriers sur le centre britannique. Dans un mĂȘme temps, Durutte malmĂšne l'aile gauche britannique. Wellington est en trĂšs mauvaise posture, sa ligne de dĂ©fense menace de cĂ©der, sa cavalerie est dĂ©cimĂ©e, les munitions commencent Ă  manquer et les Hussards de Cumberland ont mĂȘme quittĂ© le champ de bataille ! Dans cette situation critique le gĂ©nĂ©ral britannique aurait alors dĂ©clarĂ© Il me faut la nuit ou les Prussiens ! ». Si la nuit est encore loin, la menace prussienne est bien rĂ©elle pour NapolĂ©on la situation sur placedevient critique et immobilise de nombreuses troupes, empĂȘchant l'Empereur d'envoyer les renforts que demande sans cesse Ney. NapolĂ©on fait disposer ses troupes en carrĂ© le long de la route de Bruxelles et envoie la Garde dĂ©gager Plancenoit. L'impossible victoire NapolĂ©on avait alors deux options se retirer en utilisant sa Garde pour couvrir la retraite, ou jouer tous ses pions dans un dernier assaut. Vu la nĂ©cessitĂ© absolue d'une victoire, politiquement et stratĂ©giquement, NapolĂ©on ne peut en rĂ©alitĂ© que tenter la seconde option. À 19h commence l'assaut final, neuf bataillons de la Garde doivent monter le plateau et en chasser l'ennemi. Dans un mĂȘme temps, Wellington se dĂ©pĂȘche de renforcer son centre avec toutes les rĂ©serves disponibles. Ney fait passer ces colonnes d'attaque par le mĂȘme chemin que la cavalerie, trĂšs exposĂ© Ă  l'artillerie, alors que la route de Bruxelles aurait certainement Ă©tĂ© moins dangereuse. Bien entrainĂ©e, la Garde progresse en ordre jusqu'Ă  la crĂȘte. Face Ă  la 5e Brigade les Grognards essuient une salve meurtriĂšre, ils s'arrĂȘtent, ripostent, et font reculer les dĂ©fenseurs. La ligne anglaise est alors Ă  deux doigts d'ĂȘtre percĂ©e, mais la seconde ligne composĂ©e de NĂ©erlandais rĂ©tablit la situation. La Garde est fauchĂ©e sur son flanc par la mitraille de l'artillerie britannique et le feu de salve qui reprend pour la premiĂšre fois de son histoire la Garde ImpĂ©riale recule. Face au British Guard, le reste de la Garde ne parvient pas non plus Ă  remplir sa mission, elle est fauchĂ©e par des salves lĂąchĂ©es Ă  environ 25m. Sur la gauche des assaillants français le colonel John Colborne a dĂ©ployĂ© ses hommes sur une longue ligne au champ de tir bien dĂ©gagĂ© qui dĂ©cime la Garde ImpĂ©riale. La panique envahit les rangs français aux cris de La Garde recule ! », tous convergent vers le pied du plateau et Wellington ordonne Ă  ses troupes de marcher en avant pour profiter de cette dĂ©route. Ney, qui a dĂ©jĂ  eu cinq chevaux tuĂ©s sous lui durant la bataille, harangue les fantassins du 95e Venez voir mourir un MarĂ©chal de France ! ». NapolĂ©on est Ă  une centaine de mĂštres de la Haie-Sainte avec trois bataillons de la Vieille Garde, dĂ©sespĂ©rĂ© il aurait cherchĂ© Ă  mourir sur le champ de bataille ainsi que le rapportent plusieurs mĂ©morialistes comme le cĂ©lĂšbre Jean-Roch Coignet. RĂ©signĂ©, NapolĂ©on ordonne de se replier en direction de la Belle Alliance. Au milieu du 2e bataillon du 2e chasseur, Cambronne tient tĂȘte aux Anglais et jette son fameux mot ! Plancenoit tient encore, mais deux bataillons ne peuvent tenir tĂȘte indĂ©finiment Ă  deux corps d'armĂ©e... NapolĂ©on ordonne la retraite. Seule la Vieille Garde retraite en bon ordre, au pas, formĂ©e en deux 21h les Prussiens sont maitres de Plancenoit, BlĂŒcher et Wellington font leur jonction Ă  Belle Alliance. D'ailleurs BlĂŒcher aurait voulu que ce nom devienne celui de la bataille, mais Wellington imposera le village de Waterloo, lieu oĂč se trouve son quartier gĂ©nĂ©ral. Pour NapolĂ©on, Waterloo est un Ă©chec irrattrapable. On a parfois invoquĂ© son Ă©tat de santĂ© dĂ©gradĂ©, ses hĂ©morroĂŻdes qui l'empĂȘchĂšrent de chevaucher Ă  sa guise pour reconnaitre le terrain et se montrer aux hommes. Mais bien entendu, au regard du dĂ©roulement de la bataille, ces Ă©lĂ©ments ne peuvent suffire Ă  expliquer la dĂ©faite. La retraite tourne Ă  la dĂ©bĂącle, la berline de l'Empereur est capturĂ©e, avec son manteau d'apparat, son trĂ©sor, un de ses chapeaux... CĂŽtĂ© prussien les consignes sont claires pas de prisonniers ! L'armĂ©e française a perdu 7 gĂ©nĂ©raux et tuĂ©s et blessĂ©s. CĂŽtĂ© adverse les pertes sont Ă  peu prĂšs Ă©quivalentes tuĂ©s et blessĂ©s dont Prussiens. Ce qui reste de l'armĂ©e française se dirige vers Charleroi puis marche en direction de Paris en passant par Laon. Que faisait Grouchy ? Grouchy fut souvent le bouc Ă©missaire dĂ©signĂ© pour justifier la dĂ©faite. On lui reprocha son manque d'expĂ©rience, son manque de rĂ©activitĂ©, son manque d'initiative... On lui reprocha d'avoir obĂ©i aux ordres alors que GĂ©rard lui demandait de marcher au canon... Pendant que NapolĂ©on combattait au Mont-Saint-Jean, Grouchy cherchait Ă  rattraper l'armĂ©e de BlĂŒcher. Il affronte les Prussiens Ă  Wavre et pense ainsi remplir pleinement sa mission en les retenant loin des Britanniques. En rĂ©alitĂ©, Grouchy n'avait pas face Ă  lui les quatre corps prussiens, mais seulement un, celui de Thielmann laissĂ© en arriĂšre, retranchĂ© derriĂšre la Dyle gonflĂ©e par les violents orages. Il ne s'en aperçoit que tard en cette journĂ©e dĂ©cisive, vers 18h... Solidement barricadĂ© dans la ville de Wavre, Thielmann rĂ©ussit parfaitement sa mission tenir Grouchy Ă©loignĂ© du champ de bataille de Waterloo. Grouchy a bien reçu un nouvel ordre dans la journĂ©e du 18, toutefois, l'ordre qui lui est transmis est peu clair il ordonne Ă  la fois de continuer le combat Ă  Wavre et de poursuivre les Prussiens vers Waterloo..., Ă©crit au crayon, en partie illisible, personne n'arrive Ă  lire si Ă  Waterloo la bataille est engagĂ©e » ou gagnĂ©e »... L'ordre envoyĂ© Ă  1h aurait mis 3h Ă  arriver Ă  Grouchy, certains pensent que le MarĂ©chal n'aurait de toute façon pas eu le temps avant la fin de la bataille de parcourir la quinzaine de kilomĂštres qui le sĂ©parait de NapolĂ©on. Une fois la dĂ©faite de Waterloo consommĂ©e, Grouchy reçoit l'ordre de se replier vers la France en passant par Namur. Il est tout Ă  l'honneur de ce MarĂ©chal d'avoir rĂ©ussi Ă  ramener son corps intact jusqu'en territoire français. La dĂ©faite militaire entraine la dĂ©faite politique NapolĂ©on espĂšre rĂ©unir des hommes en une dizaine de jours pour organiser la dĂ©fense. Si les corps de Grouchy, de Rapp et l'armĂ©e de la Loire rallient rapidement NapolĂ©on, il espĂšre rĂ©unir Ă  hommes. De quoi retenir un peu les coalisĂ©s le temps d'organiser une grande levĂ©e pour au total avoir hommes sous les drapeaux ! Toutefois, dans son empire constitutionnel, il a besoin du vote des dĂ©putĂ©s pour lever de nouvelles contributions en hommes et en argent. Il ne sait pas qu'ayant appris la dĂ©faite dĂšs le 19 juin, FouchĂ© s'applique dĂ©jĂ  Ă  convaincre les dĂ©putĂ©s que NapolĂ©on doit abandonner le pouvoir... Alors que Grouchy combat encore Ă  Wavre, NapolĂ©on rĂ©organise autant que faire se peut son armĂ©e autour de Philippeville et confie le commandement Ă  Soult avant d'aller prĂ©parer la dĂ©fense de Paris, car c'est seulement en Ă©tant sur place qu'il pourra imposer ses vues aux dĂ©putĂ©s. Outre les opĂ©rations en Belgique les troupes impĂ©riales sont victorieuses contre les rebelles vendĂ©ens et Ă  l'Est le MarĂ©chal Suchet a repoussĂ© les PiĂ©montais et marche sur GenĂšve. Tout ne semble pas perdu. Mais NapolĂ©on, malgrĂ© l'habiletĂ© politique de son frĂšre Lucien, ne parvient pas Ă  garder la confiance des Chambres. Il tente en vain d'obtenir la dictature pour gĂ©rer cette fin de campagne . Dissoudre les Chambres, c'est bien la seule solution selon Lucien, mais NapolĂ©on s'y refuse, la Chambre a elle-mĂȘme dĂ©clarĂ© que toute tentative de la dissoudre serait un crime de haute trahison. Carnot presse l'Empereur de dĂ©clarer la Patrie en danger, de faire appel aux Gardes Nationaux, de recouvrer l'Ă©lan de 1792 et 1793, de se retrancher derriĂšre la Loire pour regrouper les forces avant de contre-attaquer. Caulaincourt Ă  l'inverse explique que si Paris tombe tout est perdu. Il y a encore un fervent Ă©lan patriotique, un farouche esprit de rĂ©sistance dans les dĂ©partements du Nord et de l'Est oĂč des collĂ©giens de seize ans forment des compagnies d'artillerie, oĂč se sont formĂ©es des unitĂ©s de francs-tireurs comme les corps francs du colonel Viriot qui arborent le drapeau noir Ă  tĂȘte de mort portant l'inscription La Terreur nous devance. La mort nous suit ». MĂȘme dans les rĂ©gions traditionnellement plus rĂ©fractaires comme le Puy-de-DĂŽme on remarque des Ă©lans de soutien patriotique les acquĂ©reurs de biens nationaux fournissent des chevaux harnachĂ©s. La France semble pouvoir se lever d'un bloc, devenir un guĂȘpier pour l'armĂ©e coalisĂ©e comme l'avait Ă©tĂ© l'Espagne pour la Grande ArmĂ©e. Toutefois, le soulĂšvement gĂ©nĂ©ral est une arme Ă  double tranchant, les associations fĂ©dĂ©rales qui se forment, dans l'esprit de l'An II, regroupent des Bonapartistes mais aussi des Patriotes de 1789 » et des Terroristes de 1793 » tous unis pour faire barrage au retour des Bourbons mais pas tous forcĂ©ment fidĂšles Ă  la monarchie impĂ©riale. Les cris de Vive la RĂ©publique ! » croisent ceux de Vive l'Empereur ! », on va par endroits jusqu'Ă  s'en prendre aux ci-devant, on veut mĂȘme parfois replanter des arbres de la libertĂ©... C'est le retour de vieux rĂ©flexes rĂ©volutionnaires paradoxalement peu compatibles avec l'Empire. D'ailleurs, ce remue-mĂ©nage cache la situation rĂ©elle du pays, l'extrĂȘme attentisme de la majoritĂ© des Français lassĂ©s des guerres de la RĂ©volution et de l'Empire, la volontĂ© d'un retour rapide Ă  la paix. De nombreuses rĂ©gions rechignent Ă  mobiliser des gardes mobiles l'AriĂšge, la Haute-Loire, l'Oise... La vĂ©ritĂ© est que la France de 1815 n'est pas celle de 1792, Ă©chaudĂ©s par 1814 les paysans fuient devant l'avance coalisĂ©e, les villes n'opposent pas de farouche rĂ©sistance. Pire, une partie de la population est ouvertement royaliste, et pas qu'en VendĂ©e. En secret, des royalistes prĂ©parent dĂ©jĂ  le tyrannicide, en province des nobles vont jusqu'Ă  soudoyer les soldats mobilisĂ©s, certains commerçants espĂšrent un retour du Roi pour rĂ©tablir un commerce fructueux avec l'Angleterre. Face Ă  ce manque de soutien populaire NapolĂ©on n'a pas les moyens d'imposer les levĂ©es par la force l'Ă©puration politique des Cent-Jours a portĂ© dans les dĂ©partements des PrĂ©fets inexpĂ©rimentĂ©s ou du moins qui n'ont pas encore eu le temps de connaitre leur dĂ©partement, dans les communes beaucoup de maires royalistes sont restĂ©s en place. NapolĂ©on est dans l'impasse politique, FouchĂ© prĂ©pare dĂ©jĂ  l'aprĂšs-Empire. Plus hostile que jamais, la Chambre des reprĂ©sentants finit par s'octroyer illĂ©galement les pouvoirs rĂ©galiens poussant l'Empereur Ă  l'abdication ou au coup d'État. Face au danger de la guerre civile, et malgrĂ© le soutien d'une partie de la population parisienne venue manifester son soutien aux abords de l'ÉlysĂ©e, NapolĂ©on ne voulant pas ĂȘtre le roi d'une jacquerie » se rĂ©signe Ă  abdiquer le 22 juin 1815, il se retire Ă  La Malmaison aprĂšs avoir dictĂ© une dĂ©claration au peuple français. Un gouvernement provisoire prend alors les rennes de la France avec Ă  sa tĂȘte Carnot, Grenier, Caulaincourt, Quinette et pour les prĂ©sider FouchĂ© ! NapolĂ©on II est bien proclamĂ©, mais FouchĂ© nĂ©gocie avec les Anglais la capitulation de Paris et le retour des Bourbons. Les derniers combats La marche des coalisĂ©s sur Paris est parsemĂ©e de combats, parfois favorables aux Français, mais souvent tombĂ©s dans l'oubli, car peu important stratĂ©giquement et restant dans l'ombre de l'hĂ©catombe de Waterloo. Le 20 juin, Grouchy bat les Prussiens qui le talonnaient d'un peu trop prĂšs. Le 26 les coalisĂ©s s'emparent de la forteresse de Quesnoy dĂ©fendue par les Gardes Nationaux. Le 27 Ă  CompiĂšgne, d'Erlon bat les Prussiens de Ziethen tandis qu'Ă  l'inverse BĂŒlow s'impose Ă  Senlis et Ă  Creil. Le 28 les coalisĂ©s s'imposent sur tous les fronts et ne sont plus qu'Ă  une cinquantaine de kilomĂštres de la capitale française que BlĂŒcher dĂ©cide d'attaquer par le Nord le 30 juin. BlĂŒcher est repoussĂ© par les dĂ©fenseurs de Paris, il se redĂ©ploie Ă  l'Ouest et au Sud de la capitale. Dans Paris, Davout ne manque pas de vivres et de munitions, il sait qu'il peut tenir tĂȘte Ă  BlĂŒcher mais est aussi tout Ă  fait conscient qu'Ă  moyen terme la Restauration de Louis XVIII s'impose. Pour calmer les ardeurs des Prussiens il envoie toutefois contre eux le 2e corps de cavalerie d'Exelmans. Seize escadrons de Dragons, six escadrons de Hussards, huit escadrons de Chasseurs Ă  Cheval et quatre bataillons du 44e rĂ©giment d'infanterie de Ligne font une sortie. BĂ©nĂ©ficiant d'une forte supĂ©rioritĂ© numĂ©rique sept contre un, environ contre 750, Exelmans fond par surprise sur la brigade du colonel Sohr vers VĂ©lizy et l'oblige Ă  se replier sur Rocquencourt oĂč il l'Ă©crase. Le colonel Sohr est tuĂ© durant la bataille, 300 de ses hommes sont fait prisonniers. La dĂ©faite de l'avant-garde prussienne Ă  Rocquencourt est considĂ©rĂ©e comme la derniĂšre bataille de la campagne dite de Belgique, un dernier baroud d'honneur qui n'empĂȘche pas la signature d'un armistice trois jours plus tard. Les combats en France ne s'arrĂȘtent pas pour autant, il faut attendre le 15 novembre 1815 pour que le gĂ©nĂ©ral Daumesnil accepte de rendre le chĂąteau de Vincennes. NapolĂ©on quant Ă  lui, aprĂšs avoir en vain proposĂ© de prendre comme simple gĂ©nĂ©ral la tĂȘte de l'armĂ©e de la Commision de gouvernement, se rend Ă  Rochefort. Il espĂšre un temps pouvoir s'exiler en AmĂ©rique, mais le 3 juillet il apprend que les sauf-conduits lui sont refusĂ©s et que la flotte britannique bloque la cĂŽte. Conscient que FouchĂ© risque de la livrer aux royalistes, NapolĂ©on se remet entre les mains des Anglais qu'il espĂšre plus clĂ©ments. Le 8 juillet Louis XVIII fait son entrĂ©e Ă  Paris, NapolĂ©on attend alors sur l'Ăźle d'Aix. Le 14 juillet il monte Ă  bord du BellĂ©rophon qui fait voile vers Plymouth puis vers la derniĂšre demeure de l'Empereur dĂ©chu l'Ăźle de Sainte-HĂ©lĂšne. Waterloo entre dans la lĂ©gende Waterloo devint trĂšs rapidement un symbole, commĂ©morĂ© par les acteurs mĂȘmes de la bataille. Ainsi, Wellington organisa toute sa vie un banquet le 18 juin pour porter un toast Ă  la victoire. Le dernier eut lieu en 1857. De nombreux bĂątiments publics comme des casernes ou la fameuse gare londonienne portĂšrent Ă©galement le nom de Waterloo. CĂŽtĂ© français l'ultime bataille fait couler autant d'encre qu'elle fit couler de sang. Ce sont d'abord les acteurs de la bataille comme Marbot qui couchent sur le papier leurs mĂ©moires de campagne. Mais c'est aussi NapolĂ©on lui-mĂȘme qui livre son rĂ©cit de son projet politique avortĂ© dans les plaines belges Ă  travers le MĂ©morial de Sainte-HĂ©lĂšne publiĂ© en 1823. L'ouvrage devient le livre de chevet d'une gĂ©nĂ©ration de jeunes romantiques dĂ©sabusĂ©s par la platitude d'une Ă©poque qui parait bien fade comparĂ©e Ă  la grande Ă©popĂ©e impĂ©riale digne des plus grandes tragĂ©dies antiques. Ceux qui n'ont pas eu l'occasion de participer Ă  la geste napolĂ©onienne la chantent en vers en prose, incitĂ©s bientĂŽt par une Monarchie de Juillet qui cherche Ă  capter Ă  son profit la commĂ©moration de la gloire impĂ©riale et organise le retour des Cendres de l'Empereur en 1840. Romantiques et rĂ©alistes ne cessent les rĂ©fĂ©rences Ă  la bataille de Waterloo, sorte de Thermopyles Ă  la française pleine de fureur, de panache et de frustration. En 1839, on retrouve dans La Chartreuse de Parme de Stendhal le jeune Fabrice del Dongo, guidĂ© par une vivandiĂšre, assiste Ă  la bataille de Waterloo et voit passer l'escorte de l'Empereur. François-RenĂ© de Chateaubriand rendant son Ăąme Ă  Dieu en 1848, ses MĂ©moires d'outre-tombe commencent Ă  ĂȘtre publiĂ©s dĂšs l'annĂ©e suivante. Bien qu'ardent royaliste, le tourmentĂ© Chateaubriand demeure un fervent admirateur de NapolĂ©on et a racontĂ© la façon dont il vĂ©cu la bataille de Waterloo, lui qui avait accompagnĂ© Louis XVIII dans sa fuite. Victor Hugo, la grande figure littĂ©raire qui succĂšde Ă  Chateaubriand, reprend vivement le flambeau de la mĂ©moire napolĂ©onienne. En 1853, exilĂ© aprĂšs le coup d'État de NapolĂ©on III il Ă©crit certainement dans Les ChĂątiments les plus belles lignes, et en tout cas les plus cĂ©lĂšbres sur la funeste bataille Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! Morne plaine !Comme une onde qui bout dans une urne trop pleine,Dans ton cirque de bois, de coteaux, de vallons,La pĂąle mort mĂȘlait les sombres cĂŽtĂ© c'est l'Europe, de l'autre la sanglant ! des hĂ©ros Dieu trompait l'espĂ©rance ;Tu dĂ©sertais, victoire, et le sort Ă©tait Waterloo ! je pleure et je m'arrĂȘte, hĂ©las ! Waterloo plane sur l'Ɠuvre comme un fantĂŽme du passĂ©, notamment sur le sombre couple des ThĂ©nardier, tenant la fameuse auberge Au sergent de Waterloo » ! Hugo, qui avait fait la dĂ©marche d'aller visiter les lieux, parlera encore de la bataille oĂč l'on vit choir l'aigle indomptĂ© » dans La LĂ©gende des siĂšcles oĂč il inclut le poĂšme Le Retour de l'Empereur ». Ces notes et impressions lors de sa visite du champ de bataille en 1861 sont mĂȘme reportĂ©es dans ses Choses vues. En 1865, en plein Second Empire, Erckmann et Chatrian publient leur roman historique Ă  succĂšs Waterloo, qui fait suite Ă  l'Histoire d'un conscrit de 1813. Suivant les pas des troupiers, ils donnent Ă  ce roman une touche Ă  la fois Ă©pique et authentique selon un style que l'on qualifie parfois de rĂ©alisme rustique maintenant en scĂšne des personnages simples et familiers devenus malgrĂ© eux hĂ©ros de l'Ă©popĂ©e. Balzac envisageĂąt d'Ă©crire une histoire des batailles napolĂ©oniennes, et plus gĂ©nĂ©ralement le mythe tragique de Waterloo bĂ©nĂ©fice de l'apothĂ©ose poĂ©tique dont bĂ©nĂ©ficie NapolĂ©on sous la plume de grands auteurs aux opinions politiques diverses Nerval, Pouchkine, Lamartine... Ou encore le cĂ©lĂšbre chansonnier BĂ©ranger qui influence beaucoup la culture populaire ! La culture populaire se forge aussi Ă  grands coups de gravures et d'images d'Épinal qui se diffusent trĂšs largement partout en France. La vision qui en est donnĂ©e de la bataille de Waterloo est souvent assez binaire avec deux thĂšmes principaux NapolĂ©on vaincu cherchant la mort, mais retenu par ses gĂ©nĂ©raux, et le dernier carrĂ© de la Garde ImpĂ©riale tenant hĂ©roĂŻquement tĂȘte aux Anglais avec souvent en bonne posture le GĂ©nĂ©ral Cambronne rĂ©pondant Ă  la demande de reddition La Garde meurt, mais ne se rend pas ! » puis, devant l'insistance des Britanniques Merde ! ». Dans les faits, le GĂ©nĂ©ral Cambronne refuse toujours de reconnaitre qu'il avait prononcĂ© cette phrase. Il faut dire qu'elle aurait pu paraitre dĂ©calĂ©e puisque Cambronne n'est pas mort Ă  Waterloo et fut capturĂ© griĂšvement blessĂ© toutefois. Et puis il faut dire que le mot de Cambronne n'aurait pas forcĂ©ment plu Ă  celle qu'il Ă©pousa en 1819 Marie Osburn, une prude veuve Ă©cossaise... Finalement, la lĂ©gende du mot de Cambronne serait peut-ĂȘtre une invention de journaliste reprise et popularisĂ©e par Hugo dans Les MisĂ©rables Dire ce mot, et mourir ensuite. Quoi de plus grand ! car c'est mourir que de le vouloir, et ce n'est pas la faute de cet homme, si, mitraillĂ©, il a survĂ©cu. » Bibliographie - Waterloo de Alessandro Barbero. Champs histoire, 2008. - Waterloo 1815, de Thierry Lentz. - La Bataille de Waterloo de Jean-Claude Damamme. Tempus, 2003. - Dictionnaire des batailles de NapolĂ©on 1796-1815 de Alain Pigeard. Tallandier, 2004.
PutConquĂ©rir L'europe GrĂące À Waterloo; Pour Lui, Waterloo Ne Fut Pas Morne Plaine; A Fait Waterloo Et S'est PortĂ© Volontiers À Gallipoli; Une Manche GagnĂ©e AprĂšs Waterloo, Mais Pas Haut La Main; Lettres De Waterloo; Chez Les Anglais À Waterloo; A Pris L'eau A Waterloo; Il Aurait PrononcĂ© Son Fameux Mot À Waterloo; Waterloo Fut Un
Reconstitution de la bataille de Ligny, derniĂšre victoire de NapolĂ©on, le 16 juin 1815. AprĂšs une derniĂšre victoire sur les Prussiens, le 16 juin, Ă  Ligny, au nord de Charleroi, il ordonne au marĂ©chal Grouchy de les poursuivre avec un corps d'armĂ©e de 33 000 hommes... Le surlendemain, le 18 juin 1815, l'Empereur affronte les Anglais du duc de Wellington, solidement retranchĂ©s sur le plateau de Mont-Saint-Jean, non loin du village de Waterloo, Ă  20 km au sud de Bruxelles. NapolĂ©on est confiant et compte sur le soutien des divisions de Grouchy. En raison du sol dĂ©trempĂ©, l'attaque est reportĂ©e jusqu'Ă  la fin de la matinĂ©e. Les Français tiennent bon face aux troupes de WellingtonÀ 11h35 -trop tardivement-, NapolĂ©on donne le signal de la bataille qui va dĂ©cider du sort de l'Empire... L'infanterie de Drouet d'Erlon doit enfoncer le centre anglais. Quatre divisions, prĂšs de 20 000 hommes s'avancent aux cris de "Vive l'Empereur!". Comme le terrain est boueux Ă  cause du violent orage survenu la veille, la cavalerie française ne parvient pas Ă  enfoncer l'infanterie anglaise formĂ©e en carrĂ©. Les cuirassiers du marĂ©chal Ney les chargent jusqu'Ă  quatre fois. Wellington tient toujours. Il sait que BlĂŒcher est en marche pour attaquer les Français sur leur droite, vers Plancenoit. DĂšs 16 heures, 33 000 Prussiens commencent Ă  peser sur les 10 000 hommes aguerris du gĂ©nĂ©ral Mouton. À un contre trois, les Français tiennent. Tout dĂ©pend donc du temps qu'il leur reste pour culbuter Wellington. Ney commande une cinquiĂšme et ultime charge, terrible. Vers 18 heures, la Haie-Sainte est enfin prise, puis c'est le tour de Papelotte. Ney fait un instant vaciller tout le dispositif ennemi. La victoire semble enfin acquise, Wellington est terriblement inquiet, ses hommes manquent de munitions, les carrĂ©s sont de plus en plus maigres. Offre limitĂ©e. 2 mois pour 1€ sans engagement "La Garde recule!" Avec de l'infanterie supplĂ©mentaire, la bataille pourrait ĂȘtre gagnĂ©e, Ney en demande Ă  l'Empereur "De l'infanterie, oĂč veut-il que j'en prenne? Veut-il donc que j'en 'fasse' ?" hurle NapolĂ©on. Quand, soudain, le gros des troupes prussiennes surgit sur les arriĂšres de l'armĂ©e française et sĂšme l'affolement! Le soir tombe, il est 19 heures, NapolĂ©on tente sa derniĂšre chance et commande Ă  sa fidĂšle Garde de monter Ă  l'assaut et de tenter une derniĂšre fois d'enfoncer le centre anglais. Le Français Frank Samson incarne NapolĂ©on dans toutes les reconstitutions de batailles depuis dix ans. Il devrait raccrocher le bicorne aprĂšs les commĂ©morations du bicentenaire de bataillons de la Garde montent Ă  l'assaut du plateau soutenus par toutes les troupes disponibles. L'artillerie anglaise tire Ă  double charge de mitraille la Garde Ă©charpĂ©e par l'acier ennemi continue sa progression. Soudain, l'infanterie anglaise, dissimulĂ©e dans les champs de blĂ©, se lĂšve d'un bond et fusille la Garde Ă  moins de vingt pas. L'assaut est brisĂ©... et un cri terrible retentit "La Garde recule!" L'armĂ©e est alors saisie par la panique. CernĂ©s, les trois derniers bataillons de la Garde sont mitraillĂ©s par l'ennemi Ă  moins de soixante mĂštres. L'ennemi est Ă  portĂ©e de voix, des officiers anglais somment la Garde de se rendre. ExaspĂ©rĂ©, le gĂ©nĂ©ral Cambronne, Ă  cheval au milieu d'un carrĂ©, hurle alors son fameux mot "Merde!" L'on prĂ©tend qu'un sous-officier ajouta "La Garde meurt, mais ne se rend pas!" Ces mots ont-ils Ă©tĂ© prononcĂ©s? On en dĂ©bat encore, mais plusieurs tĂ©moins affirment avoir entendu Cambronne dire aux Anglais "d'aller se faire f...". Quelques instants plus tard, le gĂ©nĂ©ral tombe, blessĂ© Ă  la tĂȘte par une balle, inconscient. "NapolĂ©on n'a pas du tout manoeuvrĂ©"Tard dans la soirĂ©e, NapolĂ©on s'arrĂȘte un instant Ă  Quatre-Bras. À la lueur d'un feu de bivouac, il regarde encore vers Waterloo et pleure en silence. Il pleure d'Ă©puisement, de dĂ©goĂ»t et de tristesse de voir ainsi la plus belle armĂ©e d'Europe mise en dĂ©route en quelques heures. Un aide de camp Ă©crit "Sur son visage morne, aux pĂąleurs de cire, il n'y avait plus rien de la vie que des larmes..." Cette campagne de Belgique est fatale Ă  NapolĂ©on, et nombreux sont les historiens Ă  avoir cherchĂ© les raisons de cette dĂ©route. Grouchy aurait-il dĂ» courir au canon et rejoindre Waterloo? Ney est-il fautif en faisant charger prĂ©maturĂ©ment toute la cavalerie française? L'Empereur lui-mĂȘme, dĂ©jĂ  malade, a-t-il perdu une partie de son gĂ©nie militaire? Il n'est plus l'homme d'Austerlitz et sa stratĂ©gie ne surprend plus ses ennemis. Wellington conclut sur la bataille "NapolĂ©on n'a pas du tout manoeuvrĂ©. Il s'est bornĂ© Ă  avancer Ă  l'ancienne mode, en colonnes, et a Ă©tĂ© repoussĂ© Ă  l'ancienne mode. Les gens me demandent un rĂ©cit de la bataille, je leur dis que ce fut une rude empoignade des deux cĂŽtĂ©s mais que nous cognĂąmes le plus fort. Il n'y eut pas de manoeuvre. Bonaparte rĂ©pĂ©tait ses attaques et j'Ă©tais heureux de laisser la dĂ©cision aux troupes..."   Cet article est paru dans le magazine Point de Vue Histoire n°23, de mars 2015. Dimitri Casali est historien et essayiste, spĂ©cialiste du Premier Empire. Son prochain livre, Qui a gagnĂ© Ă  Waterloo? NapolĂ©on 2015, est paru en mai 2015 chez Flammarion. Cet article est paru dans le magazine Point de Vue Histoire n°23, de mars 2015. Les plus lus OpinionsTribunePar Carlo Ratti*ChroniquePar Antoine BuĂ©no*ChroniqueJean-Laurent Cassely
Cettephrase aurait Ă©tĂ© prononcĂ©e par Cambronne, commandant le dernier carrĂ© de la Vieille Garde Ă  Waterloo, enjoint Ă  se rendre par les Britanniques. Leur insistance lui aurait fait rĂ©pondre « M », son fameux mot. Il sera finalement blessĂ© et fait prisonnier. Cambronne niera toute sa vie n'avoir jamais prononcĂ© ni la phrase ni le mot : « Je n'ai Des MisĂ©rables de Victor Hugo, on ne retient bien souvent que l’odyssĂ©e de Jean Valjean et de Cosette, la vergogne des ThĂ©nardier et l’acharnement de Javert. Or, le chef d’Ɠuvre de Victor Hugo est un ouvrage foisonnant qui offre notamment une description apocalyptique de la bataille de Waterloo – Waterloo, c’était d’ailleurs un concentrĂ© d’apocalypse sur Jacques-Antoine-Adrien Delort tableau exposĂ© au musĂ©e d’art, hĂŽtel Sarret de Grozon Ă  Arbois.© MusĂ©e d’art, hĂŽtel Sarret de Grozon, cl. Aloys de BecdeliĂšvre quelques centaines d’hectares. Au fil du rĂ©cit dantesque, apparaissent les noms gĂ©nĂ©raux jurassiens citĂ©s au dĂ©tour de quelques phrases. Il y a lĂ  les dolois Bachelu et Bernard, le presque dolois Michel, l’arboisien Delort, Guyot de Villevieux. Est-ce bien normal ? Rien que de plus normal. EngagĂ©s dans les trois batailles successives de Ligny, des Quatre-Bras 16 juin et de Waterloo 18 juin, ils sont plus d’une dizaine de gĂ©nĂ©raux du pays Ă  charger les fourbes Anglais, les scrogneugneu Prussiens et leurs nombreux alliĂ©s. Voyons donc cela de plus prĂšs
 GĂ©nĂ©ral Jacques-Antoine-Adrien Delort Le texte de Victor Hugo Étant deux divisions, ils Ă©taient deux colonnes ; la division Wathier avait la droite, la division Delord avait la gauche. On croyait voir de loin s’allonger vers la crĂȘte du plateau deux immenses couleuvres d’acier. Cela traversa la bataille comme un prodige ». Autre extrait Soixante canons et les treize carrĂ©s foudroyĂšrent les cuirassiers Ă  bout portant. L’intrĂ©pide gĂ©nĂ©ral Delord fit le salut militaire Ă  la batterie anglaise ». Le contexte dans la bataille le gĂ©nĂ©ral Delort Victor Hugo Ă©crit Delord, qui commande la 14e division de cavalerie, est engagĂ© dans la cĂ©lĂšbre charge engagĂ©e au milieu de l’aprĂšs-midi par le marĂ©chal Ney pour forcer la dĂ©cision. Une charge qui embarque prĂšs de 10 000 cavaliers. Qui est le gĂ©nĂ©ral Delort ? NĂ© Ă  Arbois, Jacques-Antoine-Adrien Delort a 42 ans Ă  Waterloo. Jeune lettrĂ©, il s’engage avec les volontaires nationaux du Jura en 1791. Il connaĂźt une ascension rĂ©guliĂšre qui passe par toutes les campagnes de la RĂ©volution et de l’Empire. AprĂšs 1815, retirĂ© dans son chĂąteau de Vadans, prĂšs d’Arbois, il rumine la dĂ©faite de Waterloo dans un petit ouvrage que l’on peut lire, par exemple, Ă  la bibliothĂšque d’études de Besançon. GĂ©nĂ©ral Claude-Étienne Guyot Claude-Étienne Guyot par le peintre Antoine-Jean Gros©DR Claude-Étienne Michel©DR Le texte de Victor Hugo Guyot qui a menĂ© Ă  la charge les escadrons de l’empereur tombe sous les pieds des dragons anglais ». Le contexte dans la bataille Guyot a jetĂ© dans la bataille ses 1 300 cavaliers de la division de cavalerie lourde de la Garde impĂ©riale rĂ©giment des grenadiers Ă  cheval et dragons de l’impĂ©ratrice. Il est pris par les Anglais, libĂ©rĂ©, blessĂ©, il charge encore. Qui est le gĂ©nĂ©ral Claude-Étienne Guyot ? Il naĂźt en 1768 dans une famille de paysans de Villevieux, prĂšs de Bletterans. Il s’engage en 1790, ses mĂ©rites lui valent un avancement rapide, il intĂšgre la Garde impĂ©riale. Son intrĂ©piditĂ© est reconnue sur tous les champs de bataille, notamment Ă  Eylau et Wagram. Il dĂ©cĂšde en 1837. Une petite rue porte son nom Ă  Villevieux, Ă  cĂŽtĂ© de l’ancienne fruitiĂšre. GĂ©nĂ©ral Claude-Étienne Michel Le texte de Victor Hugo Chaque bataillon de la garde, pour ce dĂ©nouement, Ă©tait commandĂ© par un gĂ©nĂ©ral. Friant, Michel, Roguet, Harlet, Mallet, Poret de Morvan Ă©taient lĂ . Quand les hauts bonnets des grenadiers de la garde avec la large plaque Ă  l’aigle apparurent, symĂ©triques, alignĂ©s, tranquilles, superbes, dans la brume de cette mĂȘlĂ©e, l’ennemi sentit le respect de la France ; on crut voir vingt victoires entrer sur le champ de bataille, ailes dĂ©ployĂ©es ». Le contexte dans la bataille. Vers la fin de la journĂ©e, NapolĂ©on se dĂ©cide Ă  faire donner » la Garde impĂ©riale. L’épisode se termine par la lĂ©gende du dernier carrĂ©. Le gĂ©nĂ©ral Michel commande une brigade de la division de chasseurs Ă  pied de la Vieille garde. Qui est le gĂ©nĂ©ral Claude-Étienne Michel ? C’est un brave parmi les braves. NĂ© en octobre 1772 Ă  Pointre, prĂšs de Dole, il a 19 ans quand il s’engage dans les rangs des volontaires nationaux. Claude-Étienne Michel rafle le grand chelem des victoires Austerlitz, IĂ©na, Eylau, Friedland, EckmĂŒhl, Essling, Wagram. À Waterloo, il est tuĂ© quelques minutes aprĂšs la montĂ©e en ligne de la Garde. Il a 43 ans. Sa postĂ©ritĂ© est aussi liĂ©e au fameux mot de Cambronne, car selon ce dernier c’est le gĂ©nĂ©ral Michel qui l’aurait prononcĂ©. Le personnage du gĂ©nĂ©ral Michel apparaĂźt dans une piĂšce d’Alexandre Dumas, La barriĂšre de Clichy. GĂ©nĂ©ral Simon Bernard Le texte de Victor Hugo À la nuit tombante, dans un champ prĂšs de Genappe, Bernard et Bertrand saisirent par un pan de sa redingote et arrĂȘtĂšrent un homme hagard, pensif, sinistre, qui entraĂźnĂ© jusque-lĂ  par le courant de la dĂ©route venait de mettre pied Ă  terre, avait passĂ© sous son bras la bride de son cheval, et, l’Ɠil Ă©garĂ© s’en retournait seul vers Waterloo. C’était NapolĂ©on essayant encore d’aller en avant, immense somnambule de ce rĂȘve Ă©croulĂ© ». Le contexte dans la bataille. C’est la fin, tout est perdu. Le gĂ©nĂ©ral Simon Bernard est l’un des aides de camp de l’Empereur. Qui est le gĂ©nĂ©ral Simon Bernard ? NĂ© Ă  Dole en 1779 dans une famille pauvre, Simon Bernard gagne Paris pour entrer Ă  l’École centrale des travaux publics – Polytechnique. Il est remarquĂ© par NapolĂ©on qui en fait son aide de camp lors des Cent jours. PassĂ© Waterloo, le gĂ©nĂ©ral Simon Bernard met son savoir au service des Etats-Unis oĂč il est considĂ©rĂ© comme le Vauban du nouveau monde ». AprĂšs la rĂ©volution de 1830, il revient en France. Aide de camp du roi Louis-Philippe, la politique l’attrape en 1836. Il est nommĂ© ministre de la Guerre de septembre 1836 Ă  mars 1839. Simon Bernard dĂ©cĂšde au mois de septembre de la mĂȘme annĂ©e. EncadrĂ© Jurassiens et Comtois des Cent-Jours Le poids de la nouvelle guerre des Cent-Jours repose pour l’essentiel sur l’ArmĂ©e du Nord qui engage les batailles de Ligny, des Quatre-Bras, de Waterloo et la poursuite introuvable de Grouchy aux trousses des Prussiens. Voici les commandements des gĂ©nĂ©raux comtois mobilisĂ©s dans cette armĂ©e
 État-major de l’armĂ©e du Nord Charles-Étienne Ruty Besançon commandant de l’artillerie. Simon Bernard Dole aide de camp de l’empereur. Marie-Étienne Baudrand Besançon Ă©tat-major gĂ©nĂ©ral du gĂ©nie. Garde impĂ©riale Albert-François Deriot Clairvaux-les-Lacs Ă©tat-major. Claude-Étienne Guyot Villevieux division de cavalerie lourde. Claude-Étienne Michel Pointre adjoint de Charles-Antoine Morand. Charles-Antoine Morand Pontarlier / MontbenoĂźt division de chasseurs Ă  pied de la Vieille garde. Nicolas Philippe Guye Lons-le-Saunier une brigade de la division de la Jeune garde. Infanterie François-Xavier Donzelot Mamirolle 2e division d’infanterie. Gilbert Bachelu Dole 5e division d’infanterie. Jean-Joseph Gauthier Septmoncel une brigade de la 9e division d’infanterie. Jean-François Rome Monay une brigade de la 12e division d’infanterie. Cavalerie Claude-Pierre Pajol Nozeroy premier corps de cavalerie avec Grouchy. Jacques-Antoine-Adrien Delort Arbois 14e division de cavalerie. Pierre-Joseph Farine du Creux Damprichard une brigade de la 14e division de cavalerie. Jean-Baptiste Strolz Belfort 9e division de cavalerie. En tout une quarantaine de gĂ©nĂ©raux comtois participent aux Cent jours dont le polinois Jean-Pierre Travot engagĂ© en VendĂ©e, Claude-Joseph Lecourbe, de Ruffey-sur-Seille, qui dĂ©fend Belfort jusqu’à la mi-juillet. Citons Claude-Pierre Rouget, le frĂšre de Claude-Joseph Rouget-de-Lisle qui, Ă  l’époque, est retirĂ© Ă  Montaigu.

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Lorsque NapolĂ©on comprend que le sort de la bataille de Waterloo est en train de tourner, il dĂ©cide de tenter sa derniĂšre chance. La garde impĂ©riale, composĂ©e d’hommes qui suivent le petit Caporal depuis parfois ses premiĂšres campagnes, est le dernier rempart face aux troupes commandĂ©es par Wellington. La Vieille Garde, le 1er chasseurs de la garde, est commandĂ©e par un fidĂšle compagnon de l’Empereur. Le gĂ©nĂ©ral Cambronne n’a jamais abandonnĂ© NapolĂ©on. Il l’a suivi jusque dans son exil Ă  l’üle d’Elbe. Le courage de la garde impĂ©riale, les mots de Cambronne qui vont suivre font dĂ©sormais partie de la lĂ©gende. Le dernier carrĂ© de la grande armĂ©e meurt sous la mitraille. Le gĂ©nĂ©ral anglais Colville dans un acte de mansuĂ©tude somme les derniers soldats français de se rendre. Le gĂ©nĂ©ral Cambronne juge cette proposition dĂ©shonorante et rĂ©pond La garde meurt mais ne se rend pas ». L’Anglais insiste. Le Français dans un dernier acte hĂ©roĂŻque lui rĂ©pond Merde ! » Pierre Cambronne a-t-il prononcĂ© son fameux mot ? Il ne le confirma jamais. Mais Victor Hugo lui attribua la paternitĂ© de cette rĂ©partie dans Les MisĂ©rables. La lĂ©gende Ă©tait nĂ©e. Elle est devenue l’Histoire. Bertrand GuyardLe Figaro AccĂ©dez Ă  l’article source Pour en savoir plus le mot de Cambronne fait l’objet d’une enquĂȘte parue dans notre ouvrage Petits mensonges historiques Mots cĂ©lĂšbres maisjamais prononcĂ©s ! avec l’ouvrage Petits mensonges historiques Ă©ditĂ© par La France pittoresque Plus un mot historique reflĂšte exactement la physionomie morale de son auteur prĂ©sumĂ©, plus ce mot a des chances d’ĂȘtre faux ». DĂ©couvrez 22 mots historiques » que l’Histoire retient mais qui n’ont jamais Ă©tĂ© prononcĂ©s. 170 pages d’enquĂȘtes au ton espiĂšgle et enlevĂ©. PutConquĂ©rir L'europe GrĂące À Waterloo; Pour Lui, Waterloo Ne Fut Pas Morne Plaine; A Fait Waterloo Et S'est PortĂ© Volontiers À Gallipoli; Une Manche GagnĂ©e AprĂšs Waterloo, Mais Pas Haut La Main; Chez Les Anglais À Waterloo; A Pris L'eau A Waterloo; Il Aurait PrononcĂ© Son Fameux Mot À Waterloo; Waterloo Fut Un Succes Pour Lui
ï»żPubliĂ© le 18/06/2015 Ă  1015, Mis Ă  jour le 18/06/2015 Ă  1142 NoĂ«l Roquevert incarne le gĂ©nĂ©ral Cambronne dans le NapolĂ©on» de Sacha Guitry. Ce fidĂšle des fidĂšles de l'Empereur commandait le dernier carrĂ© qui rĂ©sista au dĂ©ferlement de la coalition anglo-prussienne. Son courage et ses mots participent pleinement de la lĂ©gende napolĂ©onnienne. Mais sont-ils historiques ? Lorsque NapolĂ©on comprend que le sort de la bataille de Waterloo est en train de tourner, il dĂ©cide de tenter sa derniĂšre chance. La garde impĂ©riale, composĂ©e d'hommes qui suivent le petit Caporal depuis parfois ses premiĂšres campagnes, est le dernier rempart face aux troupes commandĂ©es par Vieille Garde, le 1er chasseurs de la garde, est commandĂ©e par un fidĂšle compagnon de l'Empereur. Le gĂ©nĂ©ral Cambronne n'a jamais abandonnĂ© NapolĂ©on. Il l'a suivi jusque dans son exil Ă  l'Ăźle d' courage de la garde impĂ©riale, les mots de Cambronne qui vont suivre font dĂ©sormais partie de la lĂ©gende. Le dernier carrĂ© de la grande armĂ©e meurt sous la mitraille. Le gĂ©nĂ©ral anglais Colville dans un acte de mansuĂ©tude somme les derniers soldats français de se gĂ©nĂ©ral Cambronne juge cette proposition dĂ©shonorante et rĂ©pond La garde meurt mais ne se rend pas». L'Anglais insiste. Le Français dans un dernier acte hĂ©roĂŻque lui rĂ©pond Merde!»Pierre Cambronne a-t-il prononcĂ© son fameux mot? Il ne le confirma jamais. Mais Victor Hugo lui attribua la paternitĂ© de cette rĂ©partie dans Les MisĂ©rables. La lĂ©gende Ă©tait nĂ©e. Elle est devenue l'Histoire.
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Le genre d’intĂ©rĂȘt qui s’attache Ă  de pareils tableaux manquera Ă  nos souvenirs, recueillis dans un temps oĂč le pays jouissait encore des bienfaits de la paix intĂ©rieure. vr Nous n’avons pas Ă©tĂ© toutefois sans dĂ©mĂȘler dans l’état des esprits les avant-coureurs d’une rupture que nous Ă©tions, il faut l’avouer, loin de croire aussi prochaine. Nous n’avons rapportĂ© que ce que nous avons vu et entendu 5 et si ce respect pour la vĂ©ritĂ© a nui Ă  l’intĂ©rĂȘt de notre narration, en Ă©cartant des pages de ce livre les dĂ©tails que l’imagination de tant de voyageurs ajoute si complaisamment au tĂ©moignage de leurs yeux , nous aurons au moins le mĂ©rite d’ĂȘtre sincĂšre. Quant Ă  la mĂ©thode choisie pour cet ouvrage , elle est simple et facile suivre dans le rĂ©cit le cours mĂȘme du voyage, en retracer les incidents, rappeler nos observations, Ă  mesure que l’occasion les a fait naĂźtre , telle est la marche que nous avons constamment adoptĂ©e. Plusieurs de nos amis nous ont reprochĂ© la sĂ©vĂ©ritĂ© de notre jugement sur certains peuples, et la partialitĂ© avec laquelle nous avons parlĂ© des Allemands. Nous aimons les Allemands. Leur caractĂšre et leurs habitudes nous plaisent, et nous voudrions VII voir une alliance plus Ă©troite entre les deux nations. Nous croyons fermement cpie leurs intĂ©rĂȘts les convient Ă  ce rapprochement. Les Français, et les Allemands, en effet, peuples Ă©minemment agriculteurs , ne sont pas poussĂ©s incessamment par cet esprit de convoitise, d’aviditĂ© et d’usurpation qui existe Ă  un si haut degrĂ© chez les nations essentiellement commerçantes , telles jue l’Angleterre et les Etats-Unis. Il leur est donc facile de s’entendre. Au point de vue politique, les royaumes de l’autre cĂŽtĂ© du Rhin nous ont paru fatiguĂ©s de l’espĂšce de protectorat que la Russie, depuis trente ans, s’est arrogĂ©e sur eux. A mesure que l’Allemagne s’éloigne de l’époque des guerres envahissantes de l’Empire , elle semble voir en nous les dĂ©fenseurs des grands principes de libertĂ©, tandis que le Czar lui apparaĂźt comme une menace pour la civilisation, et pour son indĂ©pendance personnelle. Telles ont Ă©tĂ© nos prĂ©occupations lorsque nous avons eu Ă  nous former une opinion sur le caractĂšre national des Allemands. VIII Nous nous sommes Ă©tonnĂ©s du petit nombre de Français que nous avons rencontrĂ©s dans les provinces RhĂ©nanes et en Suisse. Presque tous les voyageurs Ă©taient Anglais. Cela peut s’interprĂ©ter de deux maniĂšres ou par l’indiffĂ©rence des Français pour le plaisir de voyager ; ou par le bien-ĂȘtre qu’ils Ă©prouvent dans leur patrie, et qui leur fait nĂ©gliger de le chercher ailleurs. Nous adoptons cette derniĂšre supposition. PREMIÈRE PARTIE. VOYAGE DE PARIS A COLOGNE. CHAPITRE I. DĂ©part de Paris pour Bruxelles. — ArrivĂ©e Ă  Bruxelles. Vous m’avez fait promettre, Madame, quand nous sommes partis, de tenir un journal de notre voyage. Puisque je ne puis vous accompa- gner, m’avez-vous dit, vous me devez une description si exacte des lieux que vous par- courrez, que je puisse me figurer les avoir vus avec vous. Vous me laissez votre itinĂ©raire; et il me sera facile ainsi, en calculant les jours et les distances , de vous suivre sur la route. » Je me souviens parfaitement de cette promesse et je la remplirai. Je dirai fĂȘtais lĂ ; telle chose ni avilit vous y croirez ĂȘtre vous-mĂȘme. Seulement j’ai reconnu l’impossibilitĂ© d’ĂȘtre fidĂšle Ă  l’itinĂ©raire que je vous ai laissĂ©. Ainsi, par exemple Nous sommes Ă  Bruxelles depuis deux jours. Je vois d’ici votre Ă©tonnement; j’entends vos exclamations Ă  Bruxelles ! mais quelle folie ! Ce n’est pas le chemin de la Suisse. En quittant Paris vous deviez vous diriger en droite ligne sur Strasbourg. Je vous dois l’explication de ce changement de direction. Vous savez qu’avant de partir nous apprĂ©hendions surtout, pendant le voyage que nous allions entreprendre, l’extrĂȘme chaleur et la poussiĂšre. ArrivĂ©s Ă  Paris, le 3 juillet 1844, nous fĂ»mes loin d’ĂȘtre rassurĂ©s sur les inconvĂ©nients que nous avions redoutĂ©s. Nous partions pour faire un voyage d’agrĂ©ment, et le thermomĂštre 5 Ă©tait Ă  26 degrĂ©s au-dessus de zĂ©ro, et nous avions 120 lieues Ă  faire par la poste. Je ne voyais certes pas lĂ  une difficultĂ© insurmontable; mais c’était nous exposer, dĂšs le dĂ©but du voyage, Ă  des fatigues qu’il Ă©tait prudent d’éviter. Nous restĂąmes plusieurs jours Ă  Paris, indĂ©cis sur ce que nous devions faire. Enfin nous nous avisĂąmes de consulter la carte des chemins de fer. Nous vĂźmes que de Valenciennes Ă  Cologne on avait Ă©tabli une ligne de chemins de fer ; nous sĂ»mes que, dans cette derniĂšre ville , des bateaux Ă  vapeur s’emparaient des voyageurs, et leur faisaient remonter, doucement et sans fatigue, le Rhin jusqu’à Strasbourg. Ce fut un trait de lumiĂšre. DĂšs lors la difficultĂ© sĂ©rieuse de notre voyage se trouvait rĂ©duite Ă  de minimes proportions, puisqu’elle se bornait Ă  aller de Paris Ă  Valenciennes dans une nuit ; et une nuit est bientĂŽt passĂ©e. Je dois vous dire aussi que nous avions pris le parti de voyager en vĂ©ritables touristes , sans notre voiture, qui eĂ»t Ă©tĂ© un embarras de chaque jour dans les montagnes, et avec des bagages rĂ©duits au strict nĂ©cessaire. 6 Nous voilĂ  donc nous dirigeant sur Valenciennes pour aller en Suisse. Je sais qu’il est impossible de montrer plus de dĂ©dain que nous ne l’avons fait dans celte circonstance pour la ligne droite; mais rien ne nous pressait. Nous n’avions pas la prĂ©tention de tracer un nouvel itinĂ©raire de Paris en Suisse ; et la Belgique mĂ©ritait bien qu’on fĂźt un dĂ©tour de deux cents lieues pour lui rendre visite en passant. A Valenciennes nous trouvĂąmes le chemin de fer, qui nous conduisit Ă  Bruxelles en quatre heures et demie. En arrivant dans cette ville, un Belge, que nous avions pris Ă  Valenciennes, nous dit que, parti la veille de Bruxelles pour Paris , il avait sĂ©journĂ© six heures dans cette derniĂšre ville, et Ă©tait de retour dans la capitale de la Belgique, le tout en trente-huit heures. Que deviendront les distances, quand les capitales de l’Europe seront reliĂ©es l’une Ă  l’autre par des chemins de fer? Nous descendĂźmes Ă  Bruxelles, rue des Fripiers, Ă  l’hĂŽtel des Etrangers. Bruxelles! rendez- vous des opulences voyageuses et des infortunes que les jeux de bourse exilent de leur patrie ! 7 foyer de contrefaçons de tout ce que la presse publie d’intĂ©ressant dans les diverses langues europĂ©ennes ! C’est peut-ĂȘtre d’aprĂšs ce systĂšme de contrefaçon que les Belges appliquent Ă  toutes choses, qu’en 1830 ils ont fait leur rĂ©volution, imitĂ©e de la nĂŽtre. CHAPITRE II. Bruxelles, ses Monument*!, ses Promenades. — Entretien sur les Affaires publiques. Je n’avais pas vu Bruxelles depuis dix ans, et je fus Ă©tonnĂ© des nombreuses amĂ©liorations qui s’y Ă©taient opĂ©rĂ©es en aussi peu de temps. C’est aujourd’hui un second Paris, mais vu dans des proportions moins grandes. Ce sont bien lĂ  les rues animĂ©es des beaux quartiers de Paris, ses fontaines, ses places publiques, ses boulevards, ses riches magasins, et cette foule de voitures et de piĂ©tons qui sillonnent la ville dans tous les sens, et ne s’arrĂȘtent que bien avant dans la nuit. Les habitudes de la vie, la maniĂšre d’ĂȘtre, le langage mĂȘme nous rappelaient Ă©galement notre belle capitale. A notre hĂŽtel et Ă  la table d’hĂŽte, nous n’entendions parler que français ; le service Ă©tait fait avec cette propretĂ© et cette vivacitĂ© intelligente qu’on ne trouve guĂšre que dans les bons hĂŽtels de Paris. Disons encore, pour complĂ©ter le tableau, que sous certains rapports Bruxelles nous paraissait l’emporter sur Paris. Il Ă©tait plus aĂ©rĂ©, ses maisons Ă©taient plus ornĂ©es , plus soignĂ©es , ses rues mieux nettoyĂ©es ; l’intĂ©rieur des hĂŽtels nous semblait aussi meublĂ© avec plus de richesse et de bon goĂ»t. Quant aux monuments publics, ils ne peuvent soutenir la comparaison avec ceux de Paris. Je crois cependant que nous avons visitĂ© les plus remarquables , et vous verrez que la liste n’en est pas trĂšs-longue. Je placerai en premiĂšre ligne l’église Sainte- 10 Gudule. Cette Ă©glise est bĂątie sur une Ă©minence dite Molenherg. Elle a Ă©tĂ© fondĂ©e par Lambert Baudouin, comte de Louvain, vers la fin du dixiĂšme siĂšcle. En 12T3, elle fut reconstruite telle qu’elle existe encore, Ă  l’exception d’une tour dĂ©molie en 1518, et remplacĂ©e par les deux tours qu’on voit Ă  prĂ©sent. Elle appartient au style gothique; imposante par son aspect, elle domine fiĂšrement la ville, moins peut-ĂȘtre Ă  cause de la hauteur de l’édifice, que grĂące Ă  l’éminence sur laquelle il est bĂąti. Mais pourquoi avoir choisi la colline de Mo- lenberg, dont les abords sont difficiles et escarpĂ©s, comme emplacement de la cathĂ©drale de la ville? VoilĂ  ce qu’il m’est impossible de deviner, Ă  moins de penser que dans les temps orageux de la fĂ©odalitĂ©, on ne pouvait garantir, mĂȘme les Ă©glises, contre la rapacitĂ© des gens de guerre, qu’en les plaçant dans des lieux Ă©levĂ©s, et par cela mĂȘme susceptibles de dĂ©fense. Nous avons remarquĂ© au milieu du chƓur un trĂšs-beau mausolĂ©e en marbre noir, qui renferme les cendres du duc Jean II de Brabant, mort en 1312, de sa femme dĂ©cĂ©dĂ©e en 1318, et du duc Philippe de Brabant, mort en 1430. La place du MarchĂ©, dont l’HĂŽtel-de-Ville oc- ĂŻ cupe un des cĂŽtĂ©s, est Ă  mon grĂ© la place la plus remarquable de Bruxelles. Elle est bien loin, sans doute, d’avoir l’éclat et la fraĂźcheur des places Royale, du Parc et de la Monnaie; mais I elle a un caractĂšre d’antiquitĂ© et de moyen Ăąge que je n’ai point trouvĂ© ailleurs. DĂšs qu’on y est entrĂ© on peut se croire transportĂ© au quinziĂšme ji siĂšcle. L’HĂŽtel-de-Ville, bĂąti dans le style go- jf thique pur, avec sa façade de vingt-deux croi- sĂ©es, occupe toute la longueur du marchĂ© ; sa » construction, commencĂ©e en 1401 et terminĂ©e en 1442, est remarquable par son Ă©lĂ©gance et sa t lĂ©gĂšretĂ©. L’hĂŽtel est surmontĂ© d’une tour qui a trois cent cinquante-quatre pieds d’élĂ©vation, et f sur le sommet de laquelle on a placĂ© une statue Ă  de l’archange Saint-Michel, haute de 17 pieds. En face de l’HĂŽtel-de-Ville est le bĂątiment dit Broodhuys, oĂč d’Egmont et de Horn passĂšrent ĂŻ les derniĂšres heures de leur vie, avant de mon- ÂŁ ter Ă  l’échafaud, et qui porte Ă©galement le type t du quinziĂšme siĂšcle. ! Les autres cĂŽtĂ©s de la place sont occupĂ©s par des maisons d’un style trĂšs-ancien, et qui Ă©taient Ăź spĂ©cialement affectĂ©es Ă  certaines corporations, 12 telles que celles des brasseurs, des gens de mer, des drapiers, etc. ; chacune de ces maisons porte des ornements sculptĂ©s qui rappellent la corporation Ă  laquelle la maison appartenait ; ainsi, par exemple, la maison qui Ă©tait affectĂ©e Ă  la corporation des gens de mer est encore ornĂ©e aujourd’hui d’ancres, de poupes de navires et d’autres attributs de la navigation. J’engage fort le gouvernement belge Ă  maintenir, le plus longtemps qu’il le pourra, ces curieuses constructions qui rattachent le passĂ© au prĂ©sent. De la place du MarchĂ© nous sommes allĂ©s au Parc, jardin public trĂšs-beau et trĂšs-agrĂ©able, avec un bois, des piĂšces d’eau et des arbres magnifiques. Les Bruxellois montrent avec complaisance ceux de ces arbres qui portent encore la trace des boulets que leur envoya le prince FrĂ©dĂ©ric en 1830. Dans le voisinage de cette belle promenade se trouvent le palais du Roi, celui du prince d’O- range, le palais du ci-devant SĂ©nat de Brabant, oĂč se tiennent les sĂ©ances des chambres, et une foule de riches hĂŽtels, qui donnent Ă  cette partie de la ville un air de grandeur tout Ă  fait remarquable. 15 Nous n’avons pu pĂ©nĂ©trer dans le palais du Roi; mais, Ă  en juger par son extĂ©rieur simple et modeste, il nous a paru plutĂŽt la demeure d’un riche particulier que la rĂ©sidence d’un souverain. En voyant le palais si Ă©lĂ©gant, si riant, que le prince d’Orange avait fait construire dans la plus agrĂ©able position de Bruxelles, et oĂč il avait rĂ©uni Ă  grands frais, peu de temps avant \ 830, tout ce qui peut servir aux plaisirs de la vie, je n’ai pu m’empĂȘcher de m’écrier avec Virgile Sic vos non vobis. Nous avons visitĂ© avec plaisir dans ce palais une exposition publique d’objets donnĂ©s pour les pauvres, et destinĂ©s Ă  ĂȘtre vendus Ă  leur profit. Toutes les personnes riches de Bruxelles se font un devoir d’apporter leur tribut Ă  cette bonne oeuvre. Nous avons remarquĂ© plusieurs tableaux de prix, des meubles et jusqu’à des voitures et des harnais d’une grande richesse ; je n’ai vu qu’une seule chose Ă  critiquer, c’est l’inscription du nom du donateur sur chaque objet donnĂ©. Ainsi la vanitĂ© trouve Ă  se faire jour mĂȘme dans des actes de bienfaisance. Est-ce lĂ  pratiquer ce prĂ©cepte d’une sublime morale la U main gauche doit ignorer le bien que fait la main droite. Le palais du duc d’Aremberg est la demeure d’un simple particulier ; mais combien de souverains d’Allemagne seraient heureux d’étre aussi somptueusement logĂ©s, et de possĂ©der les richesses qu’il renferme! Nulle part je n’ai vu une aussi complĂšte et aussi riche collection de meubles et d’objets curieux du moyen Ăąge. La galerie de tableaux est une des plus riches de l’Europe. Les Wouwermans, les Teniers, les Van Os- tade, etc., ont contribuĂ© Ă  la former. Notre intĂ©rĂȘt n’a pas Ă©tĂ© mĂ©diocrement excitĂ© par la visite d’un hĂŽpital construit depuis quelques annĂ©es, et qui peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un Ă©tablissement modĂšle en ce genre. Il est divisĂ© en plusieurs corps de bĂątiments qui sont affectĂ©s chacun Ă  un genre de maladie. On sent facilement tout le bien qui doit en rĂ©sulter pour la salubritĂ© et la prompte guĂ©rison des malades. Tous les secours que peuvent fournir la mĂ©decine et la chirurgie sont distribuĂ©s avec tant d’intelligence et de dĂ©vouement dans ce magnifique Ă©tablissement, que beaucoup d’étrangers et de personnes riches de la ville, atteints de ma- 15 ladies dangereuses , s’y font transporter pour suivre un traitement et recevoir des soins qu’ils ne pourraient se procurer chez eux, mĂȘme Ă  prix d’or. Des chambres particuliĂšres leur sont rĂ©servĂ©es dans l’établissement. AprĂšs avoir si bien rempli notre journĂ©e, nous passĂąmes la soirĂ©e avec quelques membres de la chambre des DĂ©putĂ©s et du SĂ©nat. On parla des affaires publiques, des rapports de la Belgique avec la France. J’entendis retentir des plaintes contre la France on l’accusait de multiplier autour d’elle les barriĂšres et les prohibitions , tandis que la Prusse et les petits États de l’Allemagne ouvraient leurs villes aux produits industriels de la Belgique. J’ai Ă©voquĂ© le souvenir d’Anvers c’est dĂ©jĂ  loin de la mĂ©moire des Belges; j’ai supposĂ© le cas oĂč ils seraient de nouveau attaquĂ©s par les Hollandais. Savez-vous ce qu’on m’a rĂ©pondu? Bah! les Hollandais! Que feraient-ils devant l’armĂ©e Belge? Il me semble cependant, si j’ai bonne mĂ©moire , que la derniĂšre fois que cette invincible armĂ©e a paru en rase campagne, en 1830 et 1831, elle faisait assez triste figure devant les troupes nĂ©erlandaises commandĂ©es par le prince d’Orange, et qu’il Ă©tait grand 16 temps que le marĂ©chal GĂ©rard arrivĂąt Ă  son secours. J’ai Ă©tĂ© blessĂ© du ton d’assurance de ces messieurs. Ce qui m’a paru, au reste, parfaitement clair, c’est qu’ils avaient entiĂšrement oubliĂ© les obligations qu’ils ont Ă  la France, et que j’aurais eu grandement lien de m’écrier comme Joad Peuple ingrat ! MalgrĂ© cette contrariĂ©tĂ©, le sĂ©jour de Bruxelles nous plaĂźt beaucoup. Nous aurons quelque peine Ă  le quitter. CHAPITRE III. Itou te de Bruxelles Ă  LiĂšge. — IdĂ©e gĂ©nĂ©rale de LiĂšge. — ĂȘtes monuments. — Ses environs. Le 14 juillet nous sommes partis pour LiĂšge par le chemin de fer. Les campagnes sont admirables de fertilitĂ©, mais le sol est plus accidente que sur la route de Valenciennes Bruxelles , et nous sommes obligĂ©s de passer sous plusieurs tunnels. 18 Plus loin, la vue rencontre de riches usines ou de charmantes maisons de campagne. Le chemin de fer, qui ne respecte rien, traverse plusieurs parcs oĂč l’on a dĂ» le laisser se frayer un passage. A quelques lieues de Bruxelles nous recueillĂźmes , Ă  une des nombreuses stations , deux voyageurs et une dame qui prirent place Ă  cĂŽtĂ© de nous. C’étaient des personnes de bonne mine, mais d’un certain Ăąge. La connaissance va vite en chemin de fer. J’appris bientĂŽt de l’un de ces voyageurs que la dame Ă©tait sa femme et que l’autre voyageur Ă©tait son beau-frĂšre. Mon interlocuteur Ă©tait doux , bienveillant, communicatif, et notre conversation ne tarit pas un seul instant. Entre autres choses, il me demanda quel Ăąge je donnais Ă  son beau-frĂšre et Ă  lui. Je rĂ©pondis sans aucune hĂ©sitation Vous avez soixante ans et votre beau- frĂšre est ĂągĂ© de soixante-cinq ans. Il sourit, et m’apprit, Ă  mon grand Ă©tonnement, que son beau-frĂšre avait quatre-vingts ans passĂ©s, et que lui-mĂȘme Ă©tait ĂągĂ© de soixante-seize ans. L’un et l’autre n’avaient aucune infirmitĂ©, Ă©taient grands et forts, et prĂ©sentaient le plus heureux type de ces bonnes figures flamandes, pleines de douceur, 19 de quiĂ©tude, qui indiquent une vie passĂ©e Ă  la campagne, dans le manoir paternel, loin des orages et des soucis de la vie. Cependant le plus jeune, en me parlant de ses aventures de chasse, oĂč il avait rossĂ© quelques gardes champĂȘtres, me disait C’est que j’ai les cheveux prĂšs de la tĂȘte. Son frĂšre, qui nous Ă©coutait en souriant, lui dit d’un ton de bontĂ© paternelle Philippe, vous avez toujours eu une mauvaise tĂȘte. Et l’étourdi de soixante-seize ans trouva sans doute le reproche fondĂ©, car il baissa la tĂȘte et reçut la mercuriale avec la docilitĂ© d’un enfant. Je ne puis vous exprimer tout le charme de cette scĂšne de patriarche. C’était un chapitre de la Bible que j’avais en ce moment sous les yeux. Ils nous quittĂšrent Ă  Chaud-Fontaine, dans la vallĂ©e de la Yesdre, oĂč ils allaient prendre les eaux, beaucoup moins par nĂ©cessitĂ© que comme partie de plaisir. AprĂšs leur dĂ©part, je ne pus m’empĂȘcher de faire la comparaison de ces deux robustes santĂ©s avec celles que nous usons si vite dans les villes, au milieu du tumulte des plaisirs et des affaires. Je trouvai que la balance n’était pas en faveur des habitants des villes ; mais il 20 faut que chacun de nous accomplisse sa destinĂ©e. BientĂŽt nous nous trouvĂąmes sur la cĂŽte escarpĂ©e qui domine la vallĂ©e au fond de laquelle on aperçoit la ville de LiĂšge sur les bords de la Meuse, Ă  une profondeur de plusieurs centaines de mĂštres. Il y avait tout Ă  la fois difficultĂ© et danger Ă  faire descendre les voyageurs Ă  LiĂšge par le chemin de fer, puisque, du point oĂč nous Ă©tions jusqu’à LiĂšge, la pente est trĂšs-rapide et prĂ©sente une inclinaison dix fois plus forte qu’on ne l’admet pour les chemins de fer. On y est parvenu nĂ©anmoins, et la difficultĂ© a Ă©tĂ© rĂ©solue d’une maniĂšre aussi neuve qu’audacieuse. Les wagons se trouvent lancĂ©s par leur propre poids sur la pente, et leur vitesse est modĂ©rĂ©e par une corde en fil de fer. Cette corde est mise en mouvement par plusieurs machines Ă  vapeur, et sert Ă©galement de remorqueur pour remonter le convoi de LiĂšge au haut de la montagne. Un danger Ă©tait Ă  prĂ©voir dans le cas oĂč la corde viendrait Ă  casser ; mais alors, par un mĂ©canisme ingĂ©nieux, les roues se trouvent enrayĂ©es Ă  l’instant mĂȘme, et le convoi est forcĂ© de s’arrĂȘter. 21 Nous n’eĂ»mes pas occasion de faire l’essai de cette derniĂšre combinais on, car le convoi nous descendit Ă  LiĂšge sans aucun accident. LiĂšge , au premier aspect, ne frappe point par sa magnificence ni sa rĂ©gularitĂ©. C’est un amas assez confus de monuments et de maisons dont un grand nombre se cache entre des jardins agrĂ©ables. La ville descend jusque sur les bords de la Meuse. Il est facile de voir que les premiĂšres constructions ont eu lieu prĂšs de cette riviĂšre ; mais Ă  mesure que la population a augmentĂ©, les habitations ont garni les hauteurs qui dominaient la ville; ainsi, aujourd’hui, on pourrait distinguer deux villes dans LiĂšge la ville haute et la ville basse. Dans plusieurs quartiers les rues sont Ă©troites et irrĂ©guliĂšres ; mais Ă  LiĂšge, comme dans presque toutes les villes de la Belgique que nous avons traversĂ©es, on bĂątit Ă  force, on perce des rues , on comble les fossĂ©s des villes pour en faire des boulevards, de telle sorte que, si la paix dure encore trente ans, toutes les vieilles constructions auront disparu, et on ne distinguera plus une ville française d’une ville belge , hollandaise ou prussienne. 22 Il y a cependant Ă  LiĂšge plusieurs monuments qui maintiendront encore longtemps le type national , et qui sont dignes de remarque. En premier lieu il faut placer le palais du prince Ă©vĂȘque de LiĂšge, qu’un incendie avait dĂ©truit en 1 503 et qui a Ă©tĂ© reconstruit en 1508 par l’évĂȘque Erhard de La Marck. Ce palais sert aujourd’hui de palais de justice. Il a une belle façade sur une des places de la ville. Sa principale entrĂ©e est dĂ©corĂ©e par des colonnes d’un effet majestueux. Elle donne accĂšs dans une grande cour carrĂ©e, ressemblant assez Ă  un cloĂźtre, autour de laquelle rĂšgne une large galerie soutenue par des colonnes d’ordre composite d’une pierre trĂšs-dure et presque noire. Ces colonnes sont assez grossiĂšrement taillĂ©es, et paraissent d’une si haute antiquitĂ©, que tout porte Ă  croire qu’elles existaient dĂ©jĂ  dans le palais brĂ»lĂ© en 1503 et qu’elles lui ont survĂ©cu. On nous avait fait l’éloge de la cathĂ©drale ou Ă©glise Saint-Paul. Sans doute cette Ă©glise est d’un assez beau style gothique, mais ellen’apas rĂ©pondu Ă  l’idĂ©e que je m’en Ă©tais formĂ©e. Elle est infĂ©rieure , selon moi, pour le style et les dĂ©corations d’intĂ©rieur, Ă  une ancienne Ă©glise qu’on va rendre 23 au culte l’église Saint-Jacques. Le style d’architecture de cette derniĂšre Ă©glise, le fini de ses ornements gothiques sont tout Ă  fait remarquables. Je me plais surtout Ă  citer de beaux vitraux peints, et un double escalier en spirale, placĂ© dans le cĂŽtĂ© droit du chƓur, pour conduire aux tribunes supĂ©rieures. Cet escalier est un chef- d’Ɠuvre d’élĂ©gance et de lĂ©gĂšretĂ©, et paraĂźt avoir Ă©tĂ© fait dans le quinziĂšme siĂšcle. Nous avions si peu de temps Ă  consacrer Ă  LiĂšge, que nous n’avons pu voir aucune de ses nombreuses manufactures. J’ai regrettĂ© surtout de n’avoir pas visitĂ© les hauts fourneaux et les forges de M. Cokerill Ă  Seraing, ci-devant chĂąteau de rĂ©sidence du prince Ă©vĂȘque de LiĂšge. Au reste, il est impossible, en arrivant Ă  LiĂšge, de ne pas reconnaĂźtre sur-le-champ qu’on est dans une ville manufacturiĂšre, car l’air qu’on y respire est imprĂ©gnĂ© d’une forte odeur de charbon de terre, et les maisons et les rues sont couvertes d’une poussiĂšre noire dont l’air mĂȘme est quelquefois Ă©paissi. L’histoire nous reprĂ©sente les anciens LiĂ©geois comme Ă©tant d’un caractĂšre belliqueux, mais fort turbulent. Le commerce les avait enrichis, ce qui 24 ajoutait encore Ă  leur esprit d’indĂ©pendance, et ils n’obĂ©issaient que difficilement Ă  leur souverain , le prince Ă©vĂȘque de LiĂšge. Aussi, au quinziĂšme siĂšcle surtout, la ville de LiĂšge Ă©tait troublĂ©e par des querelles et des dĂ©sordres continuels auxquels donnaient presque toujours lieu l’élection des princes Ă©vĂȘques et leurs relations avec la ville. Il en rĂ©sulta pour LiĂšge de grands malheurs, puisque ces dĂ©sordres excitĂšrent contre les LiĂ©geois le roi de France Louis XI et Charles-le-TĂ©- mĂ©raire, qui emportĂšrent la ville d’assaut le 30 octobre 1468, et la brĂ»lĂšrent entiĂšrement. Ce dĂ©sastre a fourni Ă  Walter Scott un des Ă©pisodes les plus intĂ©ressants de son cĂ©lĂšbre roman Quentin Durward. Les environs de LiĂšge sont charmants. Nous avons pu nous en faire une idĂ©e du haut d’une terrasse qui domine la ville et ses environs , et d’oĂč l’on peut suivre pendant plusieurs lieues le cours de la Meuse. C’est de cette terrasse que nous avons aperçu le beau jardin appartenant au comte de Mercy Argenteau, et dans lequel se trouve un pont chinois qui joint deux roches d’une Ă©lĂ©vation de cinquante mĂštres. CHAPITRE IV. Route de LiĂšge Ă  Aix-la-Chapelle. — VerĂŻlers. — Rencontre d’un Prussien. — Entretien avec lui. — Sympathie des peuples d’Allemagne pour la France. — Zollverein. — Projet d’alliance. Nous voilĂ  sur le chemin de fer qui conduit de LiĂšge Ă  Aix-la-Chapelle. Nous avons Ă  peine fait une lieue, que dĂ©jĂ  je m’étonne , en jetant les yeux sur la route que nous parcourons , qu’on ait osĂ© concevoir le projet d’un chemin de fer dans un pays aussi accidentĂ©. Que rencontrons- 26 nous , en effet? Des montagnes, des vallĂ©es profondes ! des rochers, des torrents ! Mais que ne peuvent aujourd’hui l’industrie et le gĂ©nie de l’homme ? Les montagnes ? on les a percĂ©es par des tunnels. Les vallĂ©es? on les a comblĂ©es par des viaducs, soutenus par de doubles Ă©tages d’arcades , prĂ©sentant quelquefois une hauteur de trente Ă  quarante mĂštres. Les rochers ? on en a taillĂ© les flancs de granit pour y pratiquer une Ă©chancrure destinĂ©e au passage du chemin de fer. Rien de plus Ă©tonnant, de plus admirable que celte route d’oĂč l’on dĂ©couvre Ă  chaque instant des sites dĂ©licieux. C’est la Suisse en petit, ou plutĂŽt c’est mieux que la Suisse, car cette province de LiĂšge joint Ă  la beautĂ© du paysage les richesses de l’industrie. Et en effet, Madame, pendant que je trace Ă  la hĂąte quelques notes au crayon, Yerviers nous apparaĂźt dans le fond d’une charmante vallĂ©e ; Yerviers, si cĂ©lĂšbre par ses manufactures de draps, et qui, pour la finesse du tissu, la soliditĂ© des couleurs et la perfection de la main- d’Ɠuvre , lutte sans dĂ©savantage contre nos villes d’Elbeuf et de Louviers. Je ne m’attribuerai pas au reste le mĂ©rite de Tl ce rapprochement, que je n’ai pas Ă©tĂ© Ă  mĂȘme de vĂ©rifier on ne s’arrĂȘte , en effet, que quelques minutes Ă  Yerviers pour y recevoir et y laisser des voyageurs; mais je venais de l’entendre faire Ă  un grave Prussien placĂ© en face de moi, et je m’étais senti portĂ© Ă  le croire sur parole. Ce Prussien Ă©tait un homme d’environ soixante- cinq ans , cl’une belle figure , d’une politesse un peu froide, et par cela mĂȘme peut-ĂȘtre annonçant l’homme bien Ă©levĂ©. A cĂŽtĂ© de lui Ă©tait sa femme, dont la physionomie vive et spirituelle et les maniĂšres gracieuses nous avaient prĂ©venu sur-le-champ en sa faveur. Elle parlait fort bien français, et la conversation ne tarda pas Ă  s’engager entre nous. Je crus d’abord qu’elle Ă©tait la fille du Prussien, tant leurs Ăąges me paraissaient disproportionnĂ©s. La dame avait Ă  peine trente ans. J’allais m’engager sur ce terrain, mais elle s’aperçut bien vite de mon erreur, avec ce tact particulier aux femmes , et sans embarras, sans affectation, elle me parla de son mari et de ses enfants. Je ne pus retenir un mouvement de surprise. Elle adressa alors, d’un ton plein de douceur et d’affection , quelques mots en allemand Ă  son mari, sur la 28 figure duquel parut un lĂ©ger sourire, et elle me dit Vous ĂȘtes en ce moment Ă©tonnĂ© que la femme d’un allemand parle français sans aucun accent. Ma rĂ©ponse sera courte et satisfaisante je suis française et nĂ©e Ă  LunĂ©ville. Mon mari, dans un voyage qu’il fit en France, me vit et m’épousa. Mais ne croyez pas que j’aie pour cela rĂ©pudiĂ© ma patrie; non, par le cƓur je suis toujours française. Et bonne française encore ! s’écria le Prus- sien, en riant. Vous ne vous figurez pas, Mon- sieur, combien de lances j’ai Ă©tĂ© obligĂ© de rom- pre Ă  Berlin pour Madame, Ă  cause de son amour patriotique. Vous savez qu’à Berlin on n’a pas toujours Ă©tĂ© juste pour la France. Ne vous hĂątez pas d’accuser les Prussiens. Mon Ăąge vous dit assez que j’ai Ă©tĂ© tĂ©moin des revers de mon pays dans ses luttes dĂ©sastreuses avec la France. En 1814 et en 1815 les Prussiens ont pris leur revanche ; mais ce que vous avez appelĂ© leurs cruautĂ©s, leurs exactions, a Ă©tĂ© bien loin de ce que les Français ont fait en Prusse de 1806 Ă  1812. lien rĂ©sulte donc que la vieille gĂ©nĂ©ration prussienne , qui a bu le ca- lice jusqu’à la lie , a conservĂ© longtemps contre 29 la France une vive animositĂ©... que j’ai Ă©tĂ© loin de partager, se hĂąta-t-il d’ajouter. Concevez- vous quelles durent ĂȘtre les pĂ©nibles impres- sions d’une femme pleine de cƓur et d’amour patriotique , jetĂ©e dans une sociĂ©tĂ© oĂč elle n’entendait que des expressions de haine, des dĂ©clamations retentissantes contre son cher pays. Elle releva fiĂšrement le gant, et se fit le champion de la patrie absente. Ma position de- venait assez embarrassante. Heureusement mes amis comprirent tout ce qu’il y avait de noble et d’élevĂ© dans ce caractĂšre de jeune femme. Ils respectĂšrent sa juste susceptibilitĂ©, et lui permirent d’ĂȘtre française. Ă  Berlin. Elle trouva d’ailleurs de nombreux amis dans la Colonie. » J’allais lui demander l’explication de ce dernier mot, quand il prĂ©vint ma question. Nous avons Ă  Berlin un quartier qui se com- pose presque en entier de descendants de Fran- çais et qu’on appelle la Colonie. Les habitants de ce quartier ont conservĂ© la langue et preste que toutes les habitudes de leur pays. Leurs pĂšres sont arrivĂ©s en Prusse par suite de la rĂ©- vocation de l’édit de Nantes et pour Ă©chapper 50 aux persĂ©cutions que la vieillesse de Louis XIV avait attirĂ©es sur les Calvinistes. Ils ont apportĂ© dans leur nouvelle patrie leur richesse et leur industrie, et ont contribuĂ© Ă  l’agrandissement et Ă  la prospĂ©ritĂ© de Berlin. Aussi ils ont Ă©tĂ© protĂ©gĂ©s par nos rois et principalement par le grand FrĂ©dĂ©ric. Eh bien! Monsieur, croiriez- vous que, malgrĂ© la persĂ©cution qui les a forcĂ©s Ă  sortir de France, malgrĂ© les faveurs dont nos rois les ont comblĂ©s, malgrĂ© cette prospĂ©ritĂ© toujours croissante qui les environne, ils re- grettent la France? Leurs entretiens roulent continuellement sur ce pays qui a rejetĂ© leurs pĂšres de son sein. C’est lĂ  que ma femme allait puiser ses inspirations et entretenir le feu sacrĂ©. Je n’ai apportĂ© aucun obstacle Ă  ces liaisons, ajouta l’excellent homme. Je suis Prussien de naissance et de cƓur 5 mais c’est prĂ©cisĂ©ment parce que j’éprouve le sentiment patriotique au plus haut degrĂ©, que je le respecte chez les au- trĂšs. Oui, ajouta-t-il avec un accent prononcĂ© , je n’ai de haine et de mĂ©pris que pour ces gens toujours prĂȘts Ă  sacrifier leur pays aux intĂ©rĂȘts de leur ambition ou de leur amour-propre -, pour ces misĂ©rables, en un mot, qui n’ont point 31 a de patrie, quel que soit le nom qu’ils portent. » J’aurais voulu, Madame, que vous eussiez assistĂ© Ă  notre entretien, que vous eussiez pu lire sur la figure du noble Prussien ses belles et touchantes Ă©motions en me tenant un si digne langage. Et sa femme! avec quel plaisir elle le regardait! Je compris alors qu’elle pouvait, qu’elle devait l’aimer, malgrĂ© la diffĂ©rence Ă©norme qui sĂ©parait leurs Ăąges peut-ĂȘtre quarante ans. Dans la conversation nous vĂźnmes Ă  parler de Bruxelles. 11 me demanda si j’étais allĂ© visiter le champ de bataille de Waterloo. Non, lui rĂ©pon- dis-je , j’aurais eu trop de peine Ă  voir le théùtre d’un aussi grand dĂ©sastre arrivĂ© aux armĂ©es françaises. Je laisse ce plaisir aux Anglais et aux Prussiens. Les Anglais, poursuivit-il, furent bien heu- reux de nous rencontrer sur cette scĂšne de carnage , car sans nous , vous leur faisiez Ă©prouver la plus rude dĂ©faite dont leurs annales aient fait mention. Et pourtant, lui dis-je , la gloire des Anglais, dans cette journĂ©e, a Ă©clipsĂ© celle des Prussiens. C’est que les Anglais, rĂ©pliqua-t-il vive- 32 ment, sont de grands escamoteurs , de grands comĂ©diens. MisĂ©rables fanfarons! Ils osent se vanter d’avoir vaincu les Français dans cette journĂ©e; mais, Monsieur, interrogez toute l’Al- lemagne. LĂ  il n’est pas un enfant qui ne sache que le 46 juin 4845, Ă  quatre heures du soir, les Anglais Ă©taient battus sur tous les points ; qu’une partie des bagages de l’armĂ©e filait dĂ©jĂ  sur Bruxelles ; que la retraite Ă©tait imminente, puisque tous les corps de l’armĂ©e avaient Ă©tĂ© successivement engagĂ©s , Ă  l’exception d’un corps de deux mille hommes d’excellente cava- lerie que Wellington conservait prĂ©cieusement pour protĂ©ger sa retraite. C’est alors que le pre- mier corps de l’armĂ©e prussienne , commandĂ© par Bulow, arriva sur le champ de bataille, et couvrit les Anglais en attaquant vivement les vainqueurs. La rĂ©serve française n’avait pas encore Ă©tĂ© engagĂ©e ; elle se porta au devant des' Prussiens et leur livra un sanglant combat, pendant que les Anglais, simples spectateurs de cette seconde partie de la journĂ©e, se ralliaient derriĂšre les bataillons prussiens. MalgrĂ© cette intervention inespĂ©rĂ©e de trente mille hommes de troupes fraĂźches , Wellington avait Ă©tĂ© telle- oo ment dĂ©moralisĂ© par le non-succĂšs de ses prĂȘte miĂšres tentatives , qu’il n’osa encore compter sur la rĂ©ussite et ne pensa pas Ă  lancer sur le champ de bataille ses deux mille hommes de cavalerie , qui auraient peut-ĂȘtre dĂšs ce mois ment dĂ©terminĂ© la victoire. Ce ne fut qu’à sept heures du soir, Ă  l’arrivĂ©e de Blucher qui ame- nait un deuxiĂšme corps de troupes fraĂźches, et a quand alors l’armĂ©e française n’avait plus ab- solument rien Ă  lui opposer, que Wellington se ravisa et donna l’ordre de cette fameuse charge de cavalerie qui n’avait que le tort de venir quand tout danger avait cessĂ© et que la bataille n’était plus douteuse. VoilĂ  pourtant, Monsieur, me dit le Prus- sien avec amertume, comme on Ă©crit l’his— toire. La voilĂ  cette fameuse charge de cava- lerie Ă  laquelle les Anglais ont impudemment attribuĂ© la victoire et qu’ils ont reproduite jusqu’à satiĂ©tĂ© dans leurs revues pour la plus grande satisfaction des badauds de Londres. Fut-il jamais charlatanisme plus effrontĂ© ? Oui, Ă  Waterloo, les Français avaient battu les An- glais sans mĂȘme avoir Ă©tĂ© obligĂ©s de se servir de leur rĂ©serve, et ce sont les Prussiens qui sont 5 venus donner la main aux Anglais, et les rele- ver quand ils Ă©taient Ă  terre. » Je ne puis, Madame, vous exprimer le singulier plaisir que j’éprouvais Ă  entendre le noble Prussien s’exprimer ainsi. Il me parlait d’une journĂ©e dĂ©sastreuse pour la France, et cependant son langage me convenait. C’est que je me disais Quelle opinion l’Europe a-t-elle donc de notre France, puisque depuis trente ans deux peuples braves se disputent avec acharnement l’honneur de lui avoir portĂ© le dernier coup, et qu’ils y attachent leur plus beau titre de gloire ? Et puis d’ailleurs je surprenais les Anglais en flagrant dĂ©lit de mensonge, s’attribuant une victoire remportĂ©e par d’autres. Je voyais leurs historiens, leurs orateurs , Walter Scott, Castle- reag, etc., remplir, Ă  proprement parler, le rĂŽle de l’ñne qui joue de la trompette, c’était vraiment divertissant pour un Français. Je conçois, lui dis-je, que vous ayez Ă  vous plaindre de l’Angleterre. Depuis bien des annĂ©es sa politique exploite le monde. Nulle puissance n’a aussi bien qu’elle mis en action la maxime Diviser pour rĂ©gner. Du haut des falaises de Douvres elle observe l’Europe, fait jouer mille 55 ressorts pour pousser les nations du continent les unes contre les autres , se repaĂźt du spectacle de leurs sanglants dĂ©bats , et quand elle les voit Ă©puisĂ©es , haletantes, elle sort de son Ăźle , arrive sur le champ de bataille pour porter secours Ă  celle des nations dont la puissance lui fait le moins d'ombrage, dĂ©cider la victoire en sa faveur , et prendre la plus forte part du butin. Aux uns elle vole leurs villes et des provinces entiĂšres , aux autres elle enlĂšve leur prospĂ©ritĂ© commerciale, Ă  vous elle a cherchĂ© Ă  dĂ©rober une gloire lĂ©gitimement acquise. Vous le savez , et cependant vous ĂȘtes rivĂ©s Ă  son alliance. DĂ©trompez-vous, me rĂ©pondit-il vivement -, si l’Angleterre a pesĂ© longtemps sur l’Allema- gne, ce temps est passĂ© ; aujourd’hui, et pour toujours peut-ĂȘtre, l’Allemagne Ă©chappe Ă  F An- glelerre. J’irai plus loin. Il y a chez tous les peuples d’Allemagne, malgrĂ© mĂȘme les efforts de leurs gouvernements, une disposition pro- noncĂ©e Ă  se rapprocher de la France, car, il faut bien que vous le sachiez, l’Allemagne aime la France autant qu’elle dĂ©teste l’Angle- terre. D’abord le caractĂšre et les habitudes françaises lui plaisent, et ensuite elle a beau- 56 coup plus Ă  gagner avec la France qu’avec Y An- gleterre, en ce qu’elle peut Ă©couler en France autant de produits qu’elle en reçoit d’elle. L’Angleterre, au contraire, faisant trĂšs-peu d’échanges avec l’Allemagne et l’inondant du produit de ses manufactures , Ă©crase les manu- factures allemandes qui ne peuvent se procurer les matiĂšres premiĂšres Ă  aussi bon marchĂ©. Mais le gouvernement prussien, qui craint pour ses provinces RhĂ©nanes les sympathies françaises , autant pour le moins qu’il craint la concurrence anglaise pour son industrie com- merciale, repousse cette tendance de l’Aile— magne vers la France. Il a donc imaginĂ© le Zollverein, ou l’union des douanes allemandes, afin d’abaisser les barriĂšres commerciales entre les divers Ă©tats de l’union et de recrĂ©er l’an- cienne unitĂ© allemande. Le but de cette assoie dation est d’apprendre Ă  l’Allemagne Ă  se pas- ci ser de ses voisins et Ă  trouver chez elle tous les produits manufacturĂ©s qu’elle allait chercher en France ou en Angleterre. Au moyen du Zoll- verein, toute l’Allemagne s’entendra pour que ses produits circulent librement dans tous les États soumis au Zollverein, et pour que les 37 produits des nations voisines , et notamment de la France et de l’Angleterre , soient frappĂ©s d’interdit dans ces mĂȘmes Etats, ou y soient soumis Ă  des droits Ă©normes, ce qui revient au mĂȘme. C’est une mesure dĂ©sastreuse pour l’Ante gleterre qui Ă©tait depuis un grand nombre d’annĂ©es en possession de vendre tous ses pro- duits Ă  l’Allemagne. Maintenant nous croyez- vous encore rivĂ©s Ă  l’alliance anglaise, ainsi que vous me le disiez il n’y a qu’un mo- ment? » — Je connaissais, lui rĂ©pondis-je, l’institution du Zollverein. Je vous accorderai mĂȘme que l’Angleterre en Ă©prouvera un prĂ©judice rĂ©el ; mais croyez-vous que la France n’en souffrira pas Ă©galement? — Moins que l’Angleterre dont l’Allemagne se dĂ©tache tout-Ă -fait, reprit le Prussien , et quand l’influence de cette puissance ne pĂšsera plus sur les relations de la France et de l’Allemagne, doutez-vous que ces deux grands pays ne finissent par s’entendre cordialement ? — J’en accepte l’augure , lui dis-je ; mais au reste le Zollverein n’est pas complĂštement instituĂ©. Tant que l’Autriche n’y aura pas donnĂ© 38 son adhĂ©sion, la mesure sera incomplĂšte , et nous savons tous qu’elle l’a refusĂ©e. — C’est vrai, mais c’est peut-ĂȘtre un peu la faute du gouvernement prussien. 11 s’est hĂątĂ© trop vite de prendre la prĂ©sidence du Zollverein ; et quand on a proposĂ© Ă  l’Autriche d’entrer dans l’association, elle a demandĂ© quelle place on lui avait rĂ©servĂ©e. L’Autriche accoutumĂ©e depuis un grand nombre d’annĂ©es Ă  marcher Ă  la tĂȘte de l’Allemagne, ne peut accepter la prĂ©sidence de la Prusse. Il lui faut une position au moins Ă©gale. Le Zollverein aura-t-il deux prĂ©sidents? D’un autre cĂŽtĂ© la maison d’Autriche qui professe une espĂšce de culte pour le statu quo, consentira-t-elle Ă  livrer ses possessions Ă  l’esprit d’innovation? Que fera-t-elle surtout Ă  l’égard de la Hongrie qui a ses privilĂšges dont elle est si jalouse, et auxquels le Zollverein porterait atteinte? Il faut espĂ©rer que le temps rĂ©soudra ces difficultĂ©s qui sont grandes. En attendant que l’Autriche se dĂ©cide, la Prusse continue Ă  agir auprĂšs des autres États voisins pour les engager Ă  entrer dans l’alliance ; et je sais mĂȘme qu’elle a fait Ă  la Belgique des ouvertures qui n’ont pas Ă©tĂ© repoussĂ©es. 59 — Quoi ! la Belgique , que nous avons sauvĂ©e deux fois d’une invasion, qui nous doit le plus grand des bienfaits, son existence comme Etat ! — La Belgique vous Ă©chappera, soyez-en convaincus. Son intĂ©rĂȘt le lui commande 5 et d’ailleurs quelle foi pouvez-vous avoir dans l’alliance belge? La lĂ©gĂšretĂ© et l’inconstance des Belges ne sont-elles pas proverbiales? Dans quelques annĂ©es, si l’occasion s’en prĂ©sente et si on les en prie bien fort, ils formeront la tĂȘte d’une nouvelle coalition contre la France. Vous n’aviez qu’un moyen de vous assurer d’eux, c’était de les rĂ©unir Ă  la France. Vous le pouviez en 1830. Tout vous Ă©tait permis alors, car l’Europe vous craignait. Vous avez laissĂ© passer le moment, et vous savez aussi bien que moi que l’occasion perdue ne se retrouve pas. — II nous restera toujours un moyen de nous concilier la Belgique et de prĂ©venir son adhĂ©sion au Zollverein allemand, en lui offrant d’abaisser entre nous la barriĂšre des douanes. Elle prĂ©fĂ©rera certainement notre alliance commerciale aux propositions de la Prusse. — Votre gouvernement n’osera pas, il craindrait de blesser vos grands propriĂ©taires de bois 40 auxquels la houille belge ferait une rude concurrence,* et presque tout le commerce français qui aurait trop Ă  souffrir de l’introduction libre des produits belges. La France est principalement un pays de consommateurs. La Belgique au contraire est essentiellement productrice, et pourrait alimenter par ses fabriques un empire de cent millions d’habitants. Tout l’avantage dans l’abaissement des barriĂšres douaniĂšres serait donc pour la Belgique. — Et cependant vous consentez Ă  l’admettre dans le Zollverein. Elle n’y est pas encore , me rĂ©pondit le Prussien. 11 ajouta aprĂšs quelques instants de silence me rĂ©pondit-il en me tendant la main. DĂšs ce moment la connaissance fut faite, et pour vous expliquer comme nous nous trouvĂąmes bien d’avoir changĂ© de places, je me servirai d’une comparaison Supposez que vous ĂȘtes emprisonnĂ©e dans un Ă©troit corset qui vous force de vous tenir raide t guindĂ©e , et que vos pieds mignons sont res— ÎOO serrĂ©s dans des souliers trop petits qui ne vous permettent pas de faire un mouvement sans gĂȘne. Tels nous Ă©tions avec les Anglais. Figurez-vous maintenant qu’au sortir de ces entraves, vous passez une douillette bien large et bien moelleuse, que vous entrez vos pieds dans de bonnes pantoufles bien fourrĂ©es , et que vous vous livrez au coin du feu Ă  une causerie agrĂ©able avec de bons amis. Tels nous nous trouvĂąmes avec la famille allemande. Le mari, comme je l’appris bientĂŽt, Ă©tait un professeur de l’universitĂ© de Gottingue. Sa femme, bonne grosse allemande, avait toujours le sourire sur les lĂšvres, et ne perdait pas un seul moment de vue son mari et ses deux enfants. Le garçon , ĂągĂ© de douze Ă  quatorze ans, avait dĂ©jĂ  l’air recueilli et mĂȘme un peu pĂ©dant c’était un Ă©lĂšve en thĂ©ologie. Quant Ă  sa fraĂźche jeune sƓur , elle aspirait l’air Ă  pleins poumons, Ă©tait heureuse de tout ce qu’elle voyait, de tout ce qu’on disait autour d’elle , de vivre en un mot, et, par son enjouement et sa vivacitĂ©, avait seule le pouvoir de dĂ©rider son pĂšre , dont la figure , quoique pleine de bienveillance, Ă©tait naturellement sĂ©rieuse. 101 Je trouvai dans ce dernier un homme profondĂ©ment instruit, principalement dans l’histoire du moyen Ăąge ; je regardai donc cette rencontre connue une vĂ©ritable bonne fortune. Le reste des passagers se composait de touristes belges ou prussiens qu’on reconnaissait au petit havresac en cuir qu’ils portaient attachĂ© sur le dos. Presque tous y joignaient une Ă©norme pipe suspendue Ă  leur boutonniĂšre, et une petite boĂźte en fer-blanc, passĂ©e en sautoir, et contenant leur tabac. Je suis rĂ©ellement fĂąchĂ© pour le bon peuple allemand de cette absurde passion pour le tabac Ă  fumer. Je trouve qu’elle l’absorbe, qu’elle l’alourdit, qu’elle l’énerve mĂȘme. Si cette habitude me semble rĂ©prĂ©hensible dans des hommes faits , que dois-je en penser quand je la vois dĂ©jĂ  enracinĂ©e chez des enfants de quatorze Ă  quinze ans ! Nous avions aussi sur le paquebot un assez grand nombre d’habitants des bords du Rhin , dont le personnel se renouvelait Ă  chaque station. En face de Bonn le Rhin est fort beau. Il ressemble Ă  un grand lac. D’un cĂŽtĂ© est la ville de Bonn avec ses monuments et son enceinte de murailles, 102 au delĂ  desquelles on aperçoit les hauteurs de Poppelsdorf. De l’autre cĂŽtĂ© du Rhin on a la vue de campagnes fertiles bornĂ©es par le Godesberg et le Kreusberg. Sur la montagne du Godesberg on remarque les belles ruines d’un vieux fort romain. Ce fort, dit une ancienne lĂ©gende, fut bĂąti par un roi Ă©tranger qui Ă©tait venu avec une grande armĂ©e dans ces contrĂ©es. Il fut aidĂ© dans la construction du fort par les mauvais esprits avec lesquels il avait fait alliance , et auxquels il avait Ă©rigĂ© un temple oĂč l’on offrait des sacrifices humains. Par l’influence de ces mauvais esprits, il rĂ©gna sur le Rhin ; mais Ă  l’arrivĂ©e des prĂȘtres chrĂ©tiens , qui par l’efficacitĂ© de leurs priĂšres conjurĂšrent les mauvais esprits, le roi fut forcĂ© Ă  une fuite honteuse. Il est facile de voir qu’on a voulu personnifier dans ce roi Julien l’apostat, qui sĂ©journa effectivement, avec ses lĂ©gions, dans ces contrĂ©es. C’est ainsi qu’on Ă©crivait l’histoire dans ces temps Ă  demi barbares. Ne vous Ă©tonnez pas si je mĂȘle Ă  des descriptions fort sĂ©rieuses et fort exactes quelques contes populaires que vous allez peut-ĂȘtre repousser du 105 haut de votre superbe raison. Songez que je suis dans le pays des enchantements ; que dans quelques instants je vais me trouver en face de ces sept montagnes qui, dans le moyen Ăąge, furent le théùtre de mille combats , de mille aventures chevaleresques; que chacune des ruines que j’aperçois eut dans les anciens temps son tyran et sa victime ; que les grottes qu’on dĂ©couvre dans ces rochers, baignĂ©s par le Rhin, furent l’asile impĂ©nĂ©trable d’un dragon ou autre animal fantastique qui dĂ©vorait les imprudents navigateurs , jusqu’à ce que quelque saint en eĂ»t dĂ©livrĂ© le pays, ou l’eĂ»t rendu doux comme un agneau ; que , parmi les cent cinquante passagers qui sont sur le paquebot, il y en a au moins la moitiĂ© qĂŒi, s’ils ne croient pas fermement Ă  toutes ces traditions, ne sont pas Ă©loignĂ©s de penser qu’elles sont basĂ©es sur quelque Ă©vĂ©nement Ă©tonnant, Ă©trange, inexplicable. Que moi, tout le premier, je commence Ă  ressentir l’influence de l’air du pays ; que la France , Paris et mĂȘme Rouen sont loin de mes pensĂ©es qui errent au milieu de ces ruines, les rebĂątissent, les repeuplent de leurs hĂŽtes , et reproduisent Ă  mes yeux quelques-unes de ces terribles scĂšnes que j’ai lues autrefois 104 dans Herman d’Unna ou les Chevaliers des sept Montagnes. D’aprĂšs toutes ces considĂ©rations , j’espĂšre que vous accueillerez avec indulgence les anecdotes du temps passĂ© que je devrai Ă  la complaisance , ou Ă  la crĂ©dulitĂ©, si vous l’aimez mieux , de mes compagnons de voyage. CHAPITRE II. KƓnigsviiiiter — lies Sept Monts* — Chronique sur Roland* — ChĂąteaux de Rheineck et de Hamuer* stein* Nous arrivĂąmes Ă  KƓnigs'winter , petite ville de quinze cents habitants sur la rive droite du Rhin, au pied de trois coteaux plantĂ©s en vignes la Halde , le Sauerberg et le Hardberg. L’origine de cette ville remonte, dit-on , Ă  l’empereur Valentinien , qui y sĂ©journa avec son armĂ©e pen- 106 dant qu’il faisait construire des forts sur le Lo- wenberg et le Stromberg. C’est ordinairement Ă  KƓnigswinter qu’on prend cfĂšs guides pour parcourir les sept monts. La chaĂźne majestueuse des sept monts tire son nom des sept sommets qui dominent toute la chaĂźne. Le premier et le plus escarpĂ© des sept monts le Drachenfels , s’élĂšve sur le bord du fleuve, comme une paroi colossale. Toutes les pierres qu’on a employĂ©es Ă  la construction de la cathĂ©drale de Cologne ont Ă©tĂ© tirĂ©es des carriĂšres du Drachenfels , que , par cette raison , on appelle aussi CarriĂšres du DĂŽme Dombruch. A l’Est, une crĂȘte joint le Drachenfels avec le Wolken- bourg qui a la forme d’un cĂŽne tronquĂ©. Au Midi, et Ă  droite du Drachenfels, paraĂźt le Stromberg; et derriĂšre ces trois montagnes , un peu plus loin du Rhin , s’élĂšvent le Lowenberg , le Nieder , l’Oelberg et le Hemmerich. Ces sept montagnes, vues du Rhin, forment un magnifique amphithéùtre. Elles sont toutes couronnĂ©es par les ruines d’un chĂąteau. La chronique, en effet, rapporte que chacune de ces montagnes Ă©tait la propriĂ©tĂ© d’un puissant 107 chevalier, qui avait Ă©tabli sa rĂ©sidence dans un chĂąteau fort, situĂ© au sommet, ce qui ne le faisait pas mal ressembler Ă *l’aire d’un aigle. Ces chevaliers, suivant les habitudes du bon vieux temps, Ă©taient un peu voleurs et dĂ©trousseurs de passants. Ils exerçaient surtout leur coupable industrie Ă  l’époque oĂč les marchands se rendaient aux foires de Francfort et de Leipsick , et ne se faisaient faute de les voler quand l’occasion s’en -prĂ©sentait. Les bourgeois des villes voisines, importunĂ©s par les plaintes de ces marchands, firent une confĂ©dĂ©ration pour mettre les voleurs Ă  la raison ; mais les hauts et puissants seigneurs prĂ©tendirent que les vilains cherchaient Ă  empiĂ©ter sur leurs privilĂšges, et formĂšrent de leur cĂŽtĂ© une alliance pour maintenir le statu quo, c’est-Ă -dire leur droit inaltĂ©rable de piller impunĂ©ment comme par le passĂ©. Les anciennes chroniques rapportent meme que cette alliance Ă©tait figurĂ©e par sept flĂšches rĂ©unies dans un mĂȘme faisceau. Il en rĂ©sulta des combats acharnĂ©s. Tous ces chevaliers , couverts de fer , parfaitement exercĂ©s au mĂ©tier des armes , pouvant se rĂ©fugier Ă  l’approche du danger dans un asile presque im- 108 prenable et appelant d’ailleurs Ă  leur aide tous les bandits qui pullulaient dans les Etats voisins, avaient un avantage incalculable sur les habitants des villes. Ceux-ci, en effet, mal armĂ©s , peu ou point exercĂ©s aux combats, manquant de discipline , ne pouvaient que difficilement, malgrĂ© leur courage, rĂ©sister aux attaques rĂ©itĂ©rĂ©es des chevaliers. NĂ©anmoins , les bourgeois suppléÚrent Ă  l’habiletĂ© et Ă  la discipline par le nombre et la persĂ©vĂ©rance. Ils firent essuyer plusieurs dĂ©faites aux chevaliers, s’emparĂšrent de quelques chĂąteaux , et adressĂšrent leurs justes plaintes Ă  l’Empereur. Ce ne fut pas en vain, car l’histoire nous apprend que, dans une seule campagne, l’empereur Henri V prit et fit raser le Drachenfels et le Wolhenbourg. Une fois le faisceau rompu, il fut facile de venir Ă  bout des autres Ă©lĂ©ments de rĂ©sistance, et tous les chĂąteaux tombĂšrent successivement aux mains des bourgeois des villes, qui ne firent grĂące Ă  aucun , et ne laissĂšrent partout que des ruines. Plus loin , le Rhin se partage en deux bras qui entourent deux Ăźles connues sous le nom de Rolandswert ; et sur un rocher Ă  droite se prĂ©- 109 sentent les sombres ruines de Rolandseck. Ces ruines , couvertes de lierre et de plantes grimpantes, sont d’un effet majestueux. La perspective , du haut de Rolandseck, doit ĂȘtre admirable. Une ancienne chronique raconte que Roland, neveu de Charlemagne, vivement Ă©pris d’une jeune beautĂ©, la poursuivait avec toute l’ardeur de l’amour, quand, arrivĂ© dans l’üle de Rolands- wert, il apprit que , pour Ă©chapper Ă  ses poursuites , elle s’était rĂ©fugiĂ©e et avait pris le voile dans un couvent qu’on apercevait sur l’autre rive du Rhin. Le paladin, accablĂ© de regrets, mais voulant du moins respirer le mĂȘme air que sa bien-aimĂ©e, bĂątit le chĂąteau de Rolandseck , d’oĂč il pouvait voir le couvent, et y fixa son sĂ©jour jusqu’à la mort de la jeune fille, qui arriva quelques annĂ©es plus tard. Il est Ă  remarquer que , dans les anciennes chroniques , on se plaĂźt toujours Ă  faire de Roland un amant trompĂ© dans ses espĂ©rances, de mĂȘme qu'on peint Renaud de Montauban comme ayant Ă©tĂ© constamment heureux , et qu’on les retrouve l’un et l’autre, avec ces mĂȘmes caractĂšres , dans les poĂšmes immortels du Boyardo et no de l’Arioste , et dans les chroniques de l’archevĂȘque Turpin. Il est donc fort Ă  croire que le nom de Roland n’a Ă©tĂ© donnĂ© au hĂ©ros de cette histoire qu’à cause de ses malheurs en amour. Si Roland, en effet, avait Ă©tĂ© le hĂ©ros de toutes les aventures qui lui sont attribuĂ©es, il aurait vĂ©cu dix Ăąges d’homme. Au reste, il y a une question prĂ©judicielle Ă  examiner, c’est celle-ci Roland, comte d’Angers, neveu de Charlemagne, a-t-il jamais existĂ©? L’histoire se tait sur ce personnage, mais toutes les anciennes chroniques en parlent ; et la tradition, dans le midi de la France et en Espagne , a transmis jusqu’à nous quelques-unes de ses aventures , et notamment sa dĂ©faite et sa mort Ă  Ronce vaux. Qui faut-il croire? AprĂšs Rolandseck les montagnes s’abaissent et des deux cĂŽtĂ©s du Rhin font place Ă  de riantes campagnes. De nombreux villages apparaissent sur le penchant des coteaux couverts de vignes. Cette vue charmante repose des sombres Ă©motions qu’ont fait naĂźtre les sept monts. Nous aperçûmes bientĂŽt Unkel, petite ville de six Ă  sept cents habitants , et, un peu plus loin , Remagen , le Rigomagum des Romains, 111 autre petite ville, bĂątie sur la chaussĂ©e de Co- blentz Ă  Bonn. Cette chaussĂ©e, qui est une des plus belles d'Allemagne, est due en partie aux Français qui l’achevĂšrent en 1801. A cette occasion on dĂ©couvrit une grande quantitĂ© de pierres milliaires , de monnaies , de colonnes avec des inscriptions , de cercueils et autres objets d’antiquitĂ©. On y trouva la preuve que dĂ©jĂ  les empereurs Marc-AurĂšle et Lucius Verus avaient fait construire une chaussĂ©e dans ces mĂȘmes lieux. En passant devant Erpler-Ley , mont de basalte au pied duquel s’étend le bourg d’Erpel, avec une population de huit cents habitants , on nous fit remarquer que ce mont produisait le meilleur vin blanc de cette contrĂ©e , nommĂ© vin de Le', ce qui Ă©tait dĂ» principalement Ă  l’exposition des coteaux au soleil du matin et du midi. En effet , la nature du sol y entre pour bien peu de chose ; il est tellement pierreux qu’on est obligĂ© de planter chaque cep dans un panier rempli de gazon et de terre, et de l’enterrer ainsi dans les crevasses du rocher. Nous arrivĂąmes devant Linz, petite ville situĂ©e sur le penchant d’une montagne qui s’élĂšve au bord du Rhin. Elle a pour dĂ©fense un chĂąteau 112 placĂ© prĂšs de la porte du Rhin, et que l’archevĂȘque Engelbert III fit bĂątir en 1365 pour assurer la perception du pĂ©age de ce fleuve. L’église m’a semblĂ© fort ancienne et d’un aspect imposant. Plus loin nous aperçûmes le chĂąteau de Rhei- Ă« neck, au haut d’une montagne. Il ne paraĂźt rester du vieux chĂąteau que quelques ruines et une tour fort Ă©levĂ©e, de la plate-forme de laquelle la vue doit s’étendre sur un panorama magnifique. Cette tour, me dit le bon professeur, Ă©tait de construction romaine , et elle avait dĂ©jĂ  usĂ© plusieurs chĂąteaux. » Je conserve cette Ă©nergique expression, qui peint parfaitement l’extrĂȘme soliditĂ© de la tour et en gĂ©nĂ©ral des ouvrages faits par les Romains. Nous passĂąmes devant un Ă©norme rocher noir qui est penchĂ© sur le fleuve. Nous aperçûmes sur son sommet les ruines du vieux chĂąteau de Ham- merstein. Ce chĂąteau Ă©tait une position trop importante pour ne pas avoir excitĂ© la convoitise des puissants seigneurs du voisinage ; aussi nous voyons dans l’histoire qu’il changea fort souvent de maĂźtre. Il fut enfin dĂ©moli par les Français en 1688, aprĂšs la paix de Westphalie. Ăź 13 Avant d’arriver Ă  cette fin, de combien d’évĂ©nements ce chĂąteau n’a-t-il pas Ă©tĂ© tĂ©moin ! Tous les changements de maĂźtre qu’il a subis n’ont pu arriver sans de violentes commotions. Qui nous dira l’histoire secrĂšte du chĂąteau de Hammer- stein? HĂ©las! elle se rĂ©sume peut-ĂȘtre, comme l’histoire de tout le moyen Ăąge, dans des actes d’oppression, de vengeance et de cruautĂ©, au milieu desquels on voit apparaĂźtre, Ă  de rares intervalles, quelques traits de dĂ©vouement, d’hĂ©roĂŻsme et de gĂ©nĂ©rositĂ©. CHAPITRE III. ISuincs dn chĂąteau du Diable. — Origine de ce nom. — Andernacli. — Keuwied. — JEngers. — Ghrenbreit- stcin. — Coblentz. Nous aperçûmes bientĂŽt Andernach, avec ses tours dĂ©labrĂ©es et ses murailles noircies par le temps , et le riant village de Leudesdorf. Avant d’y arriver nous passĂąmes devant les ruines de FrĂ©dĂ©richstein, nommĂ©es aussi le ChĂą- 115 teau du Diable. Je voulus connaĂźtre l’origine de ce surnom, et voici ce qu’on me rapporta Sur l’emplacement de ces ruines existait jadis un chĂąteau redoutĂ© des patrons des ba- teaux du Rhin, qui l’avaient surnommĂ© le CliĂą- teau du Diable, Ă  cause des nombreux nau- frages arrivĂ©s en ce lieu. Ce passage dangereux Ă©tait habitĂ© par un ' chevalier fĂ©lon qui, en fait de mĂ©chancetĂ©, , aurait remontrĂ© au diable lui-mĂȘme. 11 ne sou- tenait le faste de sa maison qu’à l’aide des Ă©pais ves qu’il retirait des naufrages arrivĂ©s sur le Rhin dans l’étendue de ses domaines. Pour aug- menter le nombre de ces sinistres, il faisait enfoncer la nuit, au milieu du fleuve, par un j de ses Ă©cuyers, des pieux aigus qui perçaient les 5 flancs des bateaux et Ă©taient cause de tous les malheurs arrivĂ©s dans ces parages maudits. Ayant appris qu’un riche navire devait re- k culiĂšrement aux soins de son Ă©cuyer ; mais ce dernier avait nĂ©gligĂ© d’exĂ©cuter les ordres de son seigneur, qui avait eu le mortel dĂ©plaisir s de voir, des fenĂȘtres de son chĂąteau, le navire franchir sans avaries la passe dangereuse. Le 116 chĂątelain, pour punir son vassal de sa nĂ©gli- gence, lui avait fait donner cent coups de fouet. Alors l’écuyer, furieux de cette punition, s’était enfui vers l’archevĂȘque de Cologne. AprĂšs s’ĂȘtre jetĂ© Ă  ses pieds et avoir implorĂ© son pardon, il lui avait confessĂ© les crimes dont il s’était rendu complice. L’archevĂȘque, dont le pouvoir Ă©tait grand , avait pardonnĂ© Ă  l’écuyer Ă  cause de son re- pentir; mais il s’était emparĂ© par surprise du chĂąteau , et pour punir le possesseur de ses actes de piraterie, il l’avait fait pendre, haut et court, aux fenĂȘtres de son chĂąteau, qui depuis ce moment avait toujours conservĂ© le nom de ChĂąteau du Diable. » Une seconde version assigne Ă  ce nom une autre origine. Le chĂąteau de FrĂ©dĂ©richstem aurait Ă©tĂ© construit autrefois avec des matĂ©riaux transportĂ©s Ă  l’aide de corvĂ©es imposĂ©es au peuple , et le peuple , irritĂ© contre ces corvĂ©es, aurait par cette raison nommĂ© le chĂąteau , la Maison du Diable. La premiĂšre version offre plus d’intĂ©rĂȘt, la seconde est plus vraisemblable je vous laisse le choix. H7 En lace d’Andernach le Rhin se irouve resserrĂ© entre des rochers escarpĂ©s qui rendent son cours plus rapide. Mon compagnon de voyage m'entretint de l’ancienne splendeur d’Andernach, qui, Ă  l’époque de la fĂ©dĂ©ration des villes du Rhin , pouvait fournir mille fantassins armĂ©s et cinquante che- comparaison avec elles. Pour voir le Giessbach dans toute sa beautĂ© , il {i faut monter jusqu’aux plus hautes cascades et ne pas s’arrĂȘter Ă  moitiĂ© chemin, comme je l’ai vu faire Ă  plusieurs voyageurs qui ne croient pas moins fermement avoir tout visitĂ©. En effet, le Giessbach se prĂ©cipite du haut de la montagne en formant une suite de chutes plus ou moins § Ă©levĂ©es. NouS en avons comptĂ© sept, toutes re- g marquables par la variĂ©tĂ© de leur forme et leurs nombreuses gerbes, et les premiĂšres se trouvent § Ă  une assez grande hauteur. L’impĂ©tueux torrent 1 tombe ainsi, de cascade en cascade , tantĂŽt en nappes d’argent, tantĂŽt en flocons d’écume, sur des rochers qu’il cherche en vain Ă  Ă©branler, et va enfin reposer ses ondes fatiguĂ©es dans les gouffres du lac de Brientz. La plus belle cascade est sans contredit celle qui tombe du haut d’un rocher, dont la base creusĂ©e forme une grotte oĂč on peut facilement se placer, de maniĂšre Ă  avoir le volume d’eau entre soi et i 257 le ciel. Nous j sommes arrivĂ©s au moment meme oĂč le soleil frappait sur la cascade et venait se rĂ©flĂ©chir dans le fond de la grotte aprĂšs avoir traversĂ© le volume d’eau. C’était un effet d’arc- en-ciel fort remarquable. Non loin du Giessbach on nous montra une terrasse avancĂ©e sur le bord du lac et nommĂ©e le Tansplatz la place de danse; la tradition rapporte que deux amants avaient Ă©tĂ© forcĂ©s de renoncer Ă  une union qu’ils dĂ©siraient ardemment. Il Ă©tait d’usage que le jour de la fĂȘte du pays on se rĂ©unĂźt sur le Tansplatz pour se livrer Ă  des danses Ă  la vue du lac. Les deux amants parurent Ă  la fĂȘte dans leurs plus beaux habits. Quand le signal de la walse se fit entendre, ils se rĂ©unirent aux danseurs. On les vit quelque temps, au milieu des autres walseurs, faire admirer leur lĂ©gĂšretĂ© . Insensiblement ils s’approchĂšrent du lac en tournant sur eux-mĂȘmes. On avait fait jusque-lĂ  peu d’attention Ă  eux ; mais quand on les vit gagner le bord du lac, un cri gĂ©nĂ©ral d’effroi se fit entendre. On courut Ă  eux pour les prĂ©venir du danger et les arrĂȘter. Il Ă©tait trop tard. Un dernier tour de walse les prĂ©- 17 258 cipita dans l’abĂźme, oĂč leur vie s’éteignit pendant qu’ils se tenaient Ă©troitement embrassĂ©s. Cette anecdote me frappa beaucoup ; elle me rappela qu’un genre de mort Ă  peu prĂšs semblable fut choisi par les femmes et les filles de Souli, pour Ă©chapper aux outrages des soldats du fameux Ali, pacha de Janina. Qui n’a pas ouĂŻ dire en Europe la rĂ©sistance dĂ©sespĂ©rĂ©e d’une poignĂ©e de Souliotes contre toutes les forces cl’Ali ? Ils durent enfin succomber sous les efforts du nombre et de la trahison. Quand vint ce moment, les femmes et les vierges de Souli, sur le point d’ĂȘtre livrĂ©es aux Albanais, satellites d’Ali, rĂ©solurent de mourir. Elles se rĂ©unirent sur un rocher qui dominait un prĂ©cipice d’une immense profondeur. Toutes se tenaient par la main. Elles commencĂšrent une espĂšce de danse funĂšbre, en chantant sur un rhjthme, d’abord lent, ensuite plus accĂ©lĂ©rĂ©, des adieux Ă  leur cher pays et Ă  la vie. Elles formaient une longue chaĂźne, et Ă  mesure que l’extrĂ©mitĂ© de cette chaĂźne s’approchait du prĂ©cipice , une main se dĂ©tachait et une femme tombait. Aucune ne refusa cet horrible sort ; et les Albanais, au moment oĂč ils arrivaient sur la cime du rocher, pu- 259 rent encore ĂȘtre tĂ©moins de la cliute de la derniĂšre de ces femmes hĂ©roĂŻques. Nous quittĂąmes enfin le Giesshach pour nous rendre Ă  Brientz, oĂč nous arrivĂąmes en peu de temps. La position de Brientz , Ă  l’extrĂ©mitĂ© du lac, est agrĂ©able , quoique trop resserrĂ©e entre le lac et la montagne. Dans l’hĂŽtel oĂč nous nous arrĂȘtĂąmes pour dĂ©jeuner , nous avions la vue du lac, qui offre un aspect bien plus sĂ©vĂšre que le lac de Thun. Il est encaissĂ©, au nord et au midi, entre deux montagnes noirĂątres qui ne prĂ©sentent que peu de traces de vĂ©gĂ©tation. Souvent mĂȘme le pied de ces montagnes baigne dans le lac, en sorte que, sauf quelques rares exceptions, on ne voit sur ses bords ni champs, ni prairies, ni maisons de campagne. Le lac de Brientz est, dit-on, un des plus profonds de la Suisse. Nous prĂźmes ensuite une'de ces petites voitures du pays , qu’on appelle char de cĂŽtĂ©, pour nous rendre Ă  Meyringen. Nous parcourĂ»mes un pays fort agrĂ©able , et bientĂŽt nous arrivĂąmes Ă  la dĂ©licieuse vallĂ©e de Hasli, dans laquelle se trouve Meyringen. Nous 260 rencontrions souvent des champs plantĂ©s de pommiers , qui nous rappelaient notre Normandie et nous faisaient grand plaisir Ă  voir. De tous cĂŽtĂ©s nous apercevions de belles habitations, de riches vergers et une foule de tableaux gracieux et riants qui faisaient contraste avec les sombres rochers qui bordaient l’horizon. Un peu Ă  droite de Meyringen est le Reichen- bach-, dont les eaux font marcher une scierie. Nous allĂąmes visiter cette belle cascade. Le Rei- chenbach s’élance avec une violence inexprimable et un bruit sourd semblable au tonnerre ; il tombe d’abord sur un rocher plat oĂč ses eaux s’étendent et d’oĂč il retombe en large cascade au fond d’un gouffre dont on n’envisage qu’en tremblant la profondeur. Le volume d’eau est plus considĂ©rable qu’au Giessbach ; et cependant nous avons prĂ©fĂ©rĂ© cette derniĂšre cascade , parce qu’il y rĂšgne moins de confusion, que les tableaux sont plus variĂ©s , et que la position d’ailleurs est plus pittoresque. Meyringen est un grand village oĂč on trouve beaucoup d’anciennes maisons suisses; mais le marteau des dĂ©molisseurs y a commencĂ© ses ravages , et dans quelques annĂ©es les beaux et anti- 261 ques chalets seront tous remplacĂ©s par des maisons modernes. Il nous restait Ă  franchir le mont Brunig, qui nous sĂ©parait de Lungern. Nous nous procurĂąmes Ă  cet effet des chevaux et un guide Ă  Mey- ringen. Nous suivĂźmes d’ahord un chemin fortagrĂ©able, pratiquĂ© dans une foret de grands hĂȘtres et de sapins qui nous garantissaient contre les ardeurs du soleil. Nous montions insensiblement, et la premiĂšre Ă©claircie nous laissa voir, Ă  gauche, Ă  une assez grande profondeur, de riantes prairies ; et Ă  droite, le Weilerhorn , qui s’élĂšve au-dessus du Brunig, dans la forme d’un mur taillĂ© Ă  pic. Le Weilerhorn me rappela , sous certains rapports , le MarborĂ© que j’avais vu, trois ans auparavant , dans les PyrĂ©nĂ©es, et qui enceint si majestueusement le cirque de Gavarnie. Mais le Weilerhorn se prolonge en droite ligne, et n’a pas la forme semi-circulaire du MarborĂ© , ses cinq ou six Ă©tages de terrasses, qui sont comme les gradins d’un cirque immense, et, par-dessus ces terrasses, le Daillon , qui protĂšge de sa cime audacieuse cette architecture gigantesque. Il 262 manque encore au Weilerhorn celte cascade de mille deux cent soixante-six pieds d’élĂ©vation , qui , vers les deux cinquiĂšmes de sa chute, rencontrant une roche saillante, se brise , rejaillit et tombe dans le cirque de Gavarnie en vapeurs d’une blancheur Ă©clatante-, et surtout cette brĂšche de Roland, d’un effet si grandiose, ouverte dans la montagne du MarborĂ© par le paladin Roland , d’un seul coup de sa terrible Ă©pĂ©e, si l’on en croit une des traditions les plus audacieuses de cette poĂ©tique contrĂ©e. Aussi, quelque imposant que soit le Weilerhorn, il est bien loin d’exciter cet enthousiasme qui saisit tous les voyageurs Ă  la vue du MarborĂ© et du cirque de Gavarnie. bientĂŽt nous aperçûmes, dans une seconde Ă©claircie, le lac de Rrientz et une grande partie de la vallĂ©e deHasli. Cette vue est trĂšs-belle. Le pays devint plus sauvage. Nous marchions souvent sur un sol rocailleux couvert de mousse. De temps en temps nous rencontrions de petits oasis cultivĂ©s oĂč poussaient l’herbe et quelquefois les pommes de terre. Ils Ă©taient entourĂ©s par une haie de bois sec, renfermaient une ou deux vaches, et plus souvent des chĂšvres et quelque moutons. Au milieu se trouvait un petit chalet Ă  peine 265 suffisant pour garantir le gardien et les animaux contre les rigueurs de la tempĂ©rature. Nous Ă©tions alors Ă  deux mille pieds environ au-dessus du lac de Brientz , mais la journĂ©e Ă©tait si chaude et si belle que nous nous apercevions Ă  peine que l’air Ă©tait rarĂ©fiĂ©. En approchant du point le plus Ă©levĂ© du passage , nous trouvĂąmes une maison de pĂ©age oĂč nous payĂąmes une petite rĂ©tribution destinĂ©e, nous dit-on, Ă  indemniser les ouvriers qui rendent la route praticable pour les piĂ©tons et les chevaux. Nous arrivĂąmes enfin au sommet du Brunig , et alors le lac de Brientz et la vallĂ©e de Hasli se dĂ©ployĂšrent en entier Ă  nos regards vĂ©ritablement enchantĂ©s. En descendant vers Lungern le paysage nous parut aussi pittoresque, mais moins sĂ©vĂšre. La chaĂźne du Vcilerhorn nous serrait de moins prĂšs, et Ă  droite et Ă  gauche de la route des arbres remarquables par leur belle venue et leur hauteur prodigieuse dĂ©robaient Ă  la vue les aspĂ©ritĂ©s des rochers. A la moitiĂ© de la descente nous trouvĂąmes un passage trĂšs-difficile et trĂšs-escarpĂ©, ressemblant 264 plutĂŽt Ă  une rampe d’escalier qu’à une route, et oĂč les chevaux pouvaient Ă  peine tenir pied. Nous le franchĂźmes sans accident. Nous apercevions des vallons et des collines couverts de la verdure la plus fraĂźche ; en face de nous, dans la vallĂ©e, le joli village de Lungern , lieu de notre destination , et un peu plus loin le petit lac de LungernsĂ©e. Le soleil alors se couchait et jetait sur le paysage des flots de pourpre et d’or. Nous avions sous les yeux une nature riche et cultivĂ©e qui formait le plus heureux contraste avec les lieux arides que nous venions de parcourir; aucune maison moderne ne nous gĂątait cette belle partie de la Suisse, les paysans et les paysannes que nous rencontrions Ă©taient vĂȘtus de l’ancien costume suisse. En arrivant Ă  l’auberge du Soleil, Ă  Lungern, nous vĂźmes Ă  la porte des voyageurs allemands que nous avions dĂ©jĂ  rencontrĂ©s Ă  Interlacken, mais qui, au lieu de franchir le Brunig , avaient pris la route de la vallĂ©e, route beaucoup plus facile mais moins pittoresque. Sur la description que nous leur fĂźmes du Brunig, ils regrettĂšrent beaucoup de ne pas nous avoir imitĂ©s. Ils nous 265 donnĂšrent pour motif l’ñge avancĂ© du chel'de la famille, M. K_, conseiller intime du roi de Pi ‱usse. Il avait dĂ©sirĂ© revoir, avant de mourir, la Suisse, qu’il avait visitĂ©e dans sa jeunesse, mais il Ă©vitait autant que possible les fortes fatigues. Sa famille se composait de sa femme , encore assez jeune, de leurs deux filles et d’une dame de compagnie. Le conseiller et sa femme comprenaient peu le français, mais la dame de compagnie et les jeunes filles le parlaient sans aucun accent. Cette sociĂ©tĂ© nous plut beaucoup. Nous n’eĂ»mes avec le conseiller et sa femme qu’un Ă©change de politesses et de propos obligeants, que les jeunes filles reportaient des uns aux autres, aprĂšs les avoir traduits ; mais avec ces derniĂšres et leur dame de compagnie nous fĂźmes presque connaissance. J’annonçai Ă  ces voyageurs que nous n’allions que passer Ă  Lungern, et que nous irions coucher Ă  Alpnach. Il n’y a pas de voiture ce soir , nous dit une des jeunes filles en riant. Notre hĂŽte nous tient prisonniĂšres ici jusqu’à demain matin , et le meme sort vous attend. » C’est que vous n’avez pas insistĂ©, rĂ©pondis-je ; 266 je suis sĂ»r qu’il cĂ©dera Ă  nos justes demandes. J’allai aussitĂŽt le trouver. C’était bien la meilleure figure de Suisse qu’on pĂ»t rencontrer mĂ©lange tout Ă  la fois de bonhomie et de finesse. Il me dit, avec force salutations et un aplomb imperturbable , que ses voitures et ses chevaux ; Ă©taient en voyage, mais que le lendemain, Ă  cinq ' heures du matin, conducteur, cheval et voiture ‱ ... * seraient Ă  notre disposition. C’était exactement la rĂ©ponse qu’il faisait Ă  tous les voyageurs qui tĂ©moignaient le dĂ©sir de ' se remettre de suite en route. En un mot, notre hĂŽte, qui n’était pas gĂątĂ© par le passage trop frĂ©quent des Ă©trangers, voulait absolument nous donner Ă  dĂźner et Ă  coucher. Comme nous Ă©tions Ă  sa discrĂ©tion, je me gardai bien de lui faire sentir que j’avais pĂ©nĂ©trĂ© ses combinaisons. Nous prĂźmes gaĂźment notre i parti, et nous mĂźmes le temps Ă  profit en visitant ’ Lungern. I Nous voilĂ  donc au centre de la Suisse, dans le canton d’Unterwalden, dans la patrie de Guillaume Tell. Notre hĂŽte est sorti ce matin avec moi pour me faire voir les chalets du village , 267 qui sont remarquables par leur beautĂ©. Presque tous sont dĂ©corĂ©s extĂ©rieurement de peintures qui rappellent toujours un trait d’histoire de la Suisse. J’avoue que tous ces hĂ©ros ont de singuliĂšres figures. Qu’importe? aprĂšs tout. Pour les habitants de Lungern, ce sont les actions de Guillaume Tell, d’Arnold de Melchtal, de Winkel- ried et d’autres hĂ©ros suisses qui revivent dans ces grossiĂšres images. Elles servent de texte Ă  leurs narrations durant leurs longues soirĂ©es d’hiver ; elles les excitent Ă  l’amour de leur indĂ©pendance , les encouragent Ă  la dĂ©fense de leurs droits. Les fresques du Vatican, peintes par RaphaĂ«l et Michel-Ange, n’ont peut-ĂȘtre jamais produit autant d’effet sur les Romains modernes. J’ai appris que la vallĂ©e de Lungern n’était qu’aux deux tiers de la descente du Brunig Ă  Sarnen , et qu’aprĂšs avoir suivi cette vallĂ©e pendant plusieurs lieues, nous aurions une nouvelle cĂŽte Ă  descendre pour entrer dans la vallĂ©e de Sarnen. Notre hĂŽte nous a procurĂ© une petite voiture pour faire ce trajet. Avant de prendre congĂ© de lui , je dois dire que nous n’eĂ»mes point sujet 268 de regretter notre sĂ©jour forcĂ© Ă  Lungern. Nous fĂ»mes assez bien traitĂ©s, et Ă  un prix modĂ©rĂ©. En sortant de Lungern nous avons trouvĂ© le lac de LungernsĂ©e, que nous avons cĂŽtoyĂ© pendant assez longtemps. Sur les deux rives de ce lac nous ne voyions ni rocs dĂ©charnĂ©s, ni glaciers , ni montagnes de neige , mais partout des formes arrondies et gracieuses , des collines couvertes de verdure. Nous arrivĂąmes ainsi Ă  la descente rapide dont nous avait prĂ©venu notre hĂŽte de Lungern. On l’a rendue praticable pour les voitures au moyen de rampes qui ont Ă©tĂ© creusĂ©es dans les flancs de la montagne. Nous la parcourĂ»mes donc sans aucun obstacle sĂ©rieux. D’abord nous rencontrĂąmes une forĂȘt de gros arbres d’une prodigieuse hauteur. PI us loin la forĂȘt fit place Ă  de beaux pĂąturages en pente plus ou moins rapide, sur lesquels se trouvaient dissĂ©minĂ©s des chĂąlets et de nombreux troupeaux, et au delĂ  nous commençùmes Ă  apercevoir la belle vallĂ©e de Sarnen. Le pays nous semble encore plus beau qu’à notre arrivĂ©e Ă  Lungern. Il est aussi plus peuplĂ© , plus vivant. Sur les montagnes, couvertes de verdure, qui s’élĂšvent des deux cĂŽtĂ©s de la vallĂ©e. 269 nous distinguons une foule de jolies maisons et des groupes pittoresques de grands arbres. La scĂšne est animĂ©e par des troupeaux de vaches et i de chĂšvres qui, en marchant, font rĂ©sonner d’énormes grelots suspendus Ă  leur cou. Des habitants , vĂȘtus de l’ancien costume suisse, nous accueillent avec un sourire doux et affectueux. Tout, en un mot, donne Ă  cette belle contrĂ©e un caractĂšre vraiment pastoral. C’est Ă  Lungern et dans la vallĂ©e de Sarnen, et lĂ  seulement, que j’ai retrouvĂ© la Suisse telle que nous la dĂ©peignent les anciens historiens. Nous suivĂźmes une route qui est sur la droite de la vallĂ©e, et presque toujours ombragĂ©e par de beaux arbres. Nous laissĂąmes Ă  notre gauche l’église de Sarnen, qui, vue de loin, nous parut jolie. Nous cĂŽtoyĂąmes le lac de Sarnen, qui est beaucoup plus grand que celui de LungernsĂ©e, et dont les bords sont tapissĂ©s de riantes habi-> tĂątions. Tout Ă©tait calme autour de nous, et nous jouissions dĂ©licieusement de l’aspect d’un beau pays, quand des coups de tonnerre nous annoncĂšrent l’approche d’un orage. Le vent siffla, les eaux du lac se soulevĂšrent, et en moins de temps 270 peut-ĂȘtre que je ne mets Ă  l'Ă©crire, un orage Ă©clata sur nos tĂȘtes et nous inonda d’un dĂ©luge de pluie. Ce sont les inconvĂ©nients de la Suisse ; le temps y est extrĂȘmement variable ; les hautes montagnes dont vous ĂȘtes environnĂ© ne vous permettent pas de voir venir les orages , et vous ĂȘtes surpris par un brusque changement de temps au moment oĂč vous cherchiez Ă  vous dĂ©fendre des rayons du soleil. Nous arrivĂąmes enfin Ă  Alpnach , sur le lac de Lucerne, ou des Waldstetten, ou des Qualre- Cantons, noms dont on se sert indiffĂ©remment pour dĂ©signer ce beau lac. Alpnach est situĂ© au fond d’une des quatre haies principales formĂ©es par le lac de Lucerne. Ce lac figure assez bien une croix dont Lucerne serait la tĂȘte , et Alpnach et Kussnach les deux bras. La baie d’Alpnach est resserrĂ©e entre deux hautes montagnes. Elle s’élargit Ă  mesure qu’on avance au milieu du lac. Quand on a passĂ© Win- kel, il faut tourner Ă  gauche pour aller gagner Lucerne. On se trouve alors assez prĂšs du mont Pilate, qui domine toute cette partie du lac. J’ai profitĂ© du court sĂ©jour que j’ai fait Ă  Alp- 271 nach pour visiter son Ă©glise, qui m’a semblĂ© fort ancienne, et oĂč j’ai remarquĂ© des ornements sculptĂ©s en bois d’un curieux travail. On nous avait fait espĂ©rer qu’à Alpnach nous trouverions un bateau Ă  vapeur pour nous rendre Ă  Lucerne. Ce bateau Ă©tait passĂ© il y avait plusieurs heures, et nous fĂ»mes obligĂ©s de nous contenter d’une barque conduite par quatre rameurs. Pendant qu’on disposait la barque nous entrĂąmes Ă  l’hĂŽtel du Cheval-Blanc, sur le lac. Nous fĂ»mes agrĂ©ablement surpris d’y retrouver la famille du conseiller K., qui nous avait devancĂ©s. Elle attendait, comme nous, le moment de s’embarquer pour Lucerne. Les deux jeunes fdles regardaient d’un air peu rassurĂ© la barque qu’on prĂ©parait. La salle Ă©tait pleine de monde, et la plus jeune fille surtout paraissait se demander avec inquiĂ©tude si tout ce monde, quelle comptait du bout du doigt, trouverait place sur le frĂȘle esquif. Quand son doigt fut dirigĂ© vers nous elle nous reconnut et nous montra Ă  sa sƓur. Elles vinrent aussitĂŽt nous souhaiter la bien-venue et nous firent part de leurs craintes. Nous les rassurĂąmes. Le bateau Ă©tait grand. Il 272 Ă©tait conduit par quatre rameurs qui devaient savoir ce qu’il pouvait porter, et sans doute qu’on Ă©viterait de le surcharger. Je me trompais. Les malheureux nous entassĂšrent au nombre de dix- sept dans une barque qui avait Ă©tĂ© faite pour douze ou au plus quatorze passagers. Cependant, comme le temps paraissait redevenu beau et que les bords du lac n’étaient pas agitĂ©s, nous nous mĂźmes en route sans trop d’apprĂ©hension. Quand nous fĂ»mes sortis de la baie d’Alpnach et que nous nous trouvĂąmes dans la direction de Lucerne, le temps changea pour la seconde fois depuis le matin, et le tonnerre se fit entendre de nouveau. Les vagues s’agitĂšrent et le bateau Ă©prouva de tels soubresauts que nos bateliers, malgrĂ© leur assurance, jugĂšrent prudent de changer de route et de se diriger vers la terre, qui heureusement n’était pas Ă©loignĂ©e. Nous gagnĂąmes une petite anse et nous nous mĂźmes Ă  l’abri sous une espĂšce de mauvais hangard. Pendant ce temps l’orage redoublait de violence, avec accompagnement d’éclairs, de tonnerre et de grĂȘle. Les pauvres jeunes filles me regardaient d’un air presque fĂąchĂ© et semblaient ' me reprocher l’assurance que je leur avais don- 275 nĂ©e. Je leur montrai l’horizon , qui Ă©tait dĂ©jĂ  Ă©clairci, les nuages noirs disparaissant derriĂšre le mont Pilate, et un magnifique arc-en-ciel annonçant le retour du beau temps. Cette fois les espĂ©rances que j’avais donnĂ©es ne furent pas trompĂ©es. Le temps redevint tout Ă  fait beau, et nous eĂ»mes jusqu’à Lucerne un ciel sans nuages. Le lac Ă©tait bien encore un peu agitĂ© ; mais les jeunes filles, qui avaient eu la preuve de l’habiletĂ© et de la prudence des bateliers , les voyant ramer vigoureusement sans aucune prĂ©occupation , en tirĂšrent avec raison la consĂ©quence que le danger Ă©tait passĂ© ; elles reprirent toute leur assurance et finirent par rire aux Ă©clats de leur frayeur. Pendant ce temps j’examinais avec attention le lac de Lucerne. C’était la premiĂšre fois que j’avais la vue de ce beau lac, et je ne puis vous exprimer tout le plaisir qu’il me faisait Ă©prouver. Ses bords, fermĂ©s par de hautes montagnes et d’immenses blocs de granit dans la baie d’Alp- nach, s’abaissaient Ă  mesure que nous approchions de Lucerne, et se couvraient sur les deux rives de riantes habitations, de charmantes maisons de campagne, qui descendaient jusqu’au lac 18 * 274 par une pente plus ou moins rapide. Au-dessus on apercevait cette longue suite de montagnes qui entourent le lac, et dont les plus Ă©levĂ©es sont le mont Rigi et le mont Pilate. Ce spectacle Ă©tait tout Ă  la fois gracieux et sublime. Mais le bateau s’avançait toujours vers Lucerne , dont on commençait Ă  apercevoir les flĂšches pointues. Le soleil dardait sur nous avec force ses rayons, qui se reflĂ©taient dans les eaux bleues du lac. La chaleur Ă©tait devenue tout Ă  coup suffocante , et pourtant nous la supportions avec plaisir, car plusieurs d’entre nous avaient Ă©tĂ© plus ou moins atteints par la pluie, et trouvaient doux de se sĂ©cher aux feux du soleil. Enfin nous arrivĂąmes Ă  Lucerne, et nous abordĂąmes sur le quai, en face de l’hĂŽtel du Cygne, oĂč nous descendĂźmes. CINQUIEME PARTIE LUCERNE. LE RiGI. — RETOUR A BALE. CHAPITRE 1. Lucerne. — Ponts. — Église». — CloĂźtre. — Arsenal. — Lion de Thorwaldscn. Ce matin j’ai Ă©tĂ© rĂ©veillĂ© par le soleil, qui donnait dans notre chambre. Ne vous Ă©tonnez pas si je vous parle si souvent du soleil. En voyage, quand la chaleur est modĂ©rĂ©e, c’est un ami bien prĂ©cieux, surtout au bord des lacs et des riviĂšres. Les brouillards, les orages, le sifflement des vents 278 peuvent figurer avec avantage dans une description poĂ©tique qu’on lit le soir, au coin d’un bon feu, mais en voyage, c’est la chose du monde la plus dĂ©testable. Malheureusement, depuis plusieurs jours, quoique dans la plus chaude saison de l’annĂ©e, nous avions Ă©tĂ© trop souvent appelĂ©s Ă  en faire l’expĂ©rience. Nous habitons une chambre d’oĂč la vue est admirable. Dans le lointain nous apercevons, Ă  gauche, le mont Rigi, et Ă  droite , le mont Pilate ; sous nos fenĂȘtres, le mouvement du port de Lucerne, et, quelques pas plus loin, son beau lac, dĂ©jĂ  sillonnĂ© par une foule d’embarcations. Je me suis mis de bonne heure Ă  parcourir la ville. A dix heures du matin, je m’étais dĂ©jĂ  assez bien rendu compte de sa position. J’avais reconnu sa division en deux parties la grande et la petite ville. J’avais visitĂ© plusieurs de ses ponts, qu’on pourrait aussi bien appeler des galeries de bois bĂąties sur pilotis. Deux surtout mĂ©ritent une mention particuliĂšre le pont de la Chapelle , ayant 320 mĂštres de long, et dĂ©corĂ© de peintures sur bois reprĂ©sentant des Ă©pisodes tirĂ©s des temps hĂ©roĂŻques de la Suisse ou de la vie des 279 deux patrons de la ville, saint LĂ©ger et saint Maurice ; et le pont du Hof, ayant 450 mĂštres de long , ornĂ© de 238 peintures sur bois, reprĂ©sentant des sujets tirĂ©s de l’ancien et du nouveau Testament. Ces deux ponts sont couverts. Les peintures qui les dĂ©corent sont d’affreuses croĂ»tes ; mais quand on pense qu’elles sont lĂ  depuis quatre ou cinq cents ans, que rien ne les dĂ©fend contre les passants , et que cependant elles n’ont subi d’autres outrages que ceux du temps, on ne peut s'empĂȘcher de les voir avec intĂ©rĂȘt, j’allais presque dire avec respect. Nous avons ensuite visitĂ© L’église de Saint-LĂ©ger, au Hof, remarquable par son antiquitĂ©, puisqu’elle fut fondĂ©e en 695. On nous a fait voir, dans le chƓur, un fort beau tableau, peint par Lanfranc. 11 reprĂ©sente le Christ au mont des Oliviers. La grille du chƓur est Ă©galement digne d’attention. Un cloĂźtre, d’oĂč l’on a une vue admirable , et qui sert de sĂ©pulture aux principales familles du canton de Lucerne. J’ai toujours aimĂ© ces sĂ©pultures de famille prĂšs des Ă©glises, des lieux oĂč se rassemblent les populations. Cette rĂ©union a quelque chose de touchant, qui me 280 plaĂźt, qui me va au cƓur. Il me semble qu’une des craintes qu’on doit avoir en mourant, c’est d’ĂȘtre oubliĂ© vite, et n’est-ce pas une consolation de pouvoir se dire Quand mes enfants iront Ă  l’église ils passeront prĂšs de mon tombeau, et donneront un souvenir et un regret Ă  ma mĂ©moire. L’église et le couvent des Franciscains. Nous avons vu dans le chƓur un beau tableau, reprĂ©sentant saint Antoine, et, dans la nef, des peintures assez grossiĂšrement faites, figurant les banniĂšres conquises par les anciens Lucernois. Ces derniĂšres peintures m’ont nĂ©anmoins fait plaisir, comme souvenir historique. Nous avons fini par l’arsenal, oĂč l’on nous a montrĂ© la cotte de mailles que portait LĂ©opold d’Autriche Ă  la bataille de Sempacli, oĂč il fut tuĂ©, le 9 juillet 1386. Il est Ă  observer que ce duc LĂ©opold Ă©tait petit-fils d’un autre duc du mĂȘme nom qui, soixante-onze ans auparavant, avait perdu la bataille de Morgarten, aussi contre les Suisses. Dans l’intĂ©rieur de la ville nous avons remarquĂ© plusieurs tours fort anciennes. Sur l’une d’elles est peinte une Ă©norme figure de gĂ©ant. En gĂ©nĂ©ral, les monuments et les maisons ont un caractĂšre de moyen Ăąge qui fait contraste avec les nouvelles constructions qu’on Ă©lĂšve de toutes parts dans la ville. Pour mon goĂ»t personnel , j’aimerais mieux que chaque localitĂ© s’étudiĂąt Ă  conserver en toutes choses son type national. Il nous restait Ă  voir la merveille de Lucerne. On m’avait beaucoup vantĂ©, Ă  Berne , le lion de Thorwaldsen. Je ne sais si vous avez appris que Lucerne s’enorgueillit d’avoir comptĂ© au nombre de ses enfants plusieurs des Suisses qui dĂ©fendirent courageusement, le 10 aoĂ»t 1792, le chĂąteau des Tuileries contre les hordes de Danton, et scellĂšrent de leur sang leur fidĂ©litĂ© au malheureux Louis XYI. Un citoyen de Lucerne, M. de Pfyffer, a voulu consacrer Ă  la mĂ©moire de ses compatriotes un monument digne de leur belle action. Il y a rĂ©ussi d’une maniĂšre aussi neuve que grandiose. Il a demandĂ© au cĂ©lĂšbre Thorwaldsen le modĂšle en plĂątre du monument, et il l’a fait tailler par un jeune sculpteur de Constance nommĂ© Ahorn , dans un Ă©norme rocher qui ferme un 282 des cĂŽtĂ©s de son jardin. Il en est rĂ©sultĂ© un monument d’un effet admirable. Rien de plus simple en apparence, et nĂ©anmoins de plus poĂ©tique, que l’idĂ©e qui a inspirĂ© l’artiste. Un lion percĂ© d’une lance expire en couvrant de son corps un bouclier ornĂ© de fleurs de lis. Au-dessus de la grotte on lit l’inscription suivante Helveliorum fidei ac virtuti. L’expression du lion mourant est sublime. C’est le plus fier courage uni Ă  la plus parfaite rĂ©signation. Ce monument fait honneur au citoyen et Ă  l’artiste. Revenu Ă  l’hĂŽtel, j’ai assistĂ© pour la premiĂšre fois Ă  une longue discussion sur la question qui divise aujourd’hui la Suisse, la question des JĂ©suites 5 et je vous avoue que cette question a pris sur-le-champ Ă  mes yeux des proportions beaucoup plus grandes que je ne m’y attendais. Le canton de Lucerne a appelĂ© des jĂ©suites pour leur confier la direction d’un sĂ©minaire, et peut-ĂȘtre plus tard de l’éducation publique. D’autres cantons demandent que Lucerne 285 soit forcĂ© de renvoyer les JĂ©suites , sous prĂ©texte que leur prĂ©sence menace la tranquillitĂ© publique et mĂȘme la sĂ»retĂ© intĂ©rieure de la Suisse. Tel est, en abrĂ©gĂ©, l’état de la question. Elle Ă©tait dĂ©battue en ce moment devant moi par deux interlocuteurs qui y mettaient une extrĂȘme chaleur et presque de l’animositĂ©. On me dit que c’étaient deux beaux-frĂšres, dont l’un Ă©tait catholique et l’autre protestant. Cela me fit peur; je crus presque ĂȘtre revenu au temps des guerres de religion. Ecoutez l’un La souverainetĂ© des cantons est la base mĂȘme du pacte fĂ©dĂ©ral. En vertu de ce droit souve- rain, Lucerne est bien le maĂźtre de recevoir sur son territoire qui bon lui semble. La diĂšte fĂȘte dĂ©rale, il est vrai, a le droit de prendre des mesures pour rĂ©primer les actes d’un canton qui troubleraient la tranquillitĂ© publique de la Suisse, mais non pour prĂ©venir des troubles qui n’existent pas, et qui peut-ĂȘtre n’arriveront jamais. Si la diĂšte donne l’exemple du mĂ©pris de cette loi fondamentale et intervient dans le gouvernement du canton, non pas pour rĂ©pri~. mer, mais pour prĂ©venir, il y a violation du pacte fĂ©dĂ©ral, il n’y a plus de souverainetĂ© can- tonale. Or, qui se plaint dans Lucerne des JĂ©suites ? Par quels actes ont-ils attentĂ© Ă  la paix de la confĂ©dĂ©ration Suisse ? Quel trouble y a apportĂ© leur prĂ©sence? N’est-ce pas une dĂ©rision de prĂ©tendre qu’ils menacent la sĂ»retĂ© intĂ©rieure de la Suisse? » Entendez l’autr Le pacte fĂ©dĂ©ral, tout en reconnaissant la souverainetĂ© des cantons, contient un arti- cle 8, qui donne Ă  la diĂšte le droit de prendre toutes les mesures que rĂ©clame la sĂ»retĂ© intĂ©- rieure de la Suisse. Or, cette sĂ»retĂ© est incom- patible avec la prĂ©sence des JĂ©suites. En effet, ils ont pour but principal l’extirpa- tion du Protestantisme, qui est la religion d’une grande partie de la Suisse, ce qui les met en Ă©tat d’hostilitĂ© permanente avec cette partie du pays. Ils n’ont ni famille ni patrie , et ils recoi- vent les ordres d’un souverain Ă©tranger, d’un gĂ©nĂ©ral rĂ©sidant Ă  Rome, auquel ils doivent une obĂ©issance aveugle. N’est-ce pas lĂ  une cause suffisante d’alarmes. Le pĂšre de famille attend- il, pour prendre des prĂ©cautions contre le feu , que s maison soit en flammes ? » Je vous ai rapportĂ© fidĂšlement les arguments j pour et contre. La question est scabreuse. Je crois cependant que le droit est en faveur de Lucerne, ! attendu qu’il n’y a pas en Suisse de lois contre les JĂ©suites. Dieu veuille seulement que cette controverse n’amĂšne pas des orages , et qu’elle ne se traduise pas bientĂŽt en coups de fusil et en sanglantes collisions! CHAPITRE II. Voyage au Rigi, 4 aoĂ»t. Ce matin, Ă  cinq heures, nous nous sommes embarquĂ©s sur le bateau Ă  vapeur qui conduit de Lucerne Ă  FluĂ«len. ArrivĂ©s en face de Weggis , nous avons Ă©tĂ© recueillis par une barque qui nous a dĂ©posĂ©s Ă  ce dernier village. 287 Nous avons pris Ă  Weggis des chevaux et un guide pour monter au Rigi. Nous nous sommes mis en route Ă  sept heures j du matin, par un ciel pur et un soleil d’aoĂ»t, et immĂ©diatement nous avons commencĂ© Ă  monter. ! i Nous avons suivi d’abord de jolis sentiers prati- ; quĂ©s entre deux haies et ombragĂ©s de grands j arbres. Des deux cĂŽtĂ©s du chemin Ă©taient de charmants vergers plantĂ©s de chĂątaigniers, de ! pommiers et autres arbres Ă  fruits. La montagne j garantit ces vergers du vent du nord , ce qui explique comment ils peuvent produire des plantes qui appartiennent Ă  un climat plus chaud. Aux vergers ont succĂ©dĂ© des pĂąturages , puis ensuite des rochers escarpĂ©s , dans les flancs desquels Ă©tait taillĂ©e la route que nous parcourions. Partout sur notre chemin nous rencontrions d’admirables points de vue. Nous avions Weggis et ses dĂ©licieux environs Ă  nos pieds ; nous dominions le lac des Quatre-Cantons, et en face de nous , sur l’autre bord du lac, nous apercevions Winkel au pied du mont Pilate. A mesure que nous nous Ă©levions , la vue s’étendait. Nous trouvions toujours , dans les lieux oĂč elle Ă©tait la plus 288 belle, des bancs prĂ©parĂ©s pour la commoditĂ© des voyageurs. AprĂšs avoir passĂ© l’ermitage et la chapelle de Sainte-Croix, la route est devenue excessivement rapide. Nous sommes arrivĂ©s*Ă  une espĂšce de , porte fermĂ©e par quatre blocs Ă©normes, entre \ lesquels nous avons passĂ©. Nos chevaux pouvaient ‱ Ă  peine tenir pied , tant le roc sur lequel ils mar- chaient Ă©tait escarpĂ© et glissant. ' Nous trouvions de distance en distance, sur le bord du prĂ©cipice , des petites croix qui indiquaient , nous a dit notre guide, des stations de pĂšlerinage. Sans cette explication, je les aurais prises, d’aprĂšs un usage assez gĂ©nĂ©ralement suivi dans les montagnes , pour l’indication de quelque horrible chute arrivĂ©e Ă  ces mĂȘmes places. La route a tournĂ© ensuite Ă  gauche et s’est enfoncĂ©e plus avant dans la montagne, oĂč nous avons rencontrĂ© de nouveau des pĂąturages. Un j joli vallon s’est offert Ă  notre vue. C’est lĂ  que se trouvent l’hospice et la chapelle de Notre-Dame- des-Neiges , lieu de pĂšlerinage trĂšs-frĂ©quentĂ©. Nous avons atteint ensuite l’auberge de Staffel, oĂč beaucoup d’étrangers passent une partie de la belle saison. 289 De Staffel au Kulm, qui est le sommet du Rigi, le chemin longe presque toujours le bord de la montagne, en sorte que nous avions une trĂšs-belle vue sur une partie des petits cantons, vue qui s’étendait Ă  mesure que nous avancions vers le Kulm. Une fois arrivĂ©s au Kulm, un admirable panorama se dĂ©roula sous nos yeux. Jamais rien d’aussi beau n’avait encore frappĂ© nos regards. De quelque cĂŽtĂ© qu’ils se dirigeassent, ils rencontraient un horizon immense, qui s’étendait sur une suite de hautes montagnes couvertes de neige, de plaines ondulĂ©es et de beaux lacs. Pour vous en donner une idĂ©e, je me contenterai de vous dire que du Rigi nous apercevions trĂšs-distinctement le lac de Zurich, Ă  une distance de dix-huit lieues. Quand la vue se portait moins loin, elle rencontrait, en face de nous, les cantons de Schwitz , Underwald, Uri etZug, autrement nommĂ©s les petits cantons ; en tournant Ă  droite, Art au pied du Ruffiberg, les ruines de Goldau, le lac de Lowerz, et derriĂšre nous le lac des Quatre-Cantons, qui, bien qu’il fĂ»t Ă©loignĂ© de deux lieues, paraissait si prĂšs, qu’il semblait Ă  la distance d’une portĂ©e de fusil. 19 290 Dans ce magnifique panorama , ce qui me fit le plus de plaisir, me parut le plus fĂ©erique, le plus miraculeux, fut la vue des petits cantons. Songez que nous nous trouvions sur un point culminant, Ă  une hauteur verticale de prĂšs d’un tiers de lieue au-dessus des petits cantons qui ; Ă©taient Ă  nos pieds, et que, de cette hauteur, ! quand les nuages ne venaient pas s’interposer entre la terre et nous, nous pouvions distinguer J parfaitement les villages , les flĂšches des Ă©glises, j les champs, leurs sĂ©parations par des haies , les j maisons, jusqu’à leurs contrevents verts, et ces " beaux lacs qui brillaient comme des nappes d’ar- f gent au milieu de toute cette verdure. La contrĂ©e j i nous paraissait riche, populeuse, cultivĂ©e avec j soin. Les maisons Ă©taient blanches , propres, ; bien bĂąties. Quand un nuage venait se placer entre la terre et nous , il arrivait quelquefois qu’il se partageait, et qu’il s’y faisait une Ă©claircie par laquelle nous avions sur les petits cantons une vĂ©ritable vue d’optique. Je ne puis vous exprimer le charme et la singularitĂ© de ce spectacle. Je vous ai parlĂ© des ruines de Goldau. Je vous dois Ă  cet Ă©gard quelques explications. ; 291 Au-dessus d’Art et sur la pente du Ruffiberg , on aperçoit du Rigi-Kulm une contrĂ©e Ăąpre et sauvage , qui fait contraste avec ce qui l’entoure, et est couverte d’énormes blocs de rochers jetĂ©s le long de la montagne, depuis son sommet jusqu’à sa base, baignĂ©e par le lac deLowerz. Au milieu de ces rochers on distingue encore, le long du lac, quelques cheminĂ©es de maisons enfouies sous une masse considĂ©rable de dĂ©bris. Ce sont les dĂ©plorables traces d’un affreux Ă©vĂ©nement arrivĂ© le 2 septembre 1806. Dans cette contrĂ©e, aujourd’hui si dĂ©solĂ©e, se trouvaient en \ 806 trois villages populeux , Gol- dau, Busingen et Rothen, placĂ©s sur la pente du Ruffiberg. Le 2 septembre, aprĂšs de longues pluies, une des sommitĂ©s du Ruffiberg se dĂ©tacha de la montagne Ă  cinq heures du soir, se prĂ©cipita avec un fracas Ă©pouvantable jusqu’au fond de la vallĂ©e, ensevelit sous ses Ă©normes dĂ©bris les trois villages O et combla une partie du lac deLowerz; les eaux de ce lac, chassĂ©es de leur lit, franchirent les rives , s’élevĂšrent Ă  une grande hauteur, se l'Ă©pan- dirent dans les campagnes et portĂšrent la dĂ©solation jusqu’à SĂ©ewen. Faut-il ajouter que plus de quatre cents personnes et une quantitĂ© considĂ©- 292 rable d’animaux trouvĂšrent la mort sous ce dĂ©luge de pierres qui les couvre encore aujourd’hui? On ne put arracher Ă  ces dĂ©bris qu’une pauvre vieille femme et une chĂšvre. Toutes les tentatives qu’on fit pour pĂ©nĂ©trer plus avant furent vaines , Et l’avare AchĂ©ron ne lĂącha point sa proie. » Cet Ă©vĂ©nement n’est-il pas horrible ? Le rĂ©cit qui m’en fut fait sur le Kulm, en prĂ©sence mĂȘme des lieux tĂ©moins de ce grand dĂ©sastre , me donna le frisson; je frĂ©mis encore en vous le racontant. On vient de tous les points de la Suisse pour voir sur le Rigi le lever du soleil. Ce spectacle , dit-on , est admirable ; et quand un Ă©tranger arrive Ă  Lucerne dans l’étĂ©, c’est la premiĂšre belle chose qu’on lui conseille d’aller voir. Le lever du soleil sur le Rigi est aussi populaire en Suisse que la chute du Rhin Ă  Schaffouse , les glaciers et les lacs, mais il faut en acheter la vue par beaucoup de fatigues et souvent de tentatives inutiles, Ă  cause des changements de temps et 295 des brouillards. Ces accidents, qui arrivent frĂ©quemment sur le Rigi, y ont privĂ© bien des voyageurs d’un spectacle qu’ils venaient chercher de fort loin. Nous ne pĂ»mes nous dĂ©cider Ă  courir cette chance, et nous fĂźmes nos prĂ©paratifs pour descendre Ă  Weggis. J’avais assez examinĂ© la route en montant pour ĂȘtre certain que le retour serait la partie la plus difficile de notre voyage. Nous nous mĂźmes donc en route Ă  trois heures ; mais alors, pendant que nous jouissions encore sur le Kuhn d’un ciel magnifique, un brouillard Ă©pais enveloppa tout Ă  coup la montagne, Ă  quelques centaines de pieds au-dessous de nous, et nous ne vĂźmes plus que des nuages qui menaçaient de remonter et de nous envelopper. Nous continuĂąmes nĂ©anmoins Ă  descendre. AprĂšs un quart d’heure de marche, nous nous trouvĂąmes au milieu du nuage. Il me parut moins Ă©pais que je ne l’aurais cru d’aprĂšs l’aspect qu’il prĂ©sentait du haut delĂ  montagne. C’était comme un brouillard humide et froid, et deux personnes pouvaient facilement se voir Ă  la distance de trois ou quatre pas. Le plus grand inconvĂ©nient qui en rĂ©sultait pour nous, Ă©tait que les chevaux ne 294 lenaienl pas pied sur le roc* humide , ce qui nous forçait Ă  marcher plus lentement et Ă  redoubler de prĂ©cautions. Pendant plus d’une heure nous fĂ»mes dans le brouillard. Il cessa tout Ă  fait quand nous arrivĂąmes Ă  l’ermitage de Sainte-Croix, et nous nous retrouvĂąmes subitement avec un ciel bleu sur nos tĂȘtes, un soleil magnifique, et notre belle vue du matin sur le lac des Quatre-Cantons ,Weggisetses environs. Cette brusque transition, ce bien-ĂȘtre que nous faisaient Ă©prouver la chaleur aprĂšs l’humiclitĂ©, la clartĂ© d’un beau soleil aprĂšs l’obscuritĂ© du brouillard, nous causĂšrent une sensation dont j’essaierais vainement de vous retracer le charme. Tout le reste du voyage jusqu’à Weggis ne fut plus qu’un amusement, malgrĂ© l’extrĂȘme fatigue insĂ©parable d’une course aussi pĂ©nible. En arrivant Ă  Weggis, nous trouvĂąmes , prĂȘt Ă  partir pour Lucerne, un bateau conduit par deux rameurs. Nous nous embarquĂąmes aussitĂŽt , quoique l’aubergiste de Weggis nous eĂ»t averti que la nuit nous prendrait sur le lac. En effet, une lieue avant Lucerne, la nuit arriva, et les bateliers n’eurent plus, pour se diriger 295 sur le lac, que la clartĂ© des Ă©toiles et les feux de Lucerne. Ce fut encore pour nous une derniĂšre , mais dĂ©licieuse sensation , que le spectacle d’une belle nuit, vu au milieu du lac. Le bruit monotone- des rames qui frappaient les eaux en cadence, interrompait seul le silence qui nous environnait. Le balancement du bateau nous invitait presque au sommeil. Nos pensĂ©es erraient du mont Rigi au lac des Quatre-Cantons. Nous admirions leurs accidents si variĂ©s ; nous nous reportions aux Ă©vĂ©nements dont ces lieux avaient Ă©tĂ© tĂ©moins ; nous faisions la revue des siĂšcles passĂ©s ; et, au milieu de cette foule de sensations et de souvenirs , jamais il ne nous vint dans l’idĂ©e de songer aux dangers que nous pouvions courir, la .nuit, dans une frĂȘle barque, sur un lac parsemĂ© d’écueils, et seuls avec des bateliers qui, deux heures auparavant , nous Ă©taient entiĂšrement inconnus. Si ces idĂ©es avaient pu se faire jour un seul instant dans notre esprit, le charme eĂ»t Ă©tĂ© dĂ©truit , et d’une situation heureuse et paisible nous aurions fait une position pleine de malaise et d’inquiĂ©tudes. C’est une nouvelle preuve que, 29G dans la vie, pour ĂȘtre heureux , il ne faut pas trop prĂ©voir. Nous arrivĂąmes enfin au quai de Lucerne , sains et saufs , mais Ă©puisĂ©s de fatigue, et ayant eu Ă  souffrir, tour Ă  tour, pendant cette journĂ©e, du froid, de l’humiditĂ© et de la chaleur. Notre voyage avait durĂ© seize heures, et nous laissait des impressions qui certainement ne s’effaceront jamais de notre mĂ©moire. » CHAPITRE III. DĂ©part de Lucerne. — Lac de Sempach. — SursĂ©e. — Aaran. — Steln. — Rheinfelden. — Angit. — Retour Ă  BĂąle. Nous sommes partis ce [matin de Lucerne Ă  cinq heures, par un temps magnifique. A peine sortis des portes de la ville, nous avons jetĂ© un dernier regard sur le montJRigi et le lac des Quatre-Cantons. Nous avons aussi donnĂ© un regret 298 Ă  Lucerne , ville si bien situĂ©e, si remarquable sous tant de rapports. Nous avons suivi la route de SursĂ©e, qui est fort belle. Les villages que nous traversions Ă©taient gĂ©nĂ©ralement bien bĂątis ; les maisons avaient en- > core la forme des cliĂąlets suisses, mais toutes les t v nouvelles constructions Ă©taient de forme mo- f derne, ce qui nous dĂ©montrait que le gĂ©nie du progrĂšs avait aussi pĂ©nĂ©trĂ© dans ce canton. Des deux cĂŽtĂ©s de la route nous apercevions des prairies ou des champs parfaitement cultivĂ©s ; ce n’était plus la Suisse telle que nous l’avions vue jusqu’alors, avec ses montagnes couvertes de neige , ses rochers escarpĂ©s , ses glaciers , ses bruyantes cascades; mais nous rencontrions des j; plaines fertilisĂ©es par de frais ruisseaux, et oĂč l’on remarquait Ă  peine de lĂ©gĂšres ondulations de terrain , des routes droites et unies plantĂ©es de beaux arbres, des rĂ©coltes de blĂ©, d’avoine et d’orge. 11 est donc incontestable que la Suisse allemande , sous le rapport de la fertilitĂ© des terres et du bien-ĂȘtre qu’elle procure Ă  ses habitants , est la meilleure partie de la Suisse. D’oĂč vient pourtant que peu d’étrangers la visitent et que toutes les sympathies des touristes sont pour les 299 contrĂ©es montagneuses ? En voici, je crois , la cause On ne va en gĂ©nĂ©ral chercher chez les autres que ce qu’on ne trouve pas chez soi or il y a en France et en Europe beaucoup de pays aussi beaux et aussi fertiles que la Suisse allemande , et il n’y a qu’un Oberland et une vallĂ©e de Cha- mouny. La Suisse allemande sera donc encore longtemps, malgrĂ© son heureuse situation, la fertilitĂ© de ses terres et ses sites gracieux, dĂ©laissĂ©e par les poĂštes et les peintres, qui vont surtout chercher en Suisse des inspirations et de fortes Ă©motions. Nous arrivĂąmes sur les bords du beau lac de Sempach , que la route cĂŽtoie pendant quelques, minutes. La vue de ce lac, qui est un de ceux que nous apercevions du haut du Rigi, nous fit grand plaisir. Ses eaux Ă©taient calmes et Ă  peine ridĂ©es par le vent ; ses rives , couvertes de prairies et d’arbres fruitiers, formaient un paysage d’un aspect champĂȘtre et agrĂ©able. Notre conducteur ne manqua pas de nous montrer de loin la chapelle construite Ă  l’endroit mĂȘme oĂč tomba LĂ©opold d’Autriche. C’est Ă  l’extrĂ©mitĂ© septentrionale de ce lac 300 qu’est situĂ©e la petite ville de SursĂ©e, oĂč nous nous arrĂȘtĂąmes pour dĂ©jeuner, et oĂč nous trouvĂąmes les plus grosses Ă©crevisses qu’on nous eĂ»t encore servies en Suisse. De SursĂ©e on voit parfaitement les monts Rigi et Pilate. On a aussi une , trĂšs-belle vue sur les hautes montagnes des cantons d’Uri etd’Unterwald. Cette petite ville, bien bĂątie, et situĂ©e dans une contrĂ©e fort agrĂ©able, nous plut beaucoup. Nous continuĂąmes notre route pour Aarau. Ce fut toujours la mĂȘme suite de beaux villages, de riantes campagnes, de vertes prairies entremĂȘlĂ©es de quelques accidents de terrain. J’avais peine Ă  me croire en Suisse, et, sans les hautes montagnes qui bordaient l’horizon, j’aurais pu aussi bien prendre le pays que nous parcourions pour l’Alsace ou un des dĂ©partements de la France. Enfin , Ă  l’extrĂ©mitĂ© d’une grande plaine, nous aperçûmes Aarau. Nous y arrivĂąmes le soir, \ comme le jour finissait, et nous y passĂąmes la 5 nuit. { J’ai peu de choses Ă  vous dire d’Aarau que je j n’ai fait qu’entrevoir. Cette ville est renommĂ©e ‱ en Suisse par ses filatures, ses ateliers de coutel- lerie, ses manufactures d’indienne et surtout de 301 rubans. Le soir, je me rencontrai dans la salle Ă  manger avec un gros homme, qui, voyant que j’étais Français et que j’arrivais de Paris , me demanda ce qu’on y pensait de la conduite du canton d’Argovie dans la question des jĂ©suites. Ce brave homme croyait que tous les yeux de l’Europe Ă©taient fixĂ©s sur son canton. Je me gardai bien de le dĂ©tromper. Il faut laisser Ă  chacun ses illusions. C’est un des passe-temps, et je dirais presque un des grands bonheurs de la vie. Le lendemain nous nous remĂźmes en route de bonne heure. La contrĂ©e continua Ă  se montrer belle et fertile. Nous arrivĂąmes Ă  Frick, gros bourg situĂ© prĂšs de la jonction des routes d’Aarau et de Zurich , et de lĂ  Ă  Stein, petite ville du canton de Schaffouse, oĂč nous revĂźmes pour la premiĂšre fois le Rhin depuis notre dĂ©part de BĂąle. Nous rencontrĂąmes Ă  Stein deux wurtembour- geois qui venaient de visiter les sources du Rhin dans le canton des Grisons. Ils nous entretinrent des difficultĂ©s qu’ils avaient Ă©tĂ© obligĂ©s de surmonter, surtout aprĂšs avoir passĂ© le lac de Constance. On voyait encore percer dans leur conversation et dans leur dĂ©- I 502 marche, cette espĂšce de surexcitation que donne une difficultĂ© vaincue et qui dispose Ă  la causerie. Ils Ă©taient jeunes, grands et forts , et comme de vĂ©ritables touristes, avaient le long bĂąton ferrĂ© Ă  la main et le petit havresac en cuir sur les Ă©paules. Voici ce que j’ai retenu de leur conversation Le Rhin est formĂ© par trois ruisseaux qui se rĂ©unissent prĂšs de Rheinau , dans le canton des Grisons. De ces trois ruisseaux, l’un sort du lac de ; Toma, sur la pente orientale du mont Saint- Gothard ; l’autre d’un lac prĂšs du mont dit Lukmanierberg, et le troisiĂšme jaillit d’un glacier nommĂ© Rheinwald-Gletscher, situĂ© Ă  une hauteur de six mille pieds. Deux lieues aprĂšs Rheinau, le Rhin arrive prĂšs , de la ville de Coire, en cĂŽtoyant le mont Ga- landa, dont la hauteur est de plus de huit mille pieds. S Il passe par la vallĂ©e de Feldkirch, oĂč il ren- contre Ciller, qui, descendant du mont Arlberg, ĂŻ vient joindre ses eaux aux siennes. ; Il traverse ensuite une contrĂ©e pleine d’anciens \ 303 souvenirs , oĂč l’on trouve le village de Rangkwis, originairement colonie romaine, les ruines du chĂąteau de Montfort, autrefois rĂ©sidence des cĂ©lĂšbres comtes de Montfort, et Dornburen, le plus grand bourg de la monarchie autrichienne ; puis enfin Ă  BrĂ©genz, il entre dans le lac de Constance, qu’il traverse. Au-dessus de la ville de Stein se prĂ©sentent les ruines du vieux chĂąteau des seigneurs de Holien- klingen , qui tenaient Stein sous leur dĂ©pendance. Il paraĂźt que ces seigneurs avaient fait durement peser le joug sur les habitants-, car, dĂšs que ceux- ci trouvĂšrent le moment favorable, ils s’emparĂšrent du chĂąteau par force ou par adresse, le ruinĂšrent de fond en comble, et recouvrĂšrent ainsi leur indĂ©pendance. C’est ce qui Ă©tait dĂ©jĂ  arrivĂ©, ainsi que vous l’avez vu prĂ©cĂ©demment, aux autres petits tyrans des bords du Rhin, et ce qui arrivera toujours chaque fois que les opprimĂ©s recouvreront le sentiment de leur force et de leurs droits. Nous nous dirigeĂąmes ensuite sur Rheinfelden, autre ville situĂ©e Ă©galement sur le Rhin. Nous nous y arrĂȘtĂąmes quelques instants pour voir le pont jetĂ© sur le fleuve, qui, Ă  cette place, est 304 excessivement Ă©troit. Le pont repose en partie sur un rocher, sur lequel s’élevait autrefois ,1e chĂąteau des comtes de Rheinfelden, dĂ©moli au quinziĂšme siĂšcle. > A une lieue de Rheinfelden, nous arrivĂąmes sur l’emplacement de l’ancienne colonie romaine , Augusta Rauracorum, Ă©tablie sous l’empereur Auguste, dans le pays des Rauraciens, par le pro- consul L. Munatius Plancus. Ce lieu, oĂč se joignent les cantons de RĂąle et s d’Argovie, s’appelle encore aujourd’hui Augst, qui est bien certainement l’abrĂ©viation de son I ancien nom Augusta. On y trouve quelques ruines f romaines, et, entre autres, un ancien aqueduc qui porte dans le pays le nom de Heidenloch trou des paĂŻens. D’Augst Ă  BĂąle nous n’avions qu’une distance ; de deux lieues. Ce ne fut plus qu’une promenade, car la route Ă©tait fort belle. Nous passĂąmes devant un assez grand nombre de charmantes maisons de campagne appartenant aux riches citoyens de BĂąle, et Ă  six heures du soir nous Ă©tions de retour Ă  BĂąle. ! RÉSUMÉ Nous avons passĂ© seulement un jour Ă  BĂąle, et le 8 aoĂ»t nous sommes arrivĂ©s Ă  Strasbourg par le chemin de fer. Demain nous retournons directement Ă  Paris par Nancy, demain il ne nous restera que la mĂ©moire des beaux lieux que nous avons parcourus. Avant de quitter les bords duRhin, j’ai cherchĂ© Ă  mettre un peu d’ordre dans mes souvenirs, Ă  rĂ©sumer en un mot mes impressions depuis mon dĂ©part de Paris. Je me suis demandĂ© ce qui m’avait le plus fortement prĂ©occupĂ© pendant ce voyage. Quelle idĂ©e s’était mise en croupe et avait 20 506 constamment galoppĂ© avec moi, pour emprunter le langage de mon vieil ami Horace. Etaient-ce les bords du Rhin de Bonn Ă  Mayence? Etaient- ce les souvenirs du moyen Ăąge ? Etait-ce la Suisse ? Était-ce le Rigi ? Sans nul doute ils ont puissamment excitĂ© mes Ă©motions ; mais une autre idĂ©e s’est emparĂ©e plus fortement encore de moi, et ne m’a presque jamais quittĂ©. Si je la perdais un instant de vue, elle reparaissait en toute occasion , sous toutes les formes, et ne me laissait point de trĂȘve. DĂ©jĂ  vous l’avez vue cherchant Ă  se faire jour dans mes entretiens avec le bon professeur de Got- tingue. Je vous en dois maintenant l’aveu complet. Eh bien , en traversant les provinces rhĂ©nanes, qui appartiennent aujourd’hui Ă  la Prusse et au grand-duc de Hesse-Darmstadt, en voyant les fortifications d’Huningue rasĂ©es, la France m’a semblĂ© humiliĂ©e, amoindrie , rapetissĂ©e , dĂ©chue, en un mot, du rang qu’elle a occupĂ© dans tous les temps en Europe. Je sais qu’on viendra toujours me citer ses trente-quatre millions d’habitants ; mais il n’y a dans ce monde que des grandeurs relatives , et 307 si la France est entourĂ©e d’empires qui ont une population Ă©gale ou mĂȘme supĂ©rieure Ă  la sienne, elle pĂšse Ă©videmment moins aujourd’hui, dans la balance de l’Europe , que sous Louis XIV, oĂč aucun État ne pouvait lui ĂȘtre comparĂ©. La rĂ©volution de 1830 avait paru pour un moment la replacer Ă  son rang naturel; mais cette rĂ©volution, on l’a bientĂŽt circonvenue, rendue inoffensive, Ă©nervĂ©e, Ă  l’aide de notes diplomatiques et de protocoles , et, en dĂ©finitive, on n’a rien fait pour soulager la France du poids de ses humiliations. Je vous citerai Huningue, entre autres exemples Lorsque, en 1680, Louis XIV bĂątit la forteresse d’Huningue, la Suisse s’y opposa, et fit notifier cette opposition au cabinet de Versailles. Vous figurez-vous les petits Etats de la Suisse voulant empĂȘcher le fier Louis XIV, ou mĂȘme son ministre Louvois, tous deux dans la force de l’ñge , de faire en France ce qu’ils jugeraient convenable pour la dĂ©fense du pays ? Quand cette prĂ©tention arriva Ă  Versailles , elle dut exciter parmi les courtisans un rire vĂ©ritablement homĂ©rique. Aussi elle eut le sort qu’elle devait avoir on n’y fit aucune attention. On la 508 regarda comme le rĂȘve d’esprits malades, oĂŻl passa outre, et Huningue fut fortifiĂ© avec le soin consciencieux que Louis XIV apportait Ă  ces sortes de constructions. VoilĂ  que tout Ă  coup, cent cinquante ans aprĂšs, la mĂȘme question se reprĂ©sente. Les petits Etats sont tenaces, et toujours prĂȘts Ă  se cramponner Ă  leurs prĂ©tentions, parce qu’ils se figurent, Ă  tort ou Ă  raison, qu’on les traite avec trop de sans-façon. La Suisse avait conservĂ© le souvenir de la mystification qu’elle avait Ă©prouvĂ©e dans les salons de Versailles. Cela s’était transmis de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration. Quand elle vit, en 1815, le lion Ă  terre, elle voulut aussi lui donner son coup de pied, et elle fĂźt revivre dans les conseils de la Sainte-Alliance la ridicule prĂ©tention qu’elle avait Ă©levĂ©e cent cinquante ans auparavant. Un homme ayant quelque peu de raison croirait qu’on aurait rĂ©pondu Ă  l’envoyĂ© suisse porteur d’une aussi incroyable mission Bon- homme, iaissez-nous rĂ©gler les grands intĂ©rĂȘts de l'Europe , et allez garder vos vaches. » Pas du tout. On accueillit sa demande avec faveur. 309 parce qu’elle contenait une grande humiliation pour la France, parce qu’elle tendait Ă  imposer Ă  cette nation, illustre entre toutes les nations du monde , une injurieuse prohibition, unique en Europe Et Huningue fut dĂ©moli ; Et on interdit Ă  la France de relever ses glorieuses ruines ; Et voilĂ  trente ans qu’un pareil traitĂ© subsiste ; Et depuis 1830 on ne l’a pas dĂ©chirĂ© cent fois ! En vĂ©ritĂ©, il faut que nous soyons bien patients. J’en dirai autant des provinces rhĂ©nanes. Quand je les parcourais , j’y trouvais Ă  chaque pas , surtout Ă  Aix-la-Chapelle, les souvenirs de l’Empire. Est-ce Ă  dire qu’il faille tenter de nouveau le hasard des combats et tĂącher de revenir Ă  ces temps, que j’appellerais presque fabuleux, oĂč toute l’Europe continentale courbait la tĂȘte en frĂ©missant sous notre joug? Non, sans doute. C’était de l’ivresse, du dĂ©lire. Le moindre sous- lieutenant de l’empereur NapolĂ©on se croyait pour le moins l’égal des petits souverains d’Allemagne,. et Dieu sait avec quel superbe dĂ©dain 510 tous ces imberbes, si Ă©tourdis , si imprudents, mais si braves, traitaient des ennemis qu’ils auraient dĂ» respecter. Effaçons tous ces souvenirs de notre mĂ©moire, et adoptons des idĂ©es plus modestes et plus justes sur les relations qui doivent exister entre des Etats indĂ©pendants. Mais cet esprit de modĂ©ration et de justice dont je fais profession, ce dĂ©sir sincĂšre de la paix qui m’anime, ne peuvent m’empĂȘcher de voir que la France n’a pas ses limites naturelles. Le grand Ă©difice de la France, disposĂ© par la nature en forme de carrĂ©, repose sur quatre piliers principaux, placĂ©s aux quatre angles, savoir Bayonne , Cherbourg , Mayence et Hu- ningue fortifiĂ©. Si vous ne lui rendez pas Mayence , et si les fortifications de Huningue ne sont pas rĂ©tablies, la France n’aura jamais qu’une position chancelante, et il est bien temps qu’elle reprenne enfin son assiette. Il est certain que les grands alliĂ©s , en 1815, se sont fait la part du lion. Ils voulaient, disaient-ils, effacer les traces de la rĂ©volution française , et remettre les choses dans le mĂȘme Ă©tat oĂč elles Ă©taient avant cette rĂ©volution ; mais alors ' ! 311 il fallait, en mĂȘme temps qu’ils forçaient la France Ă  se restreindre dans les limites qu’elle avait en 1790, imposer la mĂȘme modĂ©ration aux autres grands Etats de l’Europe , Ă  l’égard des petits États. Qu’est-il arrivĂ© , au contraire ? La Russie , l’Autriche, la Prusse et l’Angleterre ont profitĂ© des dĂ©pouilles de leurs voisins, se sont dĂ©mesurĂ©ment agrandies, et la France est toujours restĂ©e la mĂȘme ; et cependant tous ces gouvernements placent encore aujourd’hui la France en Ă©tat de suspicion , et ne cessent de dĂ©clamer contre son incessante ambition. Ils crient au voleur, pour dĂ©tourner, sans doute, les soupçons d’eux-mĂȘmes , et afin qu’on n’aille pas regarder dans leurs poches. Eh bien ! Ă  mon tour, je dirai aux puissances coalisĂ©es Vous persistez Ă  vouloir maintenir la France dans le lit de Procuste ; mais prenez garde ! L’Angleterre, par l’organe de M. Canning, s’est vantĂ©e d’avoir, comme Éole, la facultĂ© de dĂ©chaĂźner les tempĂȘtes. C’était une grave erreur. A la France seule appartient ce pouvoir. Que l’Angleterre menace, qu’elle se lĂšve, 312 qu’elle fasse la guerre il en rĂ©sultera des luttes, des combats acharnĂ©s, mais pas une rĂ©volution. Que la France , Ă  son tour, s’ébranle , et l’Europe sera remuĂ©e encore une fois jusque dans ses fondements. Vous donc, grands Etats de l’Europe, vous savez par expĂ©rience ce que peuvent les colĂšres de la France. Beaucoup d’entre vous ne doivent leur existence qu’à sa pitiĂ©. Presque tous vous avez reçu l’aumĂŽne de sa magnanimitĂ©. Pour- quoi ne consentiriez-vous pas Ă  rĂ©viser des traitĂ©s faits ab irato, et Ă  prendre pour base d’un nouveau traitĂ© la restitution Ă  la France de toute cette pointe bornĂ©e au nord par le Rhin, de Bin- % gen Ă  Mayence? Vous empĂȘcheriez par lĂ  le retour inĂ©vitable de luttes sanglantes ; car il ne faut pas vous abuser sur les intentions de la France elle veut Mayence, elle veut que les fortifications d’Huningue soient relevĂ©es. Aujourd’hui elle dort 5 mais elle se rĂ©veillera , malgrĂ© les soins qu’on apporte Ă  multiplier autour d’elle les narcotiques , et alors elle obtiendra par la force ce qu’il serait plus politique, plus salutaire, pour les gouvernants et les gouvernĂ©s, de lui attribuer par une concession. Ăź 'f I Ü; 313 Au reste, la rĂ©union Ă  la France de Mayence et de la partie du grand-duchĂ© de Hesse-Darmstadt situĂ©e de ce cĂŽtĂ© du Rhin est si juste et tellement commandĂ©e par la force des choses, que Charles X lui-mĂȘme en avait Ă©tĂ© frappĂ©. Des documents Ă©manĂ©s du cabinet particulier de ce roi nous apprennent que, dans le but de la rĂ©union, sous le ministĂšre Martignac, des nĂ©gociations avaient Ă©tĂ© entamĂ©es et suivies activement avec la Russie, dont l’influence Ă©tait encore toute- puissante en Allemagne ; que tout en faisait prĂ©sager le succĂšs , quand une intrigue de cour renversa le ministĂšre Martignac et lui substitua le ministĂšre Polignac, qui ne sut pas marcher dans la voie qu’on lui avait ouverte, et brouilla tout. Je finirai donc ce journal de notre voyage en empruntant aux annales de la chambre des dĂ©putĂ©s ce mot fameux Il y a quelque chose Ă  faire ; Et c’est de rendre Ă  la France ses limites naturelles. FIN. TABLE. Avant-Propos. PREMIÈRE PARTIE. VOYAGE DE PARIS A COLOGNE. Chap. i. — DĂ©part de Paris pour Bruxelles. — ArrivĂ©e Ă  Bruxelles. Chap. h. — Bruxelles, ses Monuments, ses Promenades. — Entretien sur les affaires publiques. Chap. iii. — Route de Bruxelles Ă  LiĂšge. — IdĂ©e gĂ©nĂ©rale de LiĂšge. — Ses monuments. — Ses environs. Chap. iv. — Route de LiĂšge Ă  Aix-la Chapelle.—Verviers. — Rencontre d’un Prussien. — Entretien avec lui. — Sympathie des peuples d’Allemagne pour la France. — Zollverein. — Projet d’alliance. 518 Chap. v. — Aix-la Chapelle. 46 Chap. vi. — Aix-la-Chapelle suite. 55 Chap. vu. — Aix-la-Chapelle suite. 60 Chap. viii. — Aix-la-Chapelle fin. 69 Chap. ix. — Cologne. 75 Chap. x. — Cologne suite et fin. 80 DEUXIÈME PARTIE. VOYAGE SUR LE RHIN, DE BONN A STRASBOURG. Chap. i. — Bonn. — Embarquement sur le Rhin. — Le Paquebot et ses Passagers. 93 Chap. ii. — KƓnigswinter. — Les Sept Monts. — Chronique sur Roland. — ChĂąteaux de Rheineck et de llam- merstein. 103 Chap. ni. — Ruines du chĂąteau du Diable. — Origine de ce nom.— Andernach.— Neinvied. — Engers. — Ehren- breitstein. — Coblentz. 114 Chap. iv. — Stolzenfels. — Lahnstein. — Boppart. — Welmich. — ChĂąteau de Rheinfels. — Saint-Goar. — DĂźner Ă  bord du paquebot. 126 Chap. v. — Le Lurley. — Schomberg. — ChĂąteau des Comtes palatins. — Goutenfels.— Ôacharach.— Ruines de Slahleck. — Lorch. — Sonelk. — ChĂąteau de Vogls- berg. 136 Chap. vi. — VallĂ©e du Rhingau.—ChĂąteau de Rudesheim. — BrƓmser. — La Tour des Rats. — Bingen. — Le Bin- gerloch. — Le Johannisberg. 146 319 Chap. vu. — Winke!.—Ingelheim.— ChĂąteau i!e Bibrick. — ArrivĂ©e Ă  Mayence. 158 Chap. vm. — Mayence.— Son Origine.—Tribunal secret. — Motif de sou institution. — Ses Statuts. — Son influence.— ArrivĂ©e Ă  Manheim. 163 Chap. ix. — Manheim. — Lever du Soleil. — Altrip. — Spire. — Philippsbourg. 180 Chap. x. — Germersheim. — ChĂąteau de Trifels. — Richard-CƓur-de-Lion. — La Lauter. — Fort Louis. — ArrivĂ©e Ă  Strasbourg. 188 TROISIÈME PARTIE. VOYAGE DE STRASBOURG A BALE ET A BERNE. Chap. i. — Strasbourg. — DĂ©part pour BĂąle. 197 Chap. ii. — ArrivĂ©e Ă  BĂąle. — Visite Ă  Huningue. — Son Ă©tat actuel. — Saint-Louis. — MƓurs et habitudes des BĂąlois. 203 Chap. iii. — BĂąle suite. 214 Chap. iv. — Route de BĂąle Ă  Berne. — DĂ©lĂ©mont. — Ta- vannes. — Pierre Pertuis. — Bienne. — Ile Saint- Pierre. — Aarberg. 220 Chap. v. — Berne. — Sa situation. — Ses Fontaines. — Histoire du duc de ZƓrfhgen. 228 Chap. vi. — Suite de Berne. — Tour de l’Horloge, CathĂ©drale, Plate-forme. — DĂźner Ă  table d’hĂŽte. — Tir fĂ©dĂ©ral de BĂąle. 255 320 QUATRIÈME PARTIE. VOYAGE DE BERNE A LUCERNE. Chap. i. — Thun. — Unterseen. — Interlacken. — Remarques sur la race Anglo Saxonne. 247 Chap. ii. — Lac de Brientz. — Cascade du Giessbach. — Le Tanzplalz.— Meyringen. — Le Reichenbach.— Passage du Brunig. — Lungern. — VallĂ©e de Sarnen. — Alpnach. — Lac des Quatre Cantons. — ArrivĂ©e Ă  Lucerne. 255 CINQUIÈME PARTIE. LUCERNE. — LE R1GI. — RETOUR A BALE. Chap. i. — Lucerne. — Ponts. — Églises. — CloĂźtre. — Arsenal. — Lion de Thorwaldsen. 277 Chap. ii. — Voyage au Rigi. 286 Chap. iii. — DĂ©part de Lucerne. — Lac de Sempach. — StirsĂ©e. — Aarau. — Stein. — Rbeinfelden. — Augst. — Retour Ă  BĂąle. 297 305 RĂ©sumĂ©. IlAurait PrononcĂ© Son Fameux Mot À Waterloo - CodyCross La solution Ă  ce puzzle est constituéÚ de 9 lettres et commence par la lettre C CodyCross Solution pour IL AURAIT PRONONCÉ SON FAMEUX MOT À WATERLOO de mots flĂ©chĂ©s et mots croisĂ©s. DĂ©couvrez les bonnes rĂ©ponses, synonymes et autres types d'aide pour rĂ©soudre chaque puzzle
Je vous prĂ©sente dans ce sujet les solutions du jeu CodyCross Groupe 157 Grille 3. Disponible en tĂ©lĂ©chargement libre sur iTunes et Play Store, ce jeu consiste Ă  trouver des mots Ă  partir d’un certain nombre de puzzles. Ceci est la version française qu’est sortie rĂ©cemment. Je partage l’intĂ©gralitĂ© des rĂ©ponses Ă  travers ce site. Ce jeu est dĂ©veloppĂ© par Fanatee Games, contient plein de niveaux. C’est la tant attendue version Française du jeu. On doit trouver des mots et les placer sur la grille des mots croisĂ©s, les mots sont Ă  trouver Ă  partir de leurs dĂ©finitions. Le jeu contient plusieurs niveaux difficiles qui nĂ©cessitent une bonne connaissance gĂ©nĂ©rale des thĂšmes politique, littĂ©rature, mathĂ©matiques, sciences, histoire et diverses autres catĂ©gories de culture gĂ©nĂ©rale. Nous avons trouvĂ© les rĂ©ponses Ă  ce niveau et les partageons avec vous afin que vous puissiez continuer votre progression dans le jeu sans difficultĂ©. Si vous cherchez des rĂ©ponses, alors vous ĂȘtes dans le bon sujet. Le jeu est divisĂ© en plusieurs mondes, groupes de puzzles et des grilles, la solution est proposĂ©e dans l’ordre d’apparition des puzzles. DĂ©collage d’une fusĂ©e Il aurait prononcĂ© son fameux mot Ă  Waterloo Quelque chose d’ancien que l’on collectionne HostilitĂ© envers quelqu’un Marque de conserves de thon Moyen, secours Genre de Lolita, aguicheuse Suppression administrative Qui a plusieurs tonalitĂ©s Mettre des rĂ©coltes Ă  l’abri Fait de prendre une chose pour une autre AprĂšs avoir terminĂ© cette grille, vous pouvez continuer Ă  jouer sans stress en visitant ce sujet CodyCross Groupe 157 Grille 4. Si vous avez des remarques alors vous pouvez laisser un commentaire Ă  la fin de ce sujet. Merci Kassidi Amateur des jeux d'escape, d'Ă©nigmes et de quizz. J'ai créé ce site pour y mettre les solutions des jeux que j'ai essayĂ©s. This div height required for enabling the sticky sidebar
Voicitoutes les solution Il aurait prononcĂ© son fameux Mot Ă  Waterloo. CodyCross est un jeu addictif dĂ©veloppĂ© par Fanatee. Êtes-vous Ă  la recherche d'un plaisir sans fin dans cette application de cerveau logique passionnante? Chaque monde a plus de 20 groupes avec 5 puzzles chacun. Certains des mondes sont: la planĂšte Terre, sous la
DIORAMA WATERLOO » Le dernier carrĂ© 18 juin 1815 Le diorama prĂ©sente l’instant oĂč, Ă  la fin de la bataille, le GĂ©nĂ©ral CAMBRONNE lance son fameux mot » en rĂ©ponse Ă  la sommation de se rendre formulĂ©e par le gĂ©nĂ©ral Anglais COLVILLE. CAMBRONNE commande un carrĂ© composĂ© du 2Ăšme bataillon du 1er rĂ©giment de chasseurs. Il aurait d’abord rĂ©pondu » la garde meurt mais ne se rend pas », puis Ă  bout de patience aprĂšs deux autres sommations, il aurait criĂ© merde ». CAMBRONNE nia toute sa vie avoir prononcĂ© ce mot qui devait le rendre cĂ©lĂšbre. Ce carrĂ© sera anĂ©anti par les salves de fusils et par les canons des Anglais. CAMRONNE laissĂ© pour mort, victime de plusieurs blessures au visage, au bras doit Ă  la main droite et plusieurs plaies aux jambes, sera cependant sauvĂ© est emmenĂ© en Angleterre, oĂč il Ă©pousera l’infirmiĂšre Anglaise qui le soigna. DĂ©tails Mis Ă  jour 24 mai 2019 RosiĂšre 2022 par le CMBJQuand 04/09/2022 0900 - 04/09/2022 1800 Etang de RosiĂšre
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